On avait laissé les suédois sur The Dead Eye il y a deux ans, et il est clair aujourd’hui que si l’œil est mort, les oreilles vont encore un prendre un coup. D’une pâle copie de SLAYER bon marché à ses débuts, THE HAUNTED a maintenant dévié sur l’avenir avec une barre flambant neuve, orienté cap sur la puissance mesurée.
Alors certes, on pourra à présent leur reprocher d’avoir trouvé une formule dont il semblent avoir du mal à se défaire, tant est qu’il le souhaitent ! Après tout des groupes comme AC/DC, AEROSMITH ou même SLAYER ne se sont que très rarement remis en cause, et je serais tenté de dire que c’est tant mieux !
Alors Versus. Pour les familiers de l’offrande de 2006, la différence, comme je viens de le préciser ne sautera pas aux yeux. Le son est toujours compact, gras, au service d’une musique qui l’est tout autant. Et pourtant plus légère qu’il n’y parait.
On commence dur avec le monstrueux « Moronic Colossus », qui prend des allures d’hymnes guerrier dès les premières secondes. Le riff est épais, la rythmique collante comme un vieux carambar, et le chant vindicatif. Une intro parfaite, qui laisse s’écouler ensuite « Pieces », assez soft, et « Little Cages », aux atours speedés et aux relents de vieille poudre à canon. La surprise, c’est « Trenches », qui arbore un joli costume Heavy-Metal de tradition. Avec en option un refrain quasi radiophonique, et pourtant, ça ne sent pas l’arnaque ! C’est mélodique certes, mais juste ce qu’il faut pour ne pas devenir vulgaire. Le faux départ de « Ceremony » enfonce le clou, et on se dit alors que le tempo sera medium ou ne sera pas. La basse ronronne, la guitare détonne, et le chant entonne son oraison. Et à l’occasion de guitares à la tierce, on s’attendrait même à entendre la douce voix de Mr Dickinson ! L’atmosphérique « Skuld » alourdit l’atmosphère, et ses deux minutes trente d’arpèges faussement doucereux brouillent les pistes, avant que le riff très King/Hanneman de « Crusher » ne nous rappelle au bon souvenir d’albums de la trempe de Made Me Do It ! Un joyeux bordel organisé qui vient semer le trouble dans une galette somme toute assez timide jusqu’alors. Back to Frisco, haine vociférée, régurgité, et solo différé, mais revival assuré. « Rivers Run », plus KILLSWITCH que Reign In Blood formate un peu le tout, histoire d’homogénéiser l’affaire. On chante plus que l’on braille, mais après tout, c’est ça un album, savoir ménager des instants de calme pour mieux faire passer la pilule Core. Cela dit, pas de quoi crier au génie, le titre s’avérant un des plus faibles du lot. Une baisse de tension dira t’on. Vite corrigée par « Iron Mask », qui allie puissance et séduction. Avec sa mélodie alambiquée et sa force de frappe à faire friser une moumoute de Darniche, ce morceau emballe, déballe comme une beauté fatale. Sitôt dit, sitôt fait, on enchaîne sans embages sur « Faultline », aussi entraînant qu’un quadrille au beau milieu du salon de l’Elysée. Une petite SLIPKNOT touch avant de revenir aux bases, que je ne nommerai pas une fois de plus (qui a dit SLAYER ? Tu sors !). On termine bref et solide avec « Imperial Death March », monument érigé à la gloire du pesant qui écrase un éléphant. Un peu moins de trois minutes d’enclume qui ferait passer le dernier FROST pour une vulgaire savonnette.
Alors, doit-on se poser des questions sur l’avenir de THE HAUNTED ? Cet album, même s’il reste dans la lignée du précédent propose tout de même deux hypothèses. Soit les suédois ont trouvé l’équilibre parfait, et nous sommes donc en présence de l’album type, à quelques variantes près, soit ils se cherchent encore, et les surprises risquent d’être soit enthousiasmantes, soit relativement décevantes.
Alors avant de tirer des conclusions trop hâtives, prenons Versus pour ce qu’il est. Encore une putain de réussite d’un groupe qui n’a décidemment pas fini de drainer des fans.