DAVE MUSTAINE : Splendeur et Misère d’une Icône Thrash (2011)
Auteur : Dave Mustaine & Joe Layden
Traduction : Adrienne Bernardi
Langue : Français
Parution : février 2011
Maison d'édition Française : Camion Blanc
Nombre de pages : 435
Genre : Biographie
Dimension : 15 x 21 cm
ISBN-13 : 9782357791107
Il y a quelques années, votre serviteur découvrait les chemins obscurs du Metal lourd, par le biais d’un Fear Of The Dark ou d’un Metallica. Bon quand on y repense, et surtout quand on calcule, ça fait 20 ans et ça fout un drôle de coup de vieux. Après l’écoute en boucle de ces grands classiques du genre, j’allais très vite m’apercevoir que le Metal fourmillait de groupes différents mais toujours excellents, et bientôt ce serait au tour des DANZIG, SLAYER, ANTHRAX (avec John Bush !), CORONER, DEATH, JUDAS PRIEST, ANNIHILATOR, et autres MERCYFUL FATE.
Mais comment oublier ces premiers héros, ces personnages aux visages indélébiles, à la musique pénétrante et aux paroles incisives, qui marquent une vie à jamais et montrent même le chemin à suivre pour toutes les années à venir ? … De tous ces musiciens, chanteurs ou showmen absolument admirables, je garde une tendresse particulière pour Dave Mustaine. A l’époque, Mustaine et MEGADETH, c’était le tonitruant Rust In Peace, le Heavy Countdown To Extinction et le mélodique Youthanasia. Pourquoi Mustaine plus qu’un autre ? Parce que si James Hetfield (METALLICA), que j’adulais tout autant, représentait ce guitariste rythmique si précis avec une putain d’attitude scénique, Mustaine, lui, avait en lui ce côté revanchard de l’ange déchu qui me fascinait. Peut-être aussi parce que Mustaine appartient à la race des héros malheureux, de ceux qui sont passés à côté de quelque chose d’énorme et ont du regarder ça du coin de l’œil, en faisant semblant de ne pas voir. Peut-être enfin parce que Dave Mustaine s’est fait et construit tout seul.
Et ça, Splendeur et Misère d’une Icône Thrash se chargera bien de vous le rappeler. David Scott Mustaine ne doit rien à personne, à part peut-être à sa mère. Entre cette dernière engluée chez les témoins de Jéhovah et un père qu’il a très peu connu, on ne peut pas dire que Mustaine avait toutes les chances de son côté dès le départ. Très vite, et le bonhomme l’avoue avec une franchise déconcertante, le rouquin se met à vendre de la came pour vivre. Et il en consomme. Beaucoup. Au point d’ailleurs de devenir une encyclopédie vivante de tout ce qui existe en matières de drogues, et honnêtement la liste de toutes les substances énoncées dans ce bouquin suffirait à alimenter ma chronique … Si par instants on a l’impression de lire la biographie de Keith Richards – pour faire court : « on joue de la musique, on baise, on se défonce, on joue de la musique, on baise, etc … » – heureusement le verbe de Mustaine révèle un tas d’anecdotes croustillantes.
En vrac, citons la rencontre accidentelle avec son futur bassiste Dave Ellefson, l’embauche pour le moins surprenante de Marty Friedman (alors ex-CACOPHONY) dont le look provoque des fous rires chez le rouquin, les premiers pas de MEGADETH avec un certain Kerry King (SLAYER) à la seconde guitare, les heures passées à essayer de dénicher toutes sortes de cames pour les membres du groupe (Chris Poland, Gar Samuelson, Chuck Behler, Jeff Young, Nick Menza … tout le monde y passe), les conneries inoubliables dans les chambres d’hôtels (et notamment au Royaume-Uni, la valise d’Ellefson s’en souvient encore) et bien évidemment, les débuts du futur monstre METALLICA.
Alors à ce titre, il est grand temps de rendre à César ce qui lui appartient : sans Mustaine, point de METALLICA. Point barre. On n’insistera jamais assez, y compris dans les propres mots de Mustaine, sur l’importance de son arrivée, qui a propulsé METALLICA au rang de « groupe prometteur qui dévaste tout ». Les titres « Mechanix » (futur « The Four Horsemen »), « Jump In The Fire », « Phantom Lord » et « Metal Militia », c’est Mustaine. Rien d’autre que ces quelques pages ne saurait mieux expliquer la rancœur qu’il a pu éprouver vis-à-vis de James Hetfield et Lars Ulrich pendant des années. On cerne assez vite pourquoi cela n’aurait pas pu coller entre ces trois là : comment gérer un groupe avec trois leaders ?!! Remattez-vous un coup le DVD Some Kind Of Monster de METALLICA et vous verrez qu’entre Hetfield et Ulrich, ça n’a rien d’évident …
Aujourd’hui, même si la hache de guerre semble enterrée par Hetfield, Ulrich et Mustaine, les sentiments restent tenaces. Car le fantôme de METALLICA a souvent hanté les nuits et le quotidien du leader de MEGADETH. Alors point de tendresse avec ses ex-comparses … Lars Ulrich est décrit comme un petit con manipulateur, bouffé par l’ambition et au jeu de batterie plus qu’approximatif (mais a-t-il déjà été un grand batteur ?!!!). James Hetfield passe pour un adolescent renfermé et trouillard : il avait le charisme d’une huître sur scène (et ne jouait pas encore de guitare rythmique) ce qui obligeait Mustaine à faire le pitre pour amuser le public. Mais Dave Mustaine parle d’eux, et aussi de Cliff Burton, comme de vrais amis qui l’ont trahi et meurtri. Surtout, Splendeur et Misère d’une Icône Thrash offre au lecteur la version des faits selon Mustaine concernant son éviction. Comment rester insensible à cet horrible moment : « J’avais déjà connu plus d’un mauvais jour dans ma vie, mais celui-là est sans conteste un des pires, avec celui de la mort de mon père. A vrai dire, il m’a fait encore plus mal (…). James avait été désigné pour me conduire à la gare routière, sans doute parce que c’était celui dont j’étais le plus proche (…). Quand il m’a déposé à la gare, il avait les larmes aux yeux (…). Je n’ai pas regardé en arrière. Une fois assis dans la salle d’attente, j’ai réalisé que j’étais fauché comme les blés. J’avais devant moi un voyage en bus de quatre jours, sans nourriture, sans eau, rien. ».
Passés ces douloureux souvenirs, auxquels il faut ajouter la mort de Cliff Burton qui inspirera à Mustaine « In My Darkest Hour », les détracteurs de Dave trouveront toujours de quoi critiquer sa personnalité et ils auront raison. Dave Mustaine est une grande gueule. Dave Mustaine se la pète (« je suis le meilleur guitariste rythmique que la plupart des types qui ont joué dans le groupe »). Dave Mustaine a des idées arrêtées : pour jouer du Heavy Metal, il faut avoir les cheveux longs, porter des jeans déchirés et jouer à la vitesse de la lumière. Dave Mustaine est plein de contradictions (« la Pop et le Metal ne sont pas compatibles », OK, Dave alors pourquoi as-tu accouché de Risk en 1999 ?). Dave Mustaine est chiant avec ses histoires de rédemption aux yeux de Dieu, comme si la quarantaine et le Seigneur lui avaient subitement dicté sa bonne conduite. Dave Mustaine doit être un brin mythomane : à l’écouter, il maîtrise les arts martiaux et techniques de combat depuis 30 ans, et il les maîtrise tellement bien qu’il pourrait foutre une branlée à Chuck Norris, Jean-Claude Van Damme, Steven Seagal et Jason Statham réunis. Bref, voilà qui peut expliquer pourquoi Dave Mustaine a suscité pendant deux décennies une telle antipathie venant du public ou d’autres groupes Metal.
Mais le bougre se veut sincère. Tout ce qu’il narre, explique et raconte, il le fait avec une passion touchante et d’un ton trop familier pour être malhonnête. Il aborde des sujets difficiles, comme ses participations aux Alcooliques Anonymes, ou ses nombreux séjours en cure de désintoxication, sans honte et même avec une certaine pudeur qu’on se doit de respecter. Disons que ce gars-là en a pris plein la gueule, qu’il a bien galéré, d’où une colère et une soif de revanche sur la vie bien légitimes. Même s’il n’a pas toujours su les extérioriser comme il fallait. En fait, Dave Mustaine est juste humain, mortel et ultra-sensible. Pour ma part, je comprends mieux aujourd’hui pourquoi je n’ai jamais pu encadrer Kirk Hammett et son insupportable jeu à la wah-wah.
Ajouté : Mardi 03 Juillet 2012 Chroniqueur : NicoTheSpur Score : Lien en relation: Camion Blanc Website Hits: 68395
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