GRAVE (se) - Out Of Respect For The Dead (2015)
Label : Century Media Records
Sortie du Scud : 16 ctobre 2015
Pays : Suède
Genre : Death Metal
Type : Album
Playtime : 9 Titres - 48 Mins
D'un côté les suiveurs, de l'autre les pionniers. Né trop tard, et vous empruntez le Right Hand Path. La bonne année vous donne le droit d'arpenter le Left Hand Path, le plus sombre des deux, mais le plus fascinant aussi. Mais outre l'année, le lieu importe aussi.
Si vous avez vu le jour de l'autre côté de l'Atlantique, vous avez sans doute intégré les rangs de DEATH, OBITUARY, AUTOPSY, les floridiens célèbres, qui ont en quelque sorte créé et popularisé le genre. Par contre, si vos yeux se sont ouverts du côté de la Scandinavie, alors vous avez sans douté poussé vos premiers cris avec NIHILIST, ENTOMBED, UNLEASHED ou... GRAVE.
Le son suédois, cette guitare si sombre et abrasive, sous accordée et distordue à l'extrême via une bonne grosse pédale Boss HM-2. Ce son a parait-il été déniché par Leffe Cuzner, de NIHILIST, mais que ce soit pour la légende ou pour la réputation, le fait en lui même n'est pas important. Pas plus important que de savoir qui le premier a éjecté la Wah Wah de son saxo pour la brancher sur une guitare.
Mais quand même... Les Sunlight Studios, Skogsberg, Left Hand Path, la froideur et la rigueur d'un Metal glacial aux accords funèbres... C'était quelque chose.
De toute cette vague, peu sont encore là pour en parler. Parmi eux, les indéfectibles, les irréductibles, les sépulcraux GRAVE, toujours menés d'une main de fer par Ola Lindgren, guitariste chanteur à la voix de baryton possédé.
GRAVE, c'est presque trente ans de carrière, et une vie entière passée à défendre la cause d'un Death barbare et primaire, aux accents frigorifiés et à la rigueur monolithique hivernale. Depuis les premières démos de 1988, peu de choses ont changé, et ce onzième longue durée ne fera pas exception à la règle. Il se place dans la directe continuité du très acclamé Endless Procession Of Souls, auquel il n'apporte que peu de digressions.
On retrouve comme d'habitude ces guitares gravissimes, ce chant qui ne l'est pas moins, et cette hybridation putride entre les accents morbides de NIHILIST, et l'ascétisme cruel d'AUTOPSY. La situation est quasiment la même depuis le séminal Into The Grave, le premier cri qui n'a jamais été détrôné dans le coeur des fans. Oublier "Hating Life" serait un crime de lèse majesté, et si depuis, GRAVE a joué la sécurité, c'est plus par dévotion que par peur du changement.
Critiquer Out Of Respect For The Dead devient dès lors une affaire presque pliée d'avance. Mais par respect pour ce groupe irremplaçable, on fait son boulot, et on écoute, en entier, plusieurs fois, presque religieusement. Et si depuis les 90's, la seconde vague de Swedish Death Metal a rendu ces agressions presque obsolètes, c'est toujours avec plaisir qu'on retombe sur une épure d'époque, qui n'a cure des modes et des compromis. Oui, Out Of Respect For The Dead est presque en tous points similaire à son aîné, qui était lui même calqué sur les efforts qui l'avaient précédé, mais ce genre de problème n'en est pas un, tant que la qualité est au rendez vous.
Et de ce côté là, GRAVE ne nous a jamais déçu. Quelques baisses de régime dans les années 2000, mais depuis, le cap a été maintenu, et le niveau a été remonté, mais après trente ans passés à jouer la même musique, il eut été impensable que le parcours soit linéaire.
Linéaire, cette musique l'est, sans conteste. On trouve toujours ce délicieux décalage entre une rythmique métronomique et ces riffs amples lâchés comme des coups de tocsin dans la nuit, ce contraste entre les morceaux les plus plombés ("Plain Pine Box", qui fait la jonction entre le ENTOMBED des 90's et le AUTOPSY de la décennie précédente) et les plus débridés ("Redeemed Through Hate", terrassant de rapidité), et ce son global gelé comme l'espoir d'un lendemain meilleur qui n'arrivera jamais. Tout respire l'air vicié de cette Suède au soleil qui pâlit de seconde en seconde, d'une solitude passée sur une colline isolée, et Ola Lindgren n'a rien perdu de son savoir faire.
Il compose toujours comme il respire, assemble les parties qu'on a certes entendu des centaines de fois, mais avec un brio inégalé, et reste campé sur ses positions.
Il est évident que si la musique est pour vous un vecteur de surprises, GRAVE ne remplira pas sa fonction première. Les bases de sa musique sont établies depuis longtemps, et il y a fort à parier qu'elles ne changeront jamais.
Mais là n'est pas le propos, et à l'instar d'un MOTÖRHEAD, d'un AC/DC, ou d'un SLAYER, chaque album du groupe est une nouvelle pierre ajoutée à la crypte de l'harmonie, bien enterrée sous une épaisse couche de terre de mort.
Pas d'évolution, mais pas de déévolution non plus, juste une fidélité sans failles à ce Death barbare et sobre, parfois poussé dans ses derniers retranchements comme lors de cet interminable final "Grotesque Glory", poussé vers la porte des dix minutes, qui se permet de survoler le genre dans une gigantesque déflagration assourdissante.
Alors, c'est ici, maintenant. Cette double crosse caisse compressée qui avance comme un bulldozer, cette guitare largement sous le zéro, ce chant d'outre tombe. C'est ainsi qu'on l'a connu il y a quelques années, et c'est ainsi que nous le redécouvrirons à chaque fois.
Une tombe ? Oui mais une tombe moite, aux murs de pierres noires suintant la mort par toutes les jointures. Une tombe, qui malgré le titre de son dernier effort, respecte la fin de l'existence en la fêtant à intervalles réguliers.
Et si GRAVE n'a aucun respect pour les morts, eux doivent sourire en écoutant de loin ces litanies en leur honneur.
Ajouté : Mardi 07 Juin 2016 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Grave Website Hits: 5076
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