MONO & THE OCEAN (de-jp) - Transcendental (2015)
Label : Pelagic Records
Sortie du Scud : 23 octobre 2015
Pays : Allemagne / Japon
Genre : Post
Type : Split EP
Playtime : 2 Titres - 24 Mins
Le Split en général, sert à deux ou trois causes. Permettre à deux groupes de faire connaître leur travail sans avoir le répertoire suffisant pour un LP, réunir deux groupes aux univers parallèles, ou servir un projet commun, dont chaque entité assure une partie. Si le premier objectif n'a jamais servi grand monde, et permet surtout au usuriers du Crust/Grind/Core de multiplier les sorties récréatives, les deux autres peuvent s'avérer passionnants, surtout si les deux raisons sont cumulées dans le même temps.
C'est le cas de cette sortie de Pelagic Records, qui unit le temps d'un LP aux allures de EP (deux morceaux, vingt quatre minutes) deux futurs partenaires de tournée, les allemands de THE OCEAN, et les japonais de MONO.
Sentant qu'en unissant leurs forces, ils pourraient donner à leur future aventure plus de poids, les deux combos, stimulés par leur label, se sont concentrés sur le même projet, Transcendental, qui s'il garde intact l'univers des deux entités, les rapproche sensiblement par les mots et la musique, une fois n'est pas coutume.
Deux morceaux donc, de plus de dix minutes chacun, avec pour le premier une citation cinématographique, et le second, une réflexion humaine sur les différentes étapes de la vie, terrestre, et métaphorique.
D'un côté, les japonais de MONO, et leur morceau, "Death In Reverse". Le principal compositeur et guitariste, Takaakira Goto le présente en ces mots :
"Le thème de la chanson est la vie, la mort, et la régénération. Même lorsque notre corps se décompose, notre âme reste la même. Notre corps sert d'engrais pour les générations à venir, lorsque nos âmes entameront leur voyage commun vers la vie éternelle"
Un concept certes familier et revisité des centaines de fois, mais admirablement mis en musique par un groupe qui n'en est pas à son coup d'essai. Après plus de quinze ans d'existence acquises à la cause Post, MONO a enfin sorti son grand oeuvre, sous la forme d'un double album conceptuel en 2015, The Last Dawn/Rays Of Darkness. Il était impensable que ce groupe aux idées si personnelles ne se soit pas encore lancé dans l'aventure, mais le résultat en valait la peine. Ils reviennent donc cette fois-ci avec un titre unique, qui se calque sur la thématique, très contemplatif, et aux multiples variations, parfois à peine perceptibles.
On pourrait d'ailleurs découper leur chanson en deux volets, puisque le silence intervient en milieu de piste, pour proposer une nouvelle dynamique à chaque partie. Si l'ensemble se veut percussif et dominé par une rythmique martiale, les intonations à cheval entre le Post Rock, le Post Hardcore et la Cold Wave soufflent le chaud et le froid. La première moitié du morceau rappelle donc des sonorités typiquement early 80's, associés à un traitement définitivement Post des années 2000, et symbolise en montée bâtie sur un crescendo la vie, puis le silence y coupe court, avant que la régénération n'intervienne sous la forme d'un piano délicat, distillant quelques accords épars. Soutenu par quelques arrangements brumeux et sobres, il incarne en quelque sorte la "désincarnation", pour nous guider dans l'au delà, avant que toutes nos âmes ne se réunissent enfin.
Le cas THE OCEAN est tout autre, même si les symboles sont plus ou moins les mêmes. Il s'inspire du film de Gaspar Noé, Enter The Void, qui dépeignait de façon hallucinogène et psychédélique le passage dans "l'entre deux mondes" d'un dealer, avec forces couleurs et stridences visuelles.
Formés eux aussi depuis plus d'une quinzaine d'années, le collectif THE OCEAN, a comme MONO cédé aux sirènes du double LP, avec Heliocentric/Anthropocentric.
Il y a deux ans, depuis le très bon et ample Pelagial, le line-up à légèrement bougé, puisque ce morceau présente une formation remaniée, avec l'arrivée de Paul Seidel à la batterie, Damian Murdoch le transfuge australien à la guitare, et la violoncelliste Dalai Theofilopoulou.
Musicalement, l'affaire est bien évidemment beaucoup plus concrète et moins extatique que celle de MONO, d'une part puisque le morceau frise le quart d'heure, mais aussi parce que son modèle (inspiré du Livre Tibétain des Morts, que Lennon citait en version Leary dans "Tomorrow Never Knows"), est beaucoup plus heurté et lysergique que le triptyque zen des japonais.
Si les errances nostalgiques et contemplatives de MONO ne sont pas votre tasse de thé, il y a fort à parier que la longue digression "The Quiet Observer", plus rythmée et abrasive vous satisfasse amplement. Egalement construite selon une longue progression logique, qui dans un premier temps résonne d'accord Post Punk et d'énergie alternative, elle se voit aussi scindée en plusieurs chapitres, lorsqu'une accalmie soudaine sur fond de violoncelle délicat intervient à mi parcours.
Puis les choses reprennent leur cours normal, avec une structure basique portée par un énorme riff ample et vibrant, sur lequel vient se greffer une rythmique cassée, qui oscille entre un tempo décalé et des percussions plus ou moins appuyées. Avec ces cordes omniprésentes, et ces arrangements qui gonflent au fur et à mesure, THE OCEAN finit sa course par un ultime break digne d'une BO, qui termine leur analyse sur une note dure appréciable.
Il est fort possible que tout ceci vous plonge dans l'ennui, ou dans une indifférence polie. MONO est en effet assez difficile d'accès pour qui affectionne le Metal puissant, et sa démarche lente et solitaire, minimaliste presque, à de quoi rebuter.
Si THE OCEAN développe des éléments plus proches de notre univers, ils n'utilisent qu'une partie des tics inhérents à l'énergie brute du Hard Rock, mais saura convaincre les plus ouverts d'entre vous, et l'ensemble des deux parties ne tombera pas dans l'oreille sourde des fans de Post Rock et de mélodies apaisées qu'on laisse respirer jusqu'à leur dernier souffle.
De plus, l'oeuvre commune se cache sous un artwork superbe signé par l'artiste allemand Florian Bertmer, ce qui fait du tout un très bel objet, assez fascinant dans la forme et le fond.
Et sachez que si l'un des deux groupes a retenu votre attention, ils ont chacun produit une bonne poignée d'albums, et rien ne vous interdit de vous y plonger, au contraire.
Mais Transcendental reste un voyage initiatique d'un intérêt absolu, un peu comme si l'essence de la vie se déroulait en scénario sous nos oreilles.
Ajouté : Jeudi 03 Mars 2016 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Mono Website Hits: 7580
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