AKRAMEN (cl) - Bajo Control (2015)
Label : Auto-Production
Sortie du Scud : 5 septembre 2015
Pays : Chili
Genre : Thrash Metal
Type : Album
Playtime : 9 Titres - 43 Mins
"Et pendant ce temps là, à Santiago du Chili"...
Ca aurait pu commencer comme ça, comme dans un film au calembour exotique et décalé, et le pire, c'est que ça n'aurait pas été loin de la vérité...
Que s'est-il passé toutes ces années à Santiago pendant que d'autres vivaient leur vie d'occidentaux ? Beaucoup de choses, mais surtout celle qui nous intéresse aujourd'hui, à savoir le parcours d'un groupe dont l'agressivité n'a d'égal que la ténacité.
Coup d'oeil à la bio, et là, interrogations... Fondé en 1998, AKRAMEN à attendu cinq ans pour sortir sa première démo, Esclavos Del Nuevo Orden, un an de plus pour son premier LP, Esclavos Del Nuevo Orden aussi, et... onze ans pour sortir son second album, disponible depuis septembre en autoproduction.
Entre temps, des galères, des coups du sort, et beaucoup de volonté pour continuer une aventure qui avait pourtant si bien commencé.
AKRAMEN, c'est une valeur sure de Santiago du Chili, ville dans laquelle ils ont pas mal tourné, et où ils se sont lié d'amitié avec pas mal de monde, ceux là même qu'ils remercient de les avoir épaulés. Le 5 septembre dernier, ils ont d'ailleurs organisé une grande soirée de lancement pour fêter la sortie tant attendue de ce deuxième effort, et pour avoir visionné quelques extraits, je peux vous dire qu'ils étaient contents. Très. On le serait à moins.
Mais pour être plus précis, qui sont donc les musiciens se cachant derrière ce Thrash franc et massif qui ne fait pas de détail ? Si je me fie aux quelques bios éparses qui traînent sur le net, on retrouve dans ce quintette Fernando à la basse, Francisco à la lead, Jaime à la rythmique, Carlos au chant et la jolie Paula au kit. Une batteuse, voici un point original à souligner, d'autant plus lorsqu'on jette une oreille sur son jeu et la puissance de sa frappe. Je pense que notre chère Sibylle ne regretterait pas de la recruter au sein de WITCHES, tant son niveau est impressionnant et sa frappe précise et détonante.
En dehors de ces considérations, quelles sont les évolutions entre les deux albums du combo ? Selon le groupe, les choses n'ont pas vraiment changé entre 2004 et 2015, l'approche est toujours la même, celle d'un Thrash brutal et concis, mais toutefois, tous les musiciens étant passé dans le groupe y ont vraisemblablement laissé leur trace. Le AKRAMEN d'aujourd'hui est toujours aussi lucide et révolté contre le système, mais leur pratique s'est affinée, leur technique s'est affûtée, et c'est fin prêts qu'ils se présentent à nous avec ces neuf nouveaux morceaux. Toujours selon leurs dires, Bajo Control reflète beaucoup mieux leur attitude en live, et il est vrai que l'énergie dont il fait preuve semble faire honneur à leurs prestations incendiaires.
Neuf titres pour onze ans d'absence, pas de temps à perdre, et dès "Bajo Control", les choses sérieuses commencent.
Tempo rapide mais maîtrisé, vite remplacé par une batterie stable qui multiplie les accents à la double, riffs pointus et son légèrement diffus, chant en espagnol qui éructe sa haine, tout est là pour replacer dans le contexte d'une scène Thrash mâtinée d'un peu de Hardcore (le son de basse bien mis en avant en est caractéristique) typique de l'Amérique du Sud des années 80, évoquant autant OVERDOSE que le SEPULTURA le moins primaire.
Le quintette partage ses vues entre des morceaux longs et à ambiance et des interventions courtes et lapidaires ("Venganza", sorte de Schizophrenia de SEPULTURA en version plus Punk), et se laisse même aller à l'exercice de l'épisode épique et évolutif sur l'excellent "Creacion", dont l'intro est digne d'une BO de thriller/drame hollywoodien. Cordes, bruits d'orage, et la rythmique se met en branle, avec toujours en emphase grave cette basse qui reluit et récure les coins. Le travail de Fernando est à souligner, tant le bassiste est d'ordinaire le laissé pour compte qu'on met dans un coin pour cimenter la batterie et la guitare, sans qu'on l'entende trop.
Chez AKRAMEN, la basse est aussi importante que les autres instruments, même un peu plus puisqu'elle couvre parfois les guitares, à mon grand bonheur.
Les chiliens rééditent d'ailleurs la performance longue durée sur le final "Cara Y Sello", toujours aussi dynamique et intelligemment construit. Le décalage entre une bande son typiquement Thrash et ce chant un peu Punk/Hardcore sur les bords est d'ailleurs très intéressant, et offre des pistes novatrices. On se souvent par exemple des CRO MAGS, des CRUMBSUCKERS, et c'est comme si le quintette mixait ces influences avec leurs propres origines sud américaines. Souvent à cheval entre franchise véloce et décélérations en mid tempo, le groupe en présente même une sorte d'apogée sur l'instrumental "Akramen" qui rappelle RIGOR MORTIS pour cette fluidité diabolique, et la crème de la scène allemande du Thrash de série B, EXUMER en tête de liste.
Niveau textes, la révolte est de mise contre une société dont le seul but est de nous transformer en esclaves quotidiens, comme l'illustre très bien le morceau "Terrorismo Diarlo", un des plus convaincant du lot avec son riff circulaire et redondant qui valse dans la tête en une diatribe saccadée entêtante.
Il leur aura fallu onze ans, ils auront enduré bien des épreuves, mais ils sont toujours là aujourd'hui. AKRAMEN est un groupe de survivants, dignes représentants d'un underground sud américain qui n'en peut plus de se soulever contre les injustices.
Mais avec de tels discours, il y a de grandes chances que leur voix se fasse entendre au delà de leurs frontières, et en attendant, ils continueront de jouer à Santiago, puisque le live, c'est leur raison d'être.
Maintenant, vous savez ce qui se passe à Santiago du Chili, plus la peine de poser la question.
Ajouté : Jeudi 25 Août 2016 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Akramen Website Hits: 7114
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