Avec BETTER TOMORROW, avant même d’avoir écouté l’album, nous sommes déjà d’accord sur un point : Home Is Where Your Heart Is. La maison, c’est là où ton cœur se trouve. Une réflexion simple, mais tellement pertinente. Parce que vous aurez beau donner de la tête aux quatre coins du monde, c’est à l’endroit où votre cœur aura trouvé ses aises que vous vous sentirez le mieux. Nulle sollicitation étrangère n’égalera jamais ce confort. Alors à ce petit jeu, on peut dire que les allemands se sentent comme chez eux. En tout cas, ils savent parfaitement où se situe leur cœur, sur une question qui dépasse largement l’exercice simple de l’anatomie. Fondé en 2009, ce quartet révolutionne parfaitement l’image qu’on se fait du Rock alternatif chiant et austère. Avec une pureté qu’on devine originaire de l’anonymat dans lequel ils évoluent et qui les oblige à rester aussi simples qu’humbles, Home Is Where Your Heart Is est une douce promenade en pleine nature, loin des usines ternes et des populations robotiques. Quelque chose qui subsiste encore, mais dont on a oublié l’existence et les bienfaits.

Je vous l’accorde, cet opus n’est pas très Metal. Et j’ai généralement plus d’appétit pour les riffings Grind que pour les petites balades Rock. Ce qui explique la relative aisance avec laquelle je me laisse entrainer dans ce genre d’albums, qui m’évade en fait de mon quotidien. Et il faut dire aussi que BETTER TOMORROW s’y prend comme un vieux loup de mer avec ses mélodies épurées, lancinantes et aguichantes, à l’image de ce que fait actuellement 30 SECONDS TO MARS. Et le fait qu’ils soient relativement en marge du star-système me fait prendre avec encore plus de considération ces compositions qui transpirent la sincérité. On s’identifie très vite à ce Rock moderne, qui s’énerve parfois (« Speedrace ») mais qui ne met jamais trop longtemps à retrouver sa candeur. « Tonight », en matière de Rock à minette, est la plus belle chanson que j’ai entendue depuis un certain « All I Want » de STAIND. C’est peut-être d’ailleurs la moins couillue de toutes avec « Isolation », mais avec ses violons et ses nappes électroniques discrètes, elle donne juste des frissons. BETTER TOMORROW a cette déconcertante capacité de passer du chaud au froid en un instant. « Astronauts » succède à une charmante et délicate complainte et lâche de gros riffs bruyants qu’on ne s’imaginait pas intervenir, encore moins à cet instant. Elle ouvre aussi la voie à une batterie dynamique aux patterns évidents mais qui joue trop avec le frein à main. Dommage, d’autant que Markus « The General » Jäger n’est pas aidé par la production étouffée qui, pour le coup, sert plus à Sébastian « The Face » Jäger et à son chant fluet mais chargé d’émotions. Comme beaucoup de ses copains chanteurs, le garçon est capable de montées faciles dans les aigus, de chuchotements et de plaintes habiles. La panoplie complète du tombeur de ces dames, officiant néanmoins sans exagération derrière son micro. Il est secondé parfois par des hurlements qui font tout de suite plus viril. Le grand regret de ce disque reste le manque de lisibilité des guitares, et l’absence absolue de solis. On en trouve un, sur « Shoot The Moon » et il est très bien foutu. L’occasion de penser qu’on n’aurait pas été loin de la perfection s’ils avaient eu la bonne idée de récidiver. Une absence qui ne saura cependant pas faire écho aux nombreuses présences que nous offrent BETTER TOMORROW, avec un CD très accompli.

En me baladant dans les allées de mon disquaire, Home Is Where Your Heart Is est l’exemple type d’un album que je n’achèterais pas. Artwork d’une banalité navrante, packaging tristounet coincé entre les derniers BENIGHTED et BLOODBATH autrement plus reluisants, c’est une preuve supplémentaire de mon étroitesse d’esprit. Parce qu’en ignorant dédaigneusement BETTER TOMORROW, on ignore par la même occasion un groupe qui a une fable passionnante a raconter, loin des histoires à dormir debout qui nous sont trop souvent contées.