MNEMIC aborde avec Passenger une étape cruciale de sa carrière, le cap du troisième album. Après un Mechanical Spin Phenomena qui cherchait ses marques et un The Audio Injected Soul qui marquait des points, on se retrouve face à l’album qui va passer ou casser. Bien des groupes se sont tus définitivement après ce test, d’autres ont, au contraire, rejoint les étoiles aux firmament de la gloire (on pense notamment à IRON MAIDEN avec The Number Of The Beast, ou SLAYER avec Reign In Blood). Qu’en sera-t-il de MNEMIC ? La question reste en suspens. J’aurais envie de dire d’abord que cet album sonne très pro. Après les multiples galères connues par le groupe, dont un changement de chanteur, la partie n’était pas gagnée. Guillaume BIDEAU, ex hurleur chez SCARVE, prend le micro, et on peut dire que c’est un bon choix. Sa voix est pleine de la haine nécessaire à ce genre de production, mais comme à 99% des chanteurs de cette catégorie, on attend plus de modulation que l’éternelle alternance voix hurlée/voix douce. Les standards sont faits pour être brisés les gars, et ça n’est pas parce que l’étang est plein de zygnémas et que tout le monde trouve ça beau qu’il ne faut pas le nettoyer ! Un peu d’audace que diable ! Certes, le screaming-core, répond à des codes très précis, mais les encyclopédies de la musique ne retiennent pour mémoire que les groupes qui ont su aller au delà des règles, pour offrir quelque chose de novateur. Paul McCARTNEY disait qu’il aimait prendre une note, la plier, la tordre, la briser pour arriver au final à obtenir un son nouveau. Bien des groupes devraient appliquer cette réflexion. L’album démarre assez fort sur un titre court, « Humanaut », qu’on croirait sorti de City de STRAPPING YOUNG LAD. « In The Nothingness Black », semble être le mètre étalon de ce cd. Couplets heurtés, refrain souple, le tout avec une grande cohésion rythmique, on retrouvera ce schéma tout au long des 43 minutes, à de rares exceptions près. « Meaningless », le single, co-écrit par ROY Z (Bruce DICKINSON, JUDAS PRIEST) à tout pour cartonner, il est redoutablement efficace. « Psykorgasm » voit débouler deux invités de choix, Barney (NAPALM DEATH) et Jeff Walker (ex CARCASS), et c’est bien sa seule originalité. « Pigf**k » propose une construction intéressante, avec des patterns rythmiques en décalage avec le chant, créant une atmosphère assez étrange, comme un splendide arc-en-ciel sur fond d’orage intense. « Electric I’d Hypocrisy », option plutôt mélodique, calme les débats, tout en restant très agréable d’écoute. « Stuck Here » voit Guillaume essayer d’intéressants phrasés, seul détail inhabituel au niveau du chant. « Shape Of The Formless », c’est le défouloir, compteur bloqué à 200mph, plus THE HAUTED que l’original. L’album se clôt sur « The Eye On Your Back », titre emblématique de cette production, avec toujours ces transitions entre la colère et la paix.
Alors, quelle conclusion ? En se référant aux ténors du genre, tels Devin Townsend ou encore MESHUGGAH, MNEMIC semble tout de même quelques tons en dessous. Moins apocalyptique que le premier, moins aventureux que les seconds, MNEMIC semble destiné, sauf effort de dernière minute, à jouer les seconds couteaux encore un certain temps. Tout sonne très juste, à la septième de croche près, mais je le disais dans une précédente chronique, ce genre de considération n’est plus à prendre en compte à l’heure de l’utilisation systématique de Pro-tools. Le son, la précision semblent être les valeurs primordiales de ce style, ce qui fausse la donne. L’efficacité est certes importante, mais on retombe vite dans la production pour ados avides de sensations « fortes », le genre de trucs qui passe sur MTV Pulse à longueur de journée, qu’on apprécie sur le coup, et qui gonfle les parents. Mais méfiez vous messieurs, car si Mick JAGGER effrayait les gens de bonnes mœurs dans les années 60, il n’est plus aujourd’hui qu’un vieux bourgeois qui monnaye sa moue lippue contre espèces sonnantes et trébuchantes. Putain, même IGGY fait de la pub maintenant… Hope i’d die before i get old…