DEF LEPPARD (uk) - Def Leppard (2015)
Label : earMUSIC
Sortie du Scud : 30 octobre 2015
Pays : Angleterre
Genre : Hard Rock
Type : Album
Playtime : 14 Titres - 55 Mins
Que peut-il se passer dans la tête de musiciens, après trente cinq ans de carrière, des albums multi platine, des tournées pharaoniques, et qui se retrouvent prisonniers des classic radios, mais toujours adulés par une frange de fans qui attendent leur retour régulier comme celui du proverbial messie ?
Je n'en sais rien, ça n'est pas mon cas, mais je peux au moins essayer d'imaginer.
Alors imaginons. Imaginons que j'ai sorti avec mes potes deux premiers albums très remarqués et platines, encore largement emprunts d'influences AC/DC/SWEET. Puis un troisième album plus accessible, bourré de tubes, qui quelques années après sa sortie plafonnait encore à six ou sept millions de copies US écoulées. Que mon ami batteur perde soudain son bras dans un stupide accident de voiture. Qu'il se fasse construire une batterie électronique sur mesure.
Que soudés dans l'épreuve, à cinq, nous ayons réalisé le LP proto Hard Rock parfait qui allait crever tous les plafonds et faire la nique à Bad du petit Jackson. Que ce disque soit encore considéré trente ans ou presque après comme une référence ultime.
Et que mon autre ami guitariste décède d'addictions diverses. Que les années 90 soient cruelles et me/nous relègue(nt) dans les oubliettes du succès, alors que justement nous y expérimentions des trucs novateurs. Et hop, baguette magique, nous voilà en 2015. Les héros vieillissent, mais ne meurent jamais. Certains retrouvent d'ailleurs toute leur force et leur courage dans l'âge mur. C'est un principe possible, pas une règle.
Une fois tout ça imaginé, que pourrais je faire ? Poursuivre ma route tranquillement, partant en tournée pour relever les compteurs, profiter d'une vague de nostalgie et organiser des prestations autour d'un album unique ? Oui, je pourrais faire ça. Personne ne m'en voudrait.
Mais je pourrais aussi faire autre chose. Me prendre par les couilles, regarder en arrière tout en louchant vers l'avenir, et me souvenir. Me souvenir de tout ce que j'ai accompli, et de ce qu'il me reste à faire.
Et le faire.
DEF LEPPARD, 1987. Le jour où j'ai posé mes oreilles sur Hysteria, je savais que rien ne serai plus comme avant. Que mes exigences de qualité seraient encore plus pointues, mais surtout que cet album allait m'accompagner toute ma vie. Osons le parallèle indécent de subjectivité et affirmons qu'il fut le Sgt Pepper de sa décennie. On peut tenter le coup non ? Mais c'était il y a presque trente ans, et s'y cantonner serait insultant pour ce groupe unique. Parlons plutôt du dernier LP de la bête. Ou plutôt, laissons Phil Collen en parler :
"Nous avons essayé toutes les idées qui venaient. Il n'y avait aucun refus dans l'approche, ce qui est extrêmement surprenant de notre part, nous n'avions jamais agi ainsi. Nous avons abattu un boulot de dingue, et sincèrement, je pense vraiment que c'est notre meilleur album depuis Hysteria".
Joe, quelque chose à ajouter ?
"Il s'appelle Def Leppard, parce que c'est ainsi qu'il sonne. Il ne sonne pas comme une période en particulier de notre carrière, mais plutôt comme un survol. Il montre tout ce que nous avons toujours été, acoustique, heavy, rapide, lent, rien d'autre. C'est pour ça qu'on l'a appelé comme ça, parce que comme QUEEN, nous sommes capable de jouer beaucoup de choses."
Evacuons d'emblée la question gênante, non, Def Leppard n'est pas Hysteria. Pourquoi ? Parce que rien ne sera jamais Hysteria, et attendre ça reviendrait à demander à AC/DC de refaire Back In Black ou à MAIDEN de tenter d'égaler Powerslave.
Et relisez bien les mots de Phil et Joe. Ils n'ont jamais prétendu ça. Mais après avoir écouté ce onzième effort studio du léopard, je m'avoue vaincu dans mon esprit de contradiction. Les deux acolytes ont totalement raison. Def Leppard est le meilleur LP depuis Hysteria, et il est un parfait résumé de la carrière des anglais.
Ça vous parait précipité ? Illogique ? Trop enthousiaste, biaisé, exagéré ? Alors écoutez le et vous verrez.
Joe n'a pas menti, tout est là. Comme un genre de Best Of déguisé en collection d'inédits. Disons pour être honnête, presque tout.
Alors, welcome to the carnival...
On Through The Night et High N'Dry font partie d'un passé trop lointain, et le son s'est trop poli depuis pour y revenir avec une nostalgie déplacée. Mais de Pyromania à Songs From The Sparkle Lounge, le répertoire est revisité, réarrangé, remodelé. De la perfection de ce trop fameux Hysteria ("Let's Go", le single, qui aurait largement eu sa place à la place de "Pour Some Sugar On Me", mélodie BEATLES incluse), jusqu'au Rock Heavy et saignant de Pyromania ("Wings Of An Angel" qui évalue les dommages causés par "Photograph", "Dangerous", aussi puissant et hargneux que "Stagefright" qui cite même dans ses cocottes d'intro "Promises", "Broken N'Brokenhearted", torride et pourtant harmonieux comme un tube 60's), en passant par le synthétique smooth de Slang ("Man Enough" et sa basse qui drague discrètement "Another One Bites The Dust", QUEEN, ou LA grosse référence du LEP), le regain d'énergie de X ("Sea Of Love", qui titille la corde psychédélique du Seeds of Love de TEARS FOR FEARS version Heavy)...
En gros, tout. L'acoustique si chère à Joe ("Battle Of My Own", à mi chemin entre le ZEP orientalisant et Retro-Active, "Last Dance", sensible et à fleur de peau, entre les CORRS et CROWDED HOUSE), et aussi de petites choses plus surprenantes, comme "Forever Young" qui effleure le spectre récent de Songs From The Sparkle Lounge de son Hard Rock presque Pop, "Invincible" qui navigue à vue sur un up tempo lardé de riffs carrés et de piques de basse qui gronde (d'ailleurs les gars, "Invincible", "Dangerous", vous avez fait exprès ou vous êtes toujours vexés que Thriller ai barré la route à Pyromania ?)...
Mais que serait un LP du LEP sans LA ballade ? On avait l'habitude de l'emphase, de "Love Bites" à "Goodbye", mais cette fois-ci, le léopard est plus discret et se tapit derrière un buisson pour sortir les violons et recréer l'esprit des grandes blue song des 80's, sans le côté tape à l'oeil synthétique qui le confinait au gimmick. C'est splendide, superbe, on pourrait presque la retrouver sur la BO de Almost Famous, et son final à des allures de montée au ciel en nuage première classe...
Niveau production, c'est du haut de gamme, les médiums sont nivelés, les aigus brillent et les graves résonnent et rebondissent en écho. La pureté de Hysteria tâchée des cicatrices de Pyromania, du Mutt sans Lange, le tout au Joe's Garage, pas celui de Zappa, non le home studio de Joe E.
Je ne suis pas un grand musicien, je ne suis qu'un pauvre gratte papier qui essaie de retranscrire par des mots les émotions que la musique lui procure. Je n'aurais pas pu réfléchir comme je l'ai fait en préambule, parce que je ne serai jamais à la place de DEF LEPPARD. Je me suis tristement fait à cette idée, mais à la rigueur, le monde n'a pas besoin de gens comme moi. Non, le monde et tous les amoureux de la musique ont besoin de gens comme Joe, Phil, Vivian, et des deux Rick, dont le talent est resté intact, et qui trente cinq ans après leurs débuts discographiques, vingt huit ans après leur album phare, parviennent encore à trouver l'inspiration pour nous rendre heureux, l'espace d'une heure, d'une soirée ou d'une vie. OUI, je dis OUI, Def Leppard est le meilleur LP du LEP depuis Hysteria, et de très loin. C'est un fait, indéniable.
Et comme lorsque je réécoute pour la millième fois "Woman", "Animal" ou "Gods Of War", je me suis étrangement senti à la maison, parmi vous ce soir, vous accueillant de nouveau. La maison, c'est là où est son coeur après tout.
Et une partie du mien vous appartient depuis si longtemps déjà...
Ajouté : Vendredi 30 Octobre 2015 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Def Leppard Website Hits: 7016
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