« Si je devais résumer cet album, je l’appellerais l’Album de la Mort. Clairement et simplement. Ce n’est pas à proprement parlé un concept-album. Mais bon nombre de titres traitent de la Mort ». Ces quelques mots signés Alan Averill Nemtheanga, chanteur torturé de PRIMORDIAL, trahissent l’état d’esprit du combo irlandais en 2011. Et pour cause …

Comme il aime à le décrire dans ses textes, lorsqu’il évoque les empires qui ont dominé le monde avant de sombrer dans la décadence, PRIMORDIAL connaît depuis The Gathering Wilderness (2005) le début d’une certaine renommée, une reconnaissance enfin évidente. Ce qui s’est confirmé avec To The Nameless Dead (2007). Et comme bien souvent dans ces cas là, l’envolée a bien failli s’achever par une chute vertigineuse … Enchainant les concerts, les tournées, PRIMORDIAL s’est retrouvé fragilisé. Et c’est son batteur, Simon O’Laoghaire, coupable de prestations désastreuses, qui en a fait les frais. Un temps éjecté, le compagnon de toujours a fini par être rappelé.
Car on ne brise pas PRIMORDIAL si facilement. Et la force qui unit nos cinq compères depuis trois albums maintenant vaut bien plus que ça. Derrière ces évènements imprévus, PRIMORDIAL a du apprendre à renaître. Comme pour retrouver ses marques, le quintet a réitéré sa confiance à Chris Fielding, le producteur du Foel Studio (Pays de Galles). Restait à savoir quelle serait la ligne directrice à donner à Redemption At The Puritan’s Hand. Comme le dit son leader, « nous sommes des animaux, des bêtes, et faire la paix avec cette bête pourrait prendre toute une vie. Le plus souvent, la bête n’est jamais domptée. Un loup restera toujours un loup ». En d’autres termes, l’identité de PRIMORDIAL est forte, bien trop forte pour laisser le moindre de ses membres divaguer.
Ce septième opus s’inscrit donc dans la continuité du répertoire pur et dur de PRIMORDIAL. Et si l’on note une absence totale de prise de risque (à peine entend-on une esquisse de solo sur « The Mouth Of Judas »), c’est pour retrouver avec un certain soulagement les valeurs sures d’un groupe quasi-unique en son genre. La batterie tribale de Simon O’Laoghaire, qui aurait terriblement manqué s’il n’était revenu au bercail. La basse envoutante de Pol MacAmlaigh. Les arpèges saisissantes des guitaristes Michael O’Floinn et Ciaran MacUiliam. Le charisme d’Alan Averill Nemtheanga. La durée des morceaux, savoureusement introduits par de longues minutes épiques (les sublimes premières mesures de « Lain With The Wolf »). Certes, PRIMORDIAL fait du PRIMORDIAL, mais Redemption At The Puritan’s Hand a le mérite de s’appuyer sur les bases d’un groupe qui aurait pu complètement sombrer …
Avant d’insister sur la nécessité d’écouter plusieurs fois Redemption At The Puritan’s Hand pour s’en imprégner, car il contient son lot de passages difficiles d’accès, il faut bien avouer que cette nouvelle offrande n’égale pas la beauté de ses deux prédécesseurs. Comment aurait-il pu en être autrement ? The Gathering Wilderness et To The Nameless Dead demeurent des joyaux intouchables. Pourtant on parle ici d’un bon, voire d’un très bon album. Si par instants, PRIMORDIAL renoue avec ses racines les plus agressives (« No Grave Deep Enough », « God’s Old Snake », aux limites du Black Metal), il s’inspire néanmoins de ses pièces les plus mélancoliques, les plus tragiques, les plus dramatiques (souvenez-vous, « The Coffin Ships » …). La faute à ces parties de guitares toujours empreintes de désespoir, teintées parfois de sonorités si fidèles au folklore irlandais, celles qui animent « The Mouth Of Judas » d’une flamme poignante, celles qui prolongent « Death Of The Gods » sans temps mort, celles qui donnent à « The Puritan’s Hand » cette odeur ultime de fin du monde. Celles qui font de « Bloodied Yet Unbowed » l’un des tous meilleurs titres jamais composés par PRIMORDIAL, et l’un des passages obligés des futures prestations scéniques, tout simplement.
Evidemment, PRIMORDIAL ne serait rien sans la personnalité de son leader, qui continue de souffrir sa musique et ses textes comme personne avant lui. Alan Averill Nemtheanga est décidemment un drôle de personnage, une figure culte du Pagan Metal. Les mos de la fin sont pour lui …

« C’est notre septième album. Vous savez à quoi vous attendre : la passion, l’intensité, l’engagement et un esprit sanglant. N’espérez pas une quelconque fantaisie ou la moindre évasion. Aucun remords, aucun regret. »