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FORUM FEST (FRA) - Ardoise à Laudun (21/01/12)


Groupes Présents au concert : AKENTRA (FRA), GRAVITY (FRA), EILERA (FRA), KALISIA (FRA)
Date du Concert : samedi 21 janvier 2012
Lieu du Concert : L’Ardoise (Laudun, France)

Malgré une forte reconnaissance glanée à la sortie de son premier album, Cybion, les labels et organisateurs de concerts sont toujours restés assez frileux quant à s’occuper de KALISIA. Groupe inclassable qui, après 14 ans de maturation, a accompli, en 2009, un retour marqué au sein de la scène française, en dévoilant une œuvre démesurée et extrêmement aboutie. Pourtant, en trois ans, seul un petit passage au Hellfest 2010 a permis aux Montpelliérains de tenter d’insuffler la même magie en live que sur CD. Et puis, voilà qu’est annoncée cette date du 21 janvier 2012, dans un petit coin (perdu) du Sud de la France avec, comme précision, l’histoire musicale de Cybion interprétée intégralement sur scène. Un show exceptionnel donc, presqu’exclusif même, puisque le groupe ne prévoit pas de prochains shows pour le moment. Après une bref hésitation du fait que le concert soit si loin de la capitale, le caractère unique de cette date justifiait à lui seul les plus de 700 km de route, surtout en début de week-end. Dommage que le public français n’ait pas été emballé plus que ça, car la grande salle du Forum Fest paraissait tout de même plutôt vide, avec un peu moins de deux cents personnes présentes ce soir-là.

Pour débuter cette soirée, c’est AKENTRA qui investit la scène, devant un public des plus éparses. Ce petit groupe du Centre va tenter, pendant trois quarts d’heure, de communier un Rock Gothique métallisé aux spectateurs les plus attentifs, mais sans rencontrer de réel succès. Et c’est malheureux, car l’on sent que les cinq comparses cherchent à bien faire. Toutefois, face à une musique rarement nerveuse, emmenée par la voix fluette de Lucia qui ne porte guère, même sur les intonations plus appuyées, il est difficile de se mettre en condition pour les festivités à venir. Par ailleurs, pour rester sur le chant, le timbre live de la frontwoman laisse clairement de marbre, en contraste avec le rendu studio.
En dehors d’une musique peu entraînante sur scène, les instrumentistes n’arrangent pas les choses, demeurant sensiblement personnels quant à leurs jeux, très concentrés sur leurs manches. On ne peut leur reprocher de vouloir promouvoir au mieux les compositions issues d’Asleep, leur premier album de 2010 ; le prosaïsme scénique leur cause, toutefois, davantage de tort. Le guitariste Thomas tente, pourtant, de vivre sa musique plus dynamiquement que ses camarades, même si exagérant parfois les choses. Quelques applaudissements polis du public accompagnent les fins de morceaux qui jamais ne sont présentés.
Et c’est peut-être un des points les plus noirs de cette prestation : la communication avec les spectateurs. Malgré la voix charnellement sensuelle qu’adopte la jeune femme au micro pour tenter de booster la foule, c’est bien ailleurs que dans la fosse qu’on aurait envie de se bouger à ce moment. Les interventions du guitariste frisent également un fort amateurisme, et ne permettent pas d’établir une quelconque connexion avec l’auditoire attendant patiemment la fin du set. L’on ne peut que souhaiter à AKENTRA de se perfectionner, et peut-être nous revenir sous un bien meilleur jour - celui-ci leur ayant complètement échappé. (4/10)

GRAVITY sauront-ils nous remettre dans le bain ? Une jolie demoiselle s’empare, là encore, du micro, l’instant du doute… puis la claque magistrale assénée par cette Émilie, à la chevelure flamboyante, et son chant hurlé à la croisée de Candice de ETHS, dans ses instants les plus enragés, et du viril Nico de THE ARRS. Un contraste clair et net, donc, avec le groupe précédent et qui, tout de suite, va déchaîner des pulsions parmi la fosse. Les Montpelliérains sont parvenus à glaner toutes les attentions, et le chant empirique de la jeune femme envoûte et diffuse une énergie bienvenue. A plusieurs reprises, elle abandonne ce côté offensif pour un aspect plus mystique, de part des vocalises inattendues, mais cohésives dans leur antinomie avec les rythmiques vindicatives.
Car, pour la soutenir, les sept cordes des guitaristes, Alexandre et Mathieu, se plaisent à envoyer des riffs cycliques massifs et redoutables, dans une veine très Gojirienne (le tatouage sur le bras d’Alex ne trompe d’ailleurs pas). Maintenant habituée des planches, la formation a déjà joué avec pas mal de noms de la scène française, dans le but de promouvoir son premier disque, Syndrome. Il faut dire que le live permet aux morceaux de réellement gagner en puissance, au travers d’une double pédale tutoyant les cervicales, jetée par Hugo qui profite de son dernier concert au sein de la formation - et reçoit à l’occasion une belle acclamation du public - ainsi que la participation très groovy de Tim, dont la basse sied délicieusement les compositions musclées. Sans ne se contenter que d’un Metalcore efficace, le quintette y amène des influences plus scandinaves, lors de solos dynamiques et finement exécutés.
Sur la scène du Forum Fest, pendant quarante-cinq minutes, le groupe se montre entreprenant et se meut avec envie, affichant une communion certaine, et le plaisir d’un retour aussi chaleureux du public, clairement acquis à la cause des Montpelliérains. L’on peut néanmoins reprocher le statisme de Mathieu, que l’on aurait aimé plus vivant, et le fait - sans doute inconscient - qu’Émilie ait la main dans la poche lors d’un passage de chant lyrique. Deux détails mineurs, j’en conviens, mais qui ont de l’importance dès lors qu’un groupe s’affiche sur scène. Toutefois, les applaudissements et éructations qui fusent, et la file qui se crée devant leur stand, une fois le set terminé, confirment que GRAVITY a réalisé une excellente performance. (8/10)

Setlist GRAVITY :
- La Constante Aléatoire / UU
- Elle / Muchachas
- Espace / Gop2
- Déphasé
- Double Vélo
- Fatitude
- Evasion
- 437

Il semble que la soirée soit belle et bien partie, cette fois. Et c’est EILERA, formation franco-finlandaise, possédant déjà trois albums à son actif, qui a la lourde tâche de succéder au petit ouragan d’énergie qui a enclenché les hostilités. Retour à une heure d’un Metal plus féminin, éthéré, aux ambiances Folk justement restituées par la présence de la violoncelliste Janice Renau. Malgré un départ en demi-teinte, ou peut-être étions-nous moins réceptifs au fait de revenir à une musique moins agressive, le groupe a, petit à petit, su envoûter les spectateurs dans ses atmosphères oniriques.
Au chant, Aurélie, rayonnante et survoltée, arpente la scène dans tous les sens, sautillant et remuant en fonction des morceaux, qu’elle vit sans commune mesure. Avec plus ou moins de succès, elle tente également de faire participer le public, sur le refrain de « Fly ». Son chant Rock/Pop envolé, se modulant pareillement qu’en studio, permet de profiter de vocaux d’une grande expressivité et pureté. Ce timbre clair se veut réellement charmeur et est amplifié par le mariage des samples et cordes frottées poignantes. Parcourant sa discographie, le groupe navigue ainsi entre des compositions atmosphériques, enchanteresses, où les éléments de la nature s’invitent dans la musique, à l’instar de « Inside My Cave », toute en douceur, et des titres bien plus agités qui voient les rythmiques offrir des dynamiques efficaces (« Precious Moment »).
Car, même si Jan Sormi (basse) et Thomas Forgue (guitare) demeurent généralement introspectifs, on les sent totalement en phase capturés dans leur propre univers rêveur. Leurs jeux se combinent harmonieusement avec la cinétique du violoncelle, et créent alors des schémas enivrants de vivacité. Le fait d’avoir l’instrument à cordes frottées sur scène ajoute davantage d’éloquence qu’une simple restitution par claviers. Janice met alors en exergue la beauté des compositions ambiancées et accentue la dynamique des sections plus lourdes. Loin d’être de simples ornements, ces cordes jouent leur propre rôle dans l’évolution des morceaux.
Derrière les platines, Jérémy Zanetti ne se laisse pas réfréné par sa position statique, et montre un entrain réellement plaisant à voir. Son apport dans la musique d’EILERA est, néanmoins, quelque peu minimalisé lorsque les titres se laissent emportés par les cordes électriques. Le rappel, avec la piste « My Happyland », met toutefois en avant ses samples magistraux des remous de l’océan sur fond de chœurs solennels et percussions tragiques. Avec le soutien de beats électro, le jeune batteur Maxime Rocher accompagne ses camarades sans faille, en dépit d’un problème de clic très vite réglé. Au final, EILERA se révèle être une bonne surprise, qui sait restituer les points sensibles de ses compositions en live, pour nous emmener dans son univers Folk aérien. (8/10)

Selist EILERA :
- Keep Our Heaven
- Don’t Go Fight
- Fly
- Inside My Cave
- Celtic
- Healing Process
- Non Merci
- Fusion
- Passport Please
- Precious Moment
- My Happyland

Et enfin, à minuit passé, voilà qu’entre en scène KALISIA, pour cette première, live, de Cybion. Une heure onze minutes (onze secondes) non-stop d’un Space Opera musical. Les Français ont toujours vu les choses en grand, et ils ne dérogent, ici, pas à la règle. Mais, avant de lancer ce voyage interplanétaire, une nouvelle tombe ; surprise et déception, Brett Caldas-Lima, pour cause d’infection pulmonaire, ne pourra pas chanter et donc est assisté, voire remplacé, par les pistes vocales de l’album, diffusées en façade. À croire que la malédiction qui a pesé sur le groupe pendant une quinzaine d’années, n’est pas enclin à leur laisser un chemin sans embûches.
Les premiers samples se lancent, partagés entre les claviers de Laurent et les pistes programmées. Une voix robotique, secondée de nappes spatiales, introduit l’épopée, rejointe tour à tour par chaque instrument, qui ne cessent de monter vers leur apogée opératique tandis que l’histoire se déroule également visuellement. Effectivement, de part et d’autre de la scène, sur deux écrans sont projetées de multiples animations variées. Débutant sur la vision d’une planète, genèse de l’aventure, ce film d’accompagnement nous fait voyager au travers de paysages et scènes emblématiques recréés en 3D ou bien empruntés aux magnifiques illustrations du livret. Des séquences qui se voient entrecoupées d’animations plus abstraites, dans la veine des visualisations de certains lecteurs multimédia, se mouvant au gré de la musique. Par ailleurs, les jeux de lumières, jusque-là restés très primaires, grouillent alors de teintes et diversité. Non content d’embrigader les spectateurs plus au cœur de son projet, le groupe y a même fait incruster l’ensemble des textes de l’album. Des paroles qui apparaissent et disparaissent également selon leur propre dynamique, en étant au possible dans l’esprit de la scène, ou séquence musicale, de l’instant. L’on note, aussi, deux petites surprises : un passage animé à la manière South Park, représentant le groupe dans une situation extravagante, et Arjen Lucassen, lui-même, interprétant ses lignes de chant à près de 40 minutes. Ne permettant pas non plus de maîtriser toutes les subtilités scénaristiques de Cybion sur le bout des doigts, ces apports visuels font, tout de même, comprendre la trame principale et laissent se développer l’imaginaire du spectateur avec la correspondance sonore, dans la veine de ces grandes sagas cinématographiques diffusées avec l’orchestre jouant les thèmes en live. Un élément qui permet également d’inhiber l’écoulement du temps, puisque l’on est complètement fasciné par ce mariage d’arts et que l’heure (et quelques minutes) passe sans que l’on ne s’en rende compte.
Car, il est vrai que les membres de KALISIA ne s’épanchent pas en lancers de cheveux et sauts acrobatiques. Plutôt concentrés sur leurs partitions, ils sont bien trop occupés à réinterprété leur morceau architectural sans fausse note. Brett, qui a quand même tenté de pousser ses growls sur ses premières lignes, s’est vu contraint de se contenter de chanter les textes pour lui-même par la suite. Marchant tranquillement de long en large de la scène, il remue en rythme et dégage un plaisir communicatif. Sur la gauche, le bassiste, Thibaut, est quant à lui davantage focalisé sur l’emplacement de ses doigts sur le manche, faisant cavaler ses cordes imposantes. Certains solos grandioses ne doivent leur réussite qu’à une exécution millimétrée et c’est Bruno, à l’opposée, qui se charge de les abattre, prenant parfois quelques instants pour inviter le public à taper dans les mains, ou bien simplement brandir les poings. Moins visibles, du fait de la fumée envahissant souvent la scène, et ajoutant une dimension mystique au show, Laurent pianote avec soin sur son attirail, tandis qu’Anthony se démène comme un diable à la batterie. La seule qui a plus de libertés, c’est Elodie, intervenant pour les voix féminines en faisant, comme la plupart des chanteuses lyriques, de grands gestes des mains. Bien qu’il n’y ait pas de pause musicale, les membres profitent des seules nappes planantes ambiancées entre les quatre divisions de l’histoire pour se retirer, souffler un peu, et boire un coup.
Côté interprétation, l’ensemble est remarquable de justesse et transporte le public. Les musiciens affichent leur talent hors pair et restituent au poil les plans les plus complexes du disque. Des solos magistraux qui prennent forme devant nos yeux aux blasts tentaculaires du batteur, vraiment à saluer. Comme sur le disque, la basse est également toujours présente pour transmettre son groove imparable qui guide l’entreprise sur des plans au feeling démesuré. Quelques légers couacs ne sont pas exclus de la démonstration, comme le chant d’Elodie, plutôt juste dans l’ensemble, mais pas amplifié lors d’un passage, ou bien une guitare qui s’emballe et envoie brusquement la sauce. Des petits soucis qui n’entachent en rien le spectacle, et paraissent clairement anodins en comparaison des problèmes du Hellfest 2010. Par ailleurs, même si la façade parvient à suppléer l’essentiel en termes de vocaux masculins, avec une qualité convenable et parfois suffisante, selon les sections, le désistement de Brett vis-à-vis du chant fait réellement perdre certains passages phares en puissance, notamment le bestial "I am Keiji" à la fin du troisième arc. Quoiqu’il en soit, à l’approche du finale, tous, dans le groupe, se regardent tour à tour et l’on peut lire la joie et l’émotion dans leurs yeux qui se disent : "ça y est, enfin, on l’a fait !". C’est donc sur une conclusion épique, où les mélodies fusent dans tous les sens, que nous assistons aux derniers mots de Cybion, encore émerveillés par ce que nous venons de vivre. Émus, et les yeux brillants de gratitude, les membres remercient alors sincèrement le public d’être venu les soutenir. Et, malgré une ovation démesurée et le nom du groupe scandé, aucun retour sur scène ne se fait pour un discours de fin, mais tous viennent ensuite discuter avec les spectateurs dans la salle. (9/10)

Setlist KALISIA :
- Cybion

Partis pour une soirée dédiée uniquement à KALISIA, avec des premières parties qui n’aiguisaient que peu l’intérêt, l’on en revient avec la satisfaction d’avoir apprécié bien plus que la tête d’affiche. Hormis AKENTRA, dont le manque de professionnalisme et le peu d’affluence à cet instant, n’ont clairement pas joué en sa faveur, les groupes suivant n’ont fait qu’égayer le spectacle, pour l’apothéose finale. Un GRAVITY au show ravageur, dont l’on retient principalement l’excellente prestation de la frontwoman, précède ainsi EILERA qui, bien que plus contrasté, est parvenu à conquérir de ses atmosphères Folk envoûtantes. KALISIA termine l’évènement en beauté, avec son chef d’œuvre, Cybion, en intégralité. Un show captivant et mené presque à la perfection, que l’on aimerait voir se reproduire avec un Brett en pleine forme, et surtout bien plus souvent.


Ajouté :  Vendredi 03 Février 2012
Live Reporteur :  CyberIF.
Score :
Lien en relation:  Kalisia website
Hits: 15219
  
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