VARIOUS ARTISTS (usa) - Blacklights - 6 Way Split LP (2015)
Label : The Ghost Is Clear Records
Sortie du Scud : 31 octobre 2015
Pays : Etats-Unis
Genre : Noise Core Sludge Post
Type : Album
Playtime : 10 Titres - 31 Mins
Dans la série "l'union fait la force", "je pense donc je suis" ou "love me please love me", parlons un peu d'un split étrange qui m'est parvenu aux oreilles aujourd'hui.
Le split, comme vous le savez, plusieurs groupes, quelques morceaux, mais au delà de trois groupes, on commence déjà à salement loucher vers la compilation.
Ca n'est pas la philosophie de Bobby Johnson des CANYONS et accessoirement tête pensante et dirigeante du label de passionné The Ghost Is Clear Records. Avec six groupes dans la poche, y compris le sien, l'homme s'est certainement dit qu'un split à six têtes était une idée originale, et il a eu raison le bougre... Après tout, on trouve bien des 7'' à trois groupes, alors pourquoi pas...
Mais l'idée est-elle viable ?
Après tout, une demi-heure pour six, c'est peu, c'est comme se partager en famille nombreuse un cupcake à la framboise et au nougat... Y'a t-il de la place pour tout le monde ?
A priori, tout le monde s'en est contenté, de gré ou de force. Alors, admettons.
La tendance est à l'élargissement, et chacun des participants à cette entreprise le sait. Alors ils ont fait ce qu'ils ont plu selon leur style, et boss ou pas boss, Bobby J n'a pas bénéficié de plus d'espace que ses petits camarades. En moyenne, deux titres par groupe, sauf dans les cas de ANODES et DUCK. LITTLE BROTHER, DUCK! qui n'ont qu'une seule piste pour s'exprimer. Il faut dire qu'ils l'ont fait exprès les vilains, puisque leur titre dépasse les cinq minutes. Bien fait.
Le but étant de faire découvrir au public de nouveaux groupes qui selon leur label méritent une couverture, jugeons le sous cet angle.
Et de ce point de vue, c'est très réussi puisque oui, nous avons envie d'en savoir plus. Mais plus à propos de qui ? Listons.
Premiers de la classe (favoritisme ?), les CANYONS nous viennent de Kansas City, où ils se sont formés en 2008. Ils ont déjà publié pas mal de trucs sur pas mal de labels, et proposent même sur leur page Facebook une vingtaine de titres à télécharger gratos, ce qui vous l'admettrez est plutôt généreux. Je n'irai pas faire de référence à leur passé, une oreille sur leur Bandcamp vous suffira, mais les deux morceaux qu'ils proposent étalent un certain savoir faire Noisy, très Noisy, à base Hardcore, et font beaucoup de bruit. C'est déstructuré, épidermique et immédiat, et ça fait penser à un genre de Post Core vraiment sale et abîmé, avec une rythmique qui usine et un chant qui lamine. Un peu HELMET vs COILGUNS vs QUALM, ça cartonne aux quatre coins du studio, et ça laisse un peu sur sa faim, puisque beaucoup trop court. Pour info, ils aiment COALESCE, BOTCH, DEFTONES et CLUTCH. Ca vous laisse de quoi vous faire une idée.
Deuxièmes sur la liste, WOUNDED KNEE, Indianapolis, Indiana. Eux aussi, des splits, des compilations, une grosse approche Punk, pour une musique aussi abrasive et chaotique que celle de CANYONS. Formé en 2013, soit il y a à peine deux ans, les américains s'en sortent plutôt bien dans leur créneau Noisycore à tendance Screamo vraiment hurlé, mais sont toutefois plus posés que leurs prédécesseurs. On peut même noter un semblant de mélodie sur "Homesick", ce qui reste appréciable. C'est parfois très lourd, souvent rentre dedans, compact mais pas évident. Le chant mixé en très très arrière-plan peut dérouter, mais ça passe sans forcer, et là aussi, on demande un album longue durée pour juger.
Le cas des SOHNS est différent, avec quelques similitudes pas forcément flagrantes. Venant de San Antonio, Texas, et menés par la voix de possédé de Alex Mendez, leur monde est assez proche d'un bordel intersidéral créant une force centrifuge à base de Hardcore violent, de Screamo mordant, et de beaucoup de dissonances qui étrillent les tympans. Pas mal de larsens, une basse qui gronde comme un ours mal léché, des morceaux qui s'ils sont rythmiquement échevelés laissent le down tempo s'exprimer, et d'ailleurs, aux antipodes l'un de l'autre. Le premier "Homonculus Of The Heart" ressemble à une version sous acide de n'importe quel exercice de style Chaotic Hardcore avec références, le second se déguise en Post Sludge pachydermique lacéré d'interventions à la guitare sanglantes. Effets sonores, voix qui invoque, batterie puissante en roue libre, et trois minutes de douleur intensive, traitement à la MELVINS/EYEHATEGOD inclus. Belle affaire, à refaire.
On change un peu d'horizon avec ANODES, puisque leur "You Make The Bed You Sleep In", qu'on pourrait traduire par l'adage "Comme on fait son lit on se mouche", et le leur, bien que moelleux d'apparence, est jonché de bris de verre et d'oreillers en barbelés. Un peu Post, un peu Screamo, on ne sait pas trop, mais pendant (presque) cinq minutes, l'accalmie est concrète, jusqu'à ce que le Post reprenne ses droits et que le fantôme de NEUROSIS ne vienne chatouiller leurs cauchemars. Saint Louis, Missouri, un Bandcamp truffé de sorties, un premier album dispo gratuit, alors allez vous faire une idée vous mêmes, mais ça m'a séduit.
On revient à des choses plus concrète avec les deux titres de AMERICAN THUNDER BAND, groupe du Missouri, Kansas City, qui a déjà auto-publié un LP en 2013, sous le titre de Neither Here Nor Thayer. Après avoir changé leur ancien patronyme de TEXAS INSTRUMENT, ils sont restés fidèles à une certaine éthique Chaotic Hardcore, avec quelques touches éparses de Post et de Screamo, et s'amusent à citer Dr.Dre, les BEACH BOYS et INNARDS comme influences. On peut penser à beaucoup de choses à leur écoute, il n'empêche que leur musique est déconstruite, à vif, mais sait ménager de petits moments calmes un peu expérimentaux. Les harmonies ne sont pas oubliées, mais un peu passées de couleur, et le tout fait preuve d'une belle énergie. La distance étant disponible sur leur Bandcamp, à vous d'en juger, mais ils ont des choses à dire.
Et comme la fin justifie le moignon, on se retrouve face au cas le plus épineux, celui des DUCK. LITTLE BROTHER, DUCK!
Quel est donc ce canard qu'ils montrent à leur petit frère ? Il se trouve certainement dans l'Oregon, à Portland, perdu quelque part entre les références à Wild Guess, Logs, Carrion Spring, Beach Party ou les Sloths, en gros, du Noisy salement expérimental et bruitiste, qui aime étirer pendant huit minutes des idées de larsen et de dissonance, noyées dans des contemplations de basse. Mais ils se foutent complètement de leur style, et d'ailleurs en mélangent des tonnes, un peu Core, un peu Post Rock déjanté, des incantations vocales presque Jazz, et des guitares qui font ce qu'elles veulent, un peu comme du MORPHINE/LIGHTNING BOLT en plein reniflement de maïs transgénique.
Split, six groupes, une demi-heure, du bruit de la fureur. A vous de savoir si tel ou tel est plus intéressant que celui là ou l'autre, mais le principal, c'est d'écouter, et de soutenir. Individuellement ou en groupe. DIY, underground, famille, allez-y mais allez-y !!!
Ajouté : Samedi 04 Juin 2016 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Hits: 5186
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