Avez-vous déjà eu l’impression de vivre un moment déjà vécu ? Ce qui est par définition absolument impossible le devient un peu moins en présence de LO!, de rugueux australiens sur le retour moins de deux ans après l’impressionnant Look And Behold. Et pour cause, Monstrorum Historia n’est ni plus ni moins que la suite logique du premier volet de leurs aventures palpitantes. Pour ceux qui ont adoré le précédent, il y aura assurément ce frisson, tellement caractéristique de leur identité, pour parcourir une échine qui ne demandait qu’à grelotter. LO! est un groupe logique, qui sait où il va et ce qu’il fait. Tout le reste n’est que littérature. Et pourtant, avec ce second album, les Australiens n’exaucent pas vraiment le vœu formulé sur la chronique de Look And Behold. Sa conclusion disait la chose suivante : « en attendant, on s’en contente en espérant secrètement qu’ils pousseront le bouchon encore plus loin au prochain coup, pour qu’on puisse avoir vraiment matière à parler de potentiel artistique ». Dix-neuf mois plus loin, avez-vous déjà eu l’impression de vivre un moment déjà vécu ?

Non, Monstrorum Historia ne va pas plus loin et c’est dommage. Oui, il reprend les bases de Look And Behold, les solidifie, les arrange, les développe mais sans jamais franchir la ligne jaune. Alors déjà, on parle de déception. Mais c’était sans compter sur les émotions, qui balaient d’un revers de main les désidératas. Il y a le LO! qu’on voulait entendre et celui qu’on entend. Indiscutablement, le second nommé a de la valeur. Et comme le premier n’a pas encore de matérialisation, on ne s’y attardera pas. Le Christopher Lee habilement dissimulé sur la pochette de l’opus illustre un peu le flou qui règne sur celui-ci. Entre « As Above » et « Bloody Vultures », ne cherchez pas l’erreur. LO! s’est assagi, a renoncé à son entreprise de destruction massive tout en consolidant cette folie rythmique qui lui a permis d’ouvrir pour THE OCEAN et CULT OF LUNA. L’accent est davantage mis sur les expérimentations Post-Metal que sur la rugosité et l’explosivité du Hardcore. Ainsi, « Ghost Promenade » régale de ses inspirations binoclardes, « Caruncula » de sa frénésie Sludge, « Fallen Leaves » de son poids écrasant. Mais le meilleur moment de Monstrorum Historia demeure au cœur de « Lichtenberg Figures », sur ce petit passage mélo-nostalgique à 2’00’’ enrichi de vocaux épurés qui interviennent après une avalanche de son lorgnant discrètement sur le Black. Le genre de truc chouinard qui n’aurait pas fait tâche sur le dernier BRING ME THE HORIZON, à l’inverse de tout le reste. Rythmiquement imprécis, techniquement réussi, le full-lenght dispose également d’une écriture solide, très aléatoire sans jamais tomber dans le n’importe quoi. On en viendrait presque à se rappeler au bon souvenir de BREACH et BURST si CONVERGE n’était pas un groupe plus « actuel ». Pour autant, inutile de préciser que ce qui fait définitivement le charme de Monstrorum Historia, c’est avant tout le charisme de ses créateurs, chacun frôlant du bout des doigts la perfection dans son propre registre. Je regrette simplement que LO! se contente toujours et encore d’une folie ô combien raisonnable quand on voit et qu’on entend de telles individualités jouer ensemble. La longue et belle conclusion « So Below » devrait être prise en exemple, car avec « Caruncula », elle est la seule à exprimer avec suffisamment de sévérité le génie artistique de ces mecs. Tout le reste est un peu téléphoné à mon goût, d’autant plus que ce style musical s’enrichit de jour en jour et que par conséquent, les idées fraiches jaillissent de toutes parts.

Pour le moment, LO! a encore le bon sens de s’appuyer sur des acquis. Avec ce deuxième album globalement convaincant mais pas non plus transcendant, le boulot est fait proprement. De toute évidence, il leur faudra montrer plus pour ne pas se faire distancer par des prétendants au trône qui ont, eux aussi, d’excellentes bases. Monstrorum Historia aurait probablement été un exploit pour n’importe quel autre groupe mais au vu et au su de leur potentiel (le mot est à nouveau lâché), pareil effort incite à l’exigence. Pour qu’enfin, LO! devienne loi.