Et si pour une fois, on faisait les choses différemment ? Si on décortiquait la discographie d’une formation sous un angle nouveau ? Je sais pas, par exemple, on pourrait vanter les vices et les vertus de leur dernier album en date et dans la foulée, se masturber sur une vieille démo. C’est une suggestion, ça n’engage à rien. Prenez le cas TORTURED SOUL. On s’est bien tripoté la nouille à l’écoute d’End Of Dreams non ? L’idée serait maintenant de parler un peu de cette première démo éponyme, sortie en 2007 et qui finalement, leur aura rendu de fiers services. C’est aussi un peu grâce à elle que ce groupe est désormais connu dans toute l’Alsace. Leur renommée peine encore un peu à franchir le Grand Ballon des Vosges, certes, mais ce n’est qu’une question de temps. Et de toute façon, de tels débuts aident forcément, d’une façon ou d’une autre, à comprendre ce splendide envol.

Il parait que l’occasion fait le larron. A titre personnel, l’occasion était tarifée à un misérable euro chez un célèbre disquaire strasbourgeois. Ça fait vraiment pas cher l’orgie de Death Metal ! C’est aussi une opportunité gratuite, disons les choses clairement, d’apporter un peu de cohérence dans l’analyse de cette formation. Pour avoir vu à maintes reprises TORTURED SOUL sur scène, j’ai été un peu froissé par l’aspect opaque et homogène d’End Of Dreams. Sur cette démo, je retrouve des repères qui me sont familiers. L’intensité viscérale et organique du Brutal Death purifiée par ce feeling groovy unique, matérialisé dès l’impressionnante « Quatering ». Déjà à l’époque, les Haut-rhinois avaient cette touche très personnelle dans le songwriting qui rend leurs compositions extrêmement bien écrites. L’ouverture monumentale d’« Unsane » qui monte progressivement en puissance ainsi que son déroulement apocalyptique laisse éclater un talent dans l’écriture qu’on n’avait pas forcément perçu sur « Betrayed By Liars » ou « The Killing Process », peut être par souci de brouiller les pistes. Plus classique et moins technique que leur premier EP, Tortured Soul rivalise de maitrise dans tous les domaines. J’en reste sans voix à chaque fois, mais la performance éructée de Ludo (chant) déborde de professionnalisme. Il faut également prendre en compte le fait que cette démo a été publiée en 2007, alors que cette fleur était encore à peine en train d’éclore. Beaucoup de temps s’est écoulé depuis. Ils se sont forgés une réputation scénique et leur nom est devenu un incontournable dans la région. Ce n’était pas le cas il y a cinq ans et nul doute que de pareils débuts avaient à l’époque quelque chose de tonitruant. En posant sur TORTURED SOUL un regard doté d’un tel recul, on réalise qu’ils n’ont finalement rien fait d’autre que de tenir les promesses de cette démo. Encore aujourd’hui, une sortie de ce calibre passerait pour une sortie judicieuse et efficace, et ce malgré l’hyper-prolifération de projets Brutal Death en tous genres. C’est dire si ce talent est inné. Pour un euro symbolique, je suis franchement fier que des brulots haineux et abrasifs tels que « Day Of Redemption » ou « Quatering » m’en aient mis plein les oreilles !

Ce papier qui pourrait avoir pour titre « TORTURED SOUL Prequel : les Origines » m’a donné entière satisfaction. Ça ne fait franchement pas de mal de se ressourcer un coup, quand on voit à quel point la modernité musicale est devenu partie intégrante du quotidien d’un chroniqueur. Il faut sans cesse réfléchir, pronostiquer, juger et pour être franc, Tortured Soul est une courte évasion de vingt minutes au cœur d’une journée qui ressemble diablement à celle d’hier et bizarrement à celle de demain. Et vous, combien seriez-vous prêts à débourser pour reprendre votre souffle ?