Soucieux de conquérir à la fois le public Metal et les fans de Techno, FEAR FACTORY adopte dans les années 90 une formule pour le moins originale dans le petit monde des grosses guitares : sortir une version remixée à la sauce Techno de chaque album. Après un timide essai sous forme d'EP pour Soul Of A New Machine, c'est le génial Demanufacture qui passe à la moulinette dans son intégralité. Démarche ambitieuse, mais à vouloir combattre sur deux fronts opposés, le groupe prenait le risque de se disperser, de perdre son public en chemin et de massacrer au passage son chef-d'œuvre.
Vu l‘ampleur du défi, Rhys Fulber va cette fois appeler des renforts. Parmi ses collègues remixeurs, on pourra noter la présence de Tom Holkenborg, alias JUNKIE XL, qui se taillera plus tard une solide renommée en remixant nombre de très grands noms allant de BRITNEY SPEARS à RAMMSTEIN. Le résultat de ce travail collaboratif est fort logiquement plus varié que l‘EP Fear Is The Mindkiller : passé « Remanufacture », premier titre Electro-Indus speedé collant d’assez près au morceau original, les arrangements 100% Hip-Hop de « National Panel Beating » ne manqueront pas de désarçonner l’auditeur. Il faut vraiment attendre le refrain pour reconnaître « Body Hammer ». La surprise est de taille mais finalement assez bonne. On ne pourra pas en dire autant de « Faithless » qui commence à la façon d’un bon MASSIVE ATTACK mais se dégrade progressivement à mesure que les éléments de « Zero Signal » sont incorporés au mix. Et cela nous amène à la première grosse critique que l’on peut faire à cet album : trop contents d’avoir bien fait mumuse avec leur table de mixage, Fulber and co semblent s’être souvenus au dernier moment que dans un remix de FEAR FACTORY, il fallait en mettre un peu, du FEAR FACTORY... Du coup, on se retrouve sur certains titres avec des parties vocales collées à la truelle sur un beat qui n’a pas été créé pour les supporter. C’est particulièrement sensible sur « Remanufacture » et « Faithless » mais aussi sur « Cloning Technology ».
Et quand le matériel original est bien intégré on doit malheureusement affronter le deuxième gros défaut de ces remixes : leur longueur. Ainsi, « 21st Century Jesus » recycle avec beaucoup de grâce la mélodie de « Pisschrist », mais quand vous aurez entendu 50 fois les « sooo.... weeeee.... liiiieeee » du père Burton pendant les 7 minutes que dure ce titre, cette musique vous paraîtra nettement moins divine. Pire, vous risquez de ne plus pouvoir écouter l’original ! Un pécher d’orgueil que l’on retrouve trop souvent dans le monde des remixes. Comment peut-on croire qu’en réduisant une véritable chanson à 1 ou 2 gimmicks copiés-collés, même avec brio, on va pouvoir tenir la distance plus de 5 minutes ? Ainsi délayées, les nombreuses bonnes idées que contiennent ces remixes perdent beaucoup de leur saveur. Et le pire, c’est que les auteurs de cet album semblent au moins partiellement conscients du problème, puisqu’ils ont cru bon d’inclure en fin d’album une version raccourcie (et donc meilleure) de « Remanufacture ».