On a tous en nous une face sombre, noire, peu attirante.
Si la plupart des êtres humains parviennent à l’enfouir au plus profond d’eux-mêmes, d’autres l’expriment avec l’art et le talent que le Metal affectionne. Tuomas Saukkonen appartient à cette catégorie de personnalités créatives mais complexes, torturées, pessimistes. Egalement membre de BEFORE THE DAWN, le Finlandais (comment aurait-il pu en être autrement ?!!) donne vie à son projet BLACK SUN AEON et le nourrit de sa noirceur quotidienne.
Le premier album de BLACK SUN AEON, Darkness Walks Beside Me, exprime des sentiments aussi forts que la colère (« A Song For My Wrath ») ou la détresse (« A Song For My Sorrow »), décrit des évènements aussi tragiques (« A Song For My Funeral ») que déprimants (« A Song For This Winter »). Saukkonen a su s’entourer de voix diverses pour concrétiser son projet, à commencer par Mikko Heikkila, compositeur-guitariste-chanteur de SINAMORE (vous ai-je déjà dit que SINAMORE est un PUTAIN de groupe ?), qui livre ici une prestation époustouflante dans un registre vocal clair et planant. Les autres voix, beaucoup « dark », sont assurées par Tomi Koivusaari (AMORPHIS), Ville Sorvalli (MOONSORROW), Mynni Luukkainen (SOTAJUMALA), et forcément Saukkonen qui en plus se charge de toutes les instrumentations.
Comment définir BLACK SUN AEON ? Death ? Doom ? Dark ? Gothique ? Est-ce vraiment important ? Saukkonen signe une œuvre quasi-autobiographique et la diversité des styles extrêmes était nécessaire pour traduire un panel d’émotions pures et à fleur de peau. Le mélange des voix y fait beaucoup, tout comme ces nombreuses ambiances à base d’arpèges et de guitares mélancoliques, ce qui devrait plonger les fans des premiers PARADISE LOST dans une profonde nostalgie (période Icon, en 1993). Sans oublier les moments plus terrifiants (« A Song For My Weakness »), rappelant à chacun que la douleur mène parfois à la violence absolue. De ce fait, « A Song For My Demise » et « A Song For My Wrath » semblent annoncer l’arrivée d’un tyran à la fureur destructrice, tandis que « A Song For My Illness » et ses percussions martelées façon GRIP Inc (sur Nemesis) n’inspirent que la démence surgissant sans prévenir.
Après tant de haine, d’angoisse, de souffrance et de folie, c’est tout naturellement que BLACK SUN AEON nous guide vers la Mort. Alors que l’introduction soignée et somptueuse de « A Song For My Funeral » laisse entrevoir cette fameuse lumière aveuglante (peut-être les seules secondes de Darkness Walks Beside Me où la lumière apparaît), Tuomas, Mikko et Mynni chantent de leurs voix distinctes « Darkness Walks Beside Me » qui résonnent comme les derniers mots d’un morceau gothique fabuleux.
Finalement, le passage vers la Mort n’était pas lumineux, comme tout le monde le prétend.
A l’image de nos pauvres existences, il n’est qu’obscurité et froideur.
Magnifique.