L’entité BLUT AUS NORD se définit comme étant les théoriciens d’un esthétisme aliéné. Ils exécutent une musique qu‘ils décrivent eux-mêmes comme analogue à une recherche avancée de musique occulte. A vrai dire et endiguer les controverses quant à la personnalité de cette loge ésotérique, le projet démarra en 1993 sous l’appellation VLAD dont seulement deux démos subsistèrent. En tant que pionniers du Black Metal hexagonal, BLUT AUS NORD est certainement un concept atypique, accordant à sa musique une dimension visuelle, auditive et thématique comme nul autre ne l’a d'aventure réalisé. Ayant visiblement mieux intégré que quiconque le principe de ce que devrait être la nature même du Black Metal, le groupe, à savoir Vindsval, GhOsT et W.d. Feld refuse de faire des concerts et ne diffuse à juste titre aucune photo de lui. BLUT AUS NORD étale sa propre conception du Black Metal, i.e. plus sinistre à travers une prospection continuelle de nouvelles sonorités et de manipulations mentales subliminales, un monde cauchemardesque fondé sur les disharmonies et autres dissonances, à commencer par le recours à des guitares fretless détonantes. Des complaintes sombres, mystérieuses, macabres et à la fois inscrites dans la modernité de par l’utilisation de sons électroniques et de boîtes à rythmes.
Avec ces récentes compositions malsaines et disparates, BAN pousse encore plus loin ces expérimentations et le renouvellement de son univers si abyssal et impénétrable. Chacune de leurs œuvres ayant fait leur preuves, dont par exemple l’atmosphérique et avant-gardiste The Mystical Beast of Rebellion ( 2001), ou le très cru et perturbant The Work Which Transforms God (2003), BLUT AUS NORD parvient de nouveau à engendrer un ouvrage hybride et minimaliste, clinique et surtout déshumaniser avec ce cinquième album MoRT, un titre découpée en huit plages ou chapitres d’un Post Black Metal austère, tordu et hanté. Une nouvelle approche anachorète et underground du Metal ébène, d’une étrange richesse et d’une nébulosité abjecte. Fascinant et rebutant à la fois. Une halte de plus dans le processus de création artistique tant convoité par BLUT AUS NORD. Projet ô combien désabusé, glauque, poisseux, lugubre et livide, cette succession de huit titres s’apparente telle une expérience douloureuse et éprouvante à travers ces désarticulations rythmiques et ces juxtapositions de riffs valétudinaires. Pas besoin de riffs, de blasts beats, de cris inhumains, BLUT AUS NORD est au-dessus de tout çà et en cela inqualifiable. D’une lenteur cadavérique, ces huit chapitres transportent le récepteur vers un calvaire de résonances que seules les compositeurs se peuvent de déchiffrer. Aucune piste décelable, MoRT est brouillé. BLUT AUS NORD ou l’art de l’organisation désorganisée. Vindsval, GhOsT et W.d. Feld ôtent toutes les notions préétablies du Black et de la musique extrême généraliste. Le Néant est dès lors ce qui rejaillit de l’écoute d’une telle oeuvre. BLUT AUS NORD ou le Nietzsche de la musique extrême, difficile à suivre, unique, sombre et atemporel. Un périple dans les méandres de l’affliction sonore et de la neurasthénie. MoRT ou leur ultime témoignage du Nihilisme. Un souffle de sang glacé venu du Nord…