Dans le genre « héros teutons vieillissants cherchent seconde jeunesse », on peut difficilement faire mieux qu’ACCEPT. Cela faisait quatorze ans (oui, quatorze ans !) que nos vieux pendards, anciennes gloires du Heavy Metal à l’allemande n’avaient plus foulé le lino d’un studio pour y enregistrer un full-lenght. Et voilà que Blood Of The Nations déboule, en cette période estivale où l’heure est aux batailles d’eau et aux châteaux de sable. Sous cette chaleur caniculaire qui touche l’ensemble de l’Europe et en plein cœur des négociations sur la réforme des retraites, ACCEPT semble vouloir régler le problème seul en enfilant à nouveau sa panoplie en cuir étouffante, sujette à provoquer malaises et autres infarctus. Une adolescence de là, on s’en tirait avec un Predator tout juste décent qui marquait la fin de leur collaboration avec l’emblématique Udo, petite teigne d’un mètre de haut mais vocaliste de grand talent. Plus proche du cercueil que du berceau, c’est Mark Tornillo qui a été choisi pour s’égosiller ici.
Andy Sneap (ARCH ENEMY, EXODUS, MEGADETH…) tout juste désigné à la production, c’est un quintet revigoré qui s’enferme au Backstage Studio pour y enregistrer ce qui sera… une grosse claque ! Car ce n’est pas seulement ACCEPT qui boit là l’eau de la fontaine de jouvence, c’est le Heavy allemand tout entier. Ce long break aura vraisemblablement été bénéfique pour remettre les idées en place et peaufiner les moindres détails pour sortir un album… Rock & Roll ! Qu’on aime ou pas le Heavy, les efforts consentis ici sont tellement entraînants qu’on tape du pied inconsciemment. Wolf et Herman sont au contrôle de guitares enflammées, qui délivrent tantôt des riffs bien tranchés, martiaux comme une marche militaire, tantôt des solos endiablés qui rappellent au bon souvenir d’EDGUY ou de GRAVE DIGGER. Et quand ACCEPT décide de théâtraliser son Heavy, avec violons et compagnie (« Shades Of Death »), on sillonne le chemin emprunté par un RAGE. Ce nouveau CD fait plaisir à entendre. Simplement. Je ne dirais pas qu’il pourra vite devenir culte, où qu’on s’y référera dans le futur… mais maintenant, on connaît la matérialisation de l’expression « retour triomphant ». Avec force et fracas, Blood Of The Nations est une offrande sonnante et trébuchante. Substantielle. Mark s’en sort avec mon plus grand respect après sa prestation derrière le micro. Ce dernier évolue d’ailleurs un peu dans le même registre qu’Udo, et avec beaucoup de classe et de brio. Il est en plus, souvent soutenu par des chœurs signés Peter Baltes (basse) qui donnent encore plus de dimensions à des refrains mémorables. ACCEPT enchaîne les hits, contraste ses compositions, varie entre un « Locked And Loaded » survolté et une agréable ballade comme « Kill The Pain ». Bien qu’un peu long sur la durée, ce disque à la chance d’être hétérogène, ce qui nous évite de piquer du nez… et permet d’apprécier la superbe « Bucketful Of Hate » en guise de conclusion.
Il ne vous faudra pas beaucoup de temps pour entrer comme il se doit dans l’ambiance de ce Blood Of The Nations. C’est rare, pour ne pas dire inédit, qu’après tant d’années d’absence, un groupe effectue un retour si marqué et légitimement saluable. ACCEPT a su prendre le risque. Celui de passer pour de vieux radoteurs nostalgiques ou des has-been en mal de True Metal. Ou au contraire, de se retrouver propulsé en haut de l’affiche. Un pari audacieux et réussi. En dix fois plus gros que n’importe qui leur nom s’étalera. Et c’est tout à leur honneur.