Quatre ans après la sortie acclamée de Riot Act (soit la plus longue période d’attente entre deux albums pour les aficionados), l’éponyme Pearl Jam voit le jour, sous les applaudissements quasi unanimes de la presse et des fans. Présenté comme le successeur logique de Vs par Mike et comme un « retour aux sources de leur Hard Rock » par les critiques, il faut pourtant rétablir la vérité, et affirmer qu’il n’est ni l’un ni l’autre.
Il n’est que la continuité du travail accompli par PEARL JAM depuis ses débuts, à savoir, avancer, progresser, évoluer, tout en restant fidèle à une éthique de travail basée sur la sincérité et l’honnêteté.

Tout comme les sept albums studio le précédant, Pearl Jam contient son lot de surprises, dont certaines sont vraiment étonnantes, mais aussi un bon paquet de chansons dans la plus pure tradition du quintette.
Ce qui est certain, c’est qu’il restera comme l’album le plus direct du groupe, et, osons l’épithète, le plus « joyeux ». Ce qui, à la lecture des titres, n’est pas forcément évident.
Car entre temps, Eddie est devenu père, et comme il l’a déclaré au moment de la sortie de l’album, « J’ai commencé à voir le monde comme étant celui de ma fille, ce qui m’a encore plus mis en colère ». Alors bien sur, les textes ont suivi, comme d’habitude.
Mais musicalement, on est parfois à cent lieues du JAM que l’on a connu jusqu’à présent, et la nostalgie d’hier a fait place à des certitudes et à un regard tourné vers l’avenir avec son lot de combats présents et à venir.

Le LP commence pourtant comme beaucoup de ses aînés, avec son trio de titres rapides et très Rock, le musclé mais mélodique « Life Wasted », inspiré par l’enterrement de Johnny Ramone, le très brut « World Wide Suicide » et son son de batterie très roots, et l’exalté « Comatose », qui évolue sur un rythme quasi Punk, avec un Vedder qui crache ses bronches dans le micro.
« Severed Hand » ramène la silhouette dégingandée d’ « Animal » au premier plan, tandis que « Marker In The Sand » mélange allègrement couplets heurtés et refrain posé.

La première grosse, ou devrais je dire énorme surprise de l’album intervient au moment même où démarre l’improbable « Parachutes », plus sixties que le caleçon de Syd Barrett. Le parallèle n’est pas si innocent que ça d’ailleurs, car ce titre partage la même atmosphère enfantine acidulée que les premières compos de feu le leader du early Floyd, en moins lysergique bien sur.
Mais « Unemployable » n’est pas en reste, et n’aurait pas dépareillé sur un éventuel album des LA’S, voire même sur un LP d’inédits de SUPERGRASS.
Alors que « Big Wave » mélange les préoccupations des BEACH BOYS de 1964 avec le Pub-Rock d’un Weller, « Gone » renoue un tant soit peu avec le lyrisme qui animait certaines pistes de Ten. « Come Back » offre le visage le plus bluesy qui soit, et ne reste plus à « Inside Job », ses délicates cordes et sa tension progressive, qu’à boucler le job, et offrir une fois de plus un effort remarquable de la part d’un groupe qui atteint ses quinze ans de carrière.

Le fait d’avoir consciemment nommé ce huitième album Pearl Jam, est un aveu de la part du groupe, qui souhaite nous faire partager son état d’esprit à ce moment précis. Celui d’un groupe bien dans ses pompes, qui continue sa route quoiqu’il arrive, et qui parvient à moins se poser de questions. Qui une fois de plus arrive à nous surprendre sans nous choquer, comme si chaque tentative de sa part semblait naturelle et évidente, mais jamais incongrue ou redondante.
Un groupe qui se focalise sur sa musique, et qui ne souhaite qu’une seule chose, nous faire partager son monde, parfois terriblement sombre, parfois incroyablement coloré.
Et qui - ce qui en devient même surréaliste – ne parviendra donc jamais à sortir un mauvais disque.

Discographie Complète de PEARL JAM :
Ten (1991), Vs (1993), Vitalogy (1994), No Code (1996), Yield (1998), Live On Two Legs (1998), Binaural (2000), Riot Act (2002), Lost Dogs (2003), Live At Benaroya Hall (2004), Rearviewmirror (Greatest Hits 1991-2003) (2004), Sydney, Australia, 11-07-2006 (2006), Pearl Jam (2006), Backspacer (2009), Live On Ten Legs (2011), Lightning Bolt (2013), PEARL JAM AU PAYS DU GRUNGE (BOOK - 2011), PEARL JAM : Pulsions Vitales (BOOK - 2013)