Je n'arrive toujours pas à digérer l'Epitome Of Torture de SODOM. Plus d'un an après sa sortie, et malgré les premiers soins pratiqués par les Vannetais de YUGAL, cet ersatz de Thrash Metal sodomite me reste en travers de la gorge. Il n'avait d'ailleurs, d'après le propre nom du groupe, rien à y faire. Ce n'était pas sa place, à l'image de son rôle dans la discographie des allemands. Et alors que la lamentation se faisait insistante, voilà que YUGAL (re)débarque, quatorze petits mois après, avec un nouvel EP succédant au prometteur Illusion Of Time de février 2012. On n'a pas eu le temps de l'assimiler que déjà, les bretons ont voulu passer la seconde, et finalement, quel meilleur remède après une rupture amoureuse difficile qu'une partie de sexe sale avec des inconnus ? Enter The Madness défoule, Enter The Madness console. Le sang appelle le sang. Désormais, YUGAL n'a plus le choix. Après deux EP aboutis, le full-length va devenir une rapide nécessité.

Car on en a connu, sur Metal-Impact, des groupes qui faisaient des promesses. Certaines tenues, d'autres pas. Mais quand on réalise un tel doublé en si peu de temps, sans forcément parler de révélation nationale, assumons d'évoquer YUGAL en des termes plus que dithyrambiques. Non seulement les vannetais ont remis le couvert mais en plus, ils ont travaillé dur pour gommer les imperfections et inégalités d'Illusion Of Time. Le Thrash Metal est toujours l'essence qui stagne dans leur réservoir (et il n'a d'ailleurs pas grand-chose à voir avec celui de SODOM), mais les quelques effluves d'Orient qui embaument leur musique sont désormais insistantes, en suspension dans l'air comme autant d'embruns qui fouettent les côtes de Vannes, de Séné et d'Arradon. Je l'ai déjà dit précédemment et je le répète : YUGAL a le mérite plus qu'immense d'être en permanence dans la suggestion de ces nuances arabisantes. YUGAL n'impose pas ce décor à ceux qui ne veulent pas en entendre parler. Ainsi, les bretons titillent l'imagination de chacun. Jusqu'où seriez vous prêts à vous ouvrir pour profiter pleinement d'Enter The Madness ? Est-ce que la force militaire de "Mindless Fool" vous suffira où est-ce qu'il vous faudra aller jusqu'à "Fearless Pride" et sa surprise acoustique finale pour vous convaincre que YUGAL est dans le vrai ? Si "Free Jail" a cependant un je-ne-sais-quoi de "Blood On Your Lips" (SODOM, encore, toujours) sur l'intro, elle ne demandera pas son reste sur le tempo, plutôt martelé, et sur les voix (et choeurs), qui jaillissent du plus profond des tripes de Guigui. Souvent, le riff s'entortille, tel un ver frappé de convulsions, et l'ambiance se dégrade subitement (comme à 2'06 sur le titre éponyme). Après tout, on est en Bretagne ! Mais qu'on se rassure, l'ambiance maussade n'est pas le monopole de cet EP, illuminé par YUGAL de sa classe précoce et de son sens du Thrash instinctif.

Tout y est meilleur que sur Illusion Of Time. L'écriture, la technique, les vocaux et surtout, la production qui, à l'image du groupe, bénéficie désormais d'un professionnalisme à toute épreuve. Fort de titres phrases comme "Free Jail" (évoquant avec discrétion "Moongate" et le SAMAEL métissé de la période Reign Of Light), YUGAL vient de réaliser successivement deux braquages à la vannetaise, appelant désormais de sa richesse et de sa petite expérience la composition d'un premier album. Pour avoir au moins fait les choses dans leur ordre logique, bravo.