Ah, ces allemands… Ils nous surprendront toujours. Eux qui sont en permanence en avance sur tout, tant sur le plan de l’industrie pharmaceutique que du Metal, nous sortent avec WATCH ME BLEED un contrepied que même Mickaël Landreau, le roi des pénos, n’aurait pas vu venir. Pochette trois étoiles, pleine de symétrie avec un petit dessin central qui ne ferait pas pâle figure entre mes différents tatouages, le quatuor (qui est désormais un quintet) emmène visuellement l’auditeur vers des schémas catchys et mélodiques, plutôt orientés Mélo Hard Rock. Mais la réalité est un poil pubien différente. Aussi ne vous étonnez pas, avec deux chanteurs à son bord, de voir naviguer le bateau WATCH ME BLEED vers des horizons Death / Thrash modernes, avec en ligne de mire la recherche de l’équilibre idéal entre l’impact de gros riffs Death et le punch de tempos propres au Thrash.

Cette joyeuse tambouille, on la connaît déjà. Pas question d’une quelconque affiliation avec la scène américaine et ses plus beaux atouts en la matière que sont SOLSTICE, POSSESSED ou SADUS. Non, loin de là. Les allemands restent au bercail et s’identifient plus facilement avec des spécialités européennes locales. HATESPHERE, ILLDISPOSED, THE DUSKFALL, le Groove de LAMB OF GOD en plus. Voilà sous quelles lois le royaume sera dirigé. Cet album, le deuxième pour eux après Souldrinker en 2009, se présente comme un Spider-Man version Raimi. Un début chiant, une fin chiante et entre temps, une alternance de scènes d’action et de longues séquences… chiantes. Pour pousser la comparaison (osée) entre ces deux œuvres distinctes, on soulignera une production aux petits oignons et un enrobage guimauve général. Plus qu’une démonstration de technique, WATCH ME BLEED propose un album très « in your face », avec plusieurs temps forts, parmi lesquels « Here Comes The Red », « Death And Pain » ou « Kingdom » qui mettent en lumière tout le groove et le Wok ‘N Wol que les teutons distillent à l’intérieur de leurs compositions. Le travail de Steffen Theurer derrière sa batterie est chirurgical. Vitesse d’exécution mais surtout, frappes régulières sur les toms et les cymbales, il sera à l’origine de vos headbangs les plus appuyés. Le côté Thrash est discret, presque imperceptible. Quelques fulgurances dans les guitares sur « Judgement »le mettent brièvement en évidence. Pour le reste, on parle de Thrash parce que cette musique vivace et moderne se rapproche fortement d’un canon du style comme HATESPHERE. Mais l’hommage reste pudique. La facette Death, par exemple, est beaucoup plus palpable. Dans les vocaux, tout d’abord. Les cris de Chris et les growls d’Alex s’assimilent au cœur de tempos soutenus, décorés de quelques solos ciselés. Par ailleurs, l’unique guitare tenue par Markus tire bien son épingle du jeu parmi toutes ces individualités, jusqu’à atteindre un très haut niveau de technicité sur « The Sons Of Fenris ». Par contre, comme expliqué ci-dessus, certains moments de l’album sonnent vraiment creux, comme ces deux interludes à mon avis inutiles, « From Down Below » qui démarre comme une balade ou l’outro « Will You Stand With Me » qui se contente d’une narration. Avec 14 pistes pour 49 minutes, je continue de penser que ce Kingdom ne va pas vraiment à l’essentiel et surenchérit dans une mise en scène un peu hollywoodienne.

Pour autant, on ne boudera pas notre plaisir à entendre une fois encore une sortie honnête de Metal moderne. Elles s’accumulent. Celle-ci n’est pas vraiment exceptionnelle même si elle parvient tant bien que mal à faire le métier avec pas mal d’assurance et une certaine aisance. WATCH ME BLEED est certes une formation potentiellement talentueuse et riche en idées, mais on aurait certainement tout autant apprécié un peu moins de blabla et un peu plus de matière brute. L’heure n’est pas encore venue de parler de « royaume ».