Dangereux pour les uns, stimulant pour les autres, depuis toujours, le café n'évite pas son lot de controverses scientifiques, à l'instar de la clope ou du cholestérol. Partant du principe que tout excès est, par définition néfaste, serait-il raisonnable de tomber amoureux de KURSED et de son deuxième album, le bien-nommé Like A Coffee ? Aucun doute possible, ce trio a moins sa place en nos pages que GORGUTS ou MARDUK, et c'est peut-être l'argument qui provoquera en vous cette douce dépendance, qu'on ne désire pas vraiment en se lançant dans l'écoute de cette œuvre singulière. Après des heures et des heures passées à entendre toujours les mêmes riffs en béton, les mêmes blasts écrasants, la douceur et la quiétude de ce Rock indé alternatif teinté de Grunge imprimera sur l'auditeur lambda que vous êtes surement une marque difficilement délébile.

A moins de retenir le passage hyper nerveux en fin de "Generation", rien ne saurait être susceptible d'éveiller la curiosité des esprits les plus obtus. Qu'on parle de "Winner", de "Scarred" ou de "Recycle", rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. La forme, parlons-en. Sous couvert d'un Rock alternatif qui ne l'est plus tellement, KURSED parvient à faire de Like A Coffee un disque paisible, élastique et gominé, évoquant tantôt FOO FIGHTERS, tantôt DEVOTCHKA ("Abort Me"). L'arrivée sournoise et entêtante de "Perfect Mean" et de son harmonica est le trompe-l'œil qui conditionnera le reste de l'opus. On ne sait jamais sur quel pied danser et la vérité d'une compo n'est jamais celle de la suivante. Les quatre saisons trouvent un écho musical au gré du temps qui défile. Des températures négatives hivernales d'"Exquisite Body (Part I)", on passe à la moiteur tropicale d'"Exquisite Body (Part II)" en étant surpris par les premières gelées d'automne sur "Sens" ou le retour des hirondelles sur "Bodies". La variété des ambiances est assurément une des grandes forces de KURSED, tout comme la performance d'Hugo Herleman, chanteur, guitariste et accessoirement moteur artistique du trio. Après, ne perdons pas de vue qu'il s'agit d'un album tout à fait raisonnable sur le plan technique, pas très impressionnant physiquement et plutôt facile à vivre. Ceux qui recherchent un profil de disque plus "morcelé" et conceptuel devront aller faire leurs courses ailleurs, puisque KURSED n'a que son Rock maitrisé, un peu forain sur les bords ("Bonus Track (Not Hidden)") pour appâter le chaland. Mais ce n'est ni putassier, ni racoleur. C'est même plutôt timide et équilibré, deux adjectifs qu'on retrouve souvent dans les catalogues de ventes Nespresso...

Like A Coffee ne sera probablement pas aussi tonique et robuste qu'un petit noir bien serré, mais sa subtilité en fera d'office une œuvre remarquable. Encore s'agit-il d'ouvrir ses chakras et de se laisser bercer par la volupté de pareil Rock alternatif. Trois ans après la sortie de son deuxième opus, KURSED demeure encore un trio relativement discret dans le paysage Rock français, ce qui en fait de facto une rareté à consommer sans modération.