CHRISTIAN DEATH (usa) - The Root of All Evilution (2015)
Label : Auto-Production
Sortie du Scud : 13 août 2015
Pays : Etats-Unis
Genre : Death Rock
Type : Album
Playtime : 10 Titres - 41 Mins
Nous touchons ici à une des plus grande légende et aventure du Gothic Rock, tel qu'il fut conçu à la fin des années 70/début des années 80...
CHRISTIAN DEATH, au delà de la musique, représente une guerre des clans. Williams vs Valor, qui des deux représente l'essence même du groupe ? Dès le départ de Rozz dans les années 80, la bataille fit rage entre les pro Williams et les pro Kand, bataille rangée et larvée, exacerbée par la lutte fratricide qui opposait les deux musiciens. Si Williams s'est toujours vu comme le véritable gardien du temple, si Valor a opté pour une direction plus volontiers Metal, les fans se sont clairement divisés en deux factions opposées, alors même que le
Christian Death Featuring Rozz Williams n'a été actif que quelques années.
Alors bien sur, le line-up d'origine, ou du moins ce qu'il en restait, s'est réuni pour fêter l'anniversaire du séminal Only Theater Of Pain, mais là encore, l'affaire fit long feu, et les démêlés juridiques ont pris le pas sur la musique...
Quoiqu'il en soit, depuis 1991 et l'adjonction au line up de Maitri, seconde épouse de Valor, CHRISTIAN DEATH, officiellement, est constitué des deux époux, qui travaillent leur musique à l'aide de collaborateurs additionnels, qui se greffent au duo, comme Nate Hassan le batteur ou Tila aux claviers, qu'on retrouvait sur le dernier album studio American Inquisition, sorti il y a presque huit ans maintenant...
Les querelles de cour d'école et de salles de concerts n'ont plus lieu d'être depuis longtemps. Souvenez vous, Rozz n'a maîtrisé qu'un seul album, le premier, et dès Catastrophe Ballet, Valor a laissé son emprunte, profonde, encore plus sur Ashes, et totalement dès The Wind Kissed Pictures. Il a assemblé plus ou moins seul le chef d'oeuvre Atrocities et ses analyses post WWII, et depuis, il n'a eu de cesse de proposer SA vision de CHRISTIAN, vision qu'il n'a partagée avec Williams qu'un très court moment. Alors arrêtons de comparer systématiquement les deux hommes, arrêtons de gloser sur les différences existant entre le DEATH de 1981 et celui des années 90, tout ça n'a aucun intérêt. Plus de trente ans après, tout ça n'a aucune pertinence, alors autant s'attacher au présent.
Je l'avoue, ma passion pour le DEATH s'est vite éteinte, même si j'admire des travaux comme Ashes Ou Atrocities. Cette passion est née et presque morte avec Only Theater of Pain, alors inutile de me poser en spécialiste du groupe, je ne le suis pas. Je suis là pour parler de ce dernier album, The Root of All Evilution, qui pose un regard forcément sombre sur l'état du monde et de la société. Sorti grâce à une campagne de financement sur Pledge Music, et donc uniquement dédié aux fans, ce nouvel album ne déroge à aucune règle, et reste fidèle à un Deathrock contemporain, directement inspiré du passé du bonhomme, qui de temps à autres se souvient de son glorieux héritage.
"The Root of all Evilution est un reflet d’où la civilisation a porté notre espèce, comment elle se situe dans les temps présents. Comme de coutume avec de nombreux albums de CHRISTIAN DEATH, les chansons touchent à une variété d’émotions : du sombre au beau, du bonheur à la folie. En Amérique, une folie furieuse, croissante, a accompagné le discours lié au "mouvement créationniste". Selon la droite chrétienne, le monde a seulement six mille ans et les premiers hommes marchaient au milieu des dinosaures, toutes ces idées aberrantes… D’un côté, nous sommes, en tant qu’espèce, propulsés à la vitesse de la lumière et dans le futur vers la compréhension du monde ou des mondes autour de nous ; et d’un autre côté, nous nous voyons jetés dans la spirale d’un WC géant dont le trou renvoie notre intelligence collective au Moyen-Âge, à un moment où la Terre était plate et où le Soleil, la Lune et les étoiles tournaient encore autour de la Terre".
C'est ce qu'a déclaré Valor à Obskure Mag, l'année dernière. Au delà de ses convictions philosophiques personnelles, ce nouvel album ne pose pas de nouvelles bases, et se contente d'écrire un nouveau chapitre de l'aventure, calmement, sans tapage.
On retrouve ces ambiances délicatement surannées, des flashbacks plus ou moins avoués, et il se dégage de l'ensemble un parfum assez désuet et amateur, qui renforce le côté humain de l'aventure. CHRISTIAN DEATH n'est plus cette grosse machine de guerre des 90's qui réunissait BAUHAUS et le LAIBACH le plus dru, ni cette ombre biscornue et effrayante qu'il projetait dans les années 80.
Il n'empêche que The Root of All Evilution est loin d'être un mauvais disque, et propose même des pistes relativement intéressantes, comme cette longue plainte pessimiste "We Have Become", qui s'étire le long d'un riff lourd et plaqué, sur lequel la voix de Valor se plaint de l'avenir de l'espère humaine.
"Illuminazi", outre son jeu de mot évident, est une plaisante ballade dans les couloirs du passé, se veut up tempo, et rappelle le early CURE, ou même des morceaux du SISTERS OF MERCY revitaminés à la sauce Rock, un peu dans l'optique des FIELDS.
La voix de Maitri est toujours aussi étrange, à mi chemin entre les interventions juvéniles et les minauderies sournoises, et si vous ne l'avez jamais appréciée, il y a peu de chances que les choses changent.
Parfois, le duo tombe dans le contemporain accessible, et s'autorise quelques exactions à la BIRTHDAY MASSACRE, en version plus malsaine, comme on le remarque sur les toiles tissées par le final "Secrets Down Below", subtil mélange de Goth Rock et de Pop sombre, porté par une sobre mélodie vénéneuse. Au bout du compte, j'ai une préférence pour les morceaux les plus décalés, comme ce polyrythmique "This Cross", chanté par Maitri d'une voix assurée soulignée par les grondements de Valor, et qui associe des cordes fantomatiques à une trame tribale, ou encore "Fema Coffins", assez spectral et brumeux, un peu Nick Cave dans l'esprit, mais symptomatique d'une adaptation des standards 80's à 2015.
La production, assez crue, est bien adaptée aux morceaux les plus aventureux, mais laisse un vide palpable sur les tentatives les plus grandiloquentes.
Quoiqu'il en soit, les fans seront sans doute ravis par ce témoignage discographique, qui intervient presque dix ans après le dernier chapitre écrit par Valor. La jeune génération peut aussi y trouver son compte, puisque le duo s'est conformé par petites touches à l'air du temps, mais c'est ce dernier qui confirmera ou non si The Root of All Evilution a la dimension d'un classique ou pas... Ce n'est pas le meilleur effort du groupe, ni le plus mauvais, juste un témoignage de l'existence d'un homme qui mène sa barque depuis si longtemps qu'il a arrêté de ramer.
Alors après, Rozz mort depuis dix sept ans maintenant... Espérons que les batailles rangées soient enterrées avec lui. Et si tout ça vous déplaît, si vous n'y retrouvez pas votre jeunesse, faites comme moi, et écoutez pour la millième fois Only Theater Of Pain... Seul le monde n'a pas changé après tout...
Ajouté : Mardi 01 Décembre 2015 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Christian Death Website Hits: 5950
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