ELUVEITIE (ch) - Helvetios (2012)
Label : Nuclear Blast Records
Sortie du Scud : 10 février 2012
Pays : Suisse
Genre : Death Metal Mélodique Celtique
Type : Démo Album
Playtime : 17 Titres - 59 Mins
Difficile, de nos jours, de parler de Metal Folk Celtique sans aborder ELUVIETIE. Même si tous les efforts du groupe n’ont pas été tous récompensés d’autant d’enthousiasme que Spirit (surtout les dernières productions), la formation suisse n’en est pas moins parvenue à se hisser comme figure emblématique de cette scène particulière. Cela grâce à un travail acharné qui voit, aujourd’hui, la sortie d’un nouveau disque presque deux ans jour pour jour après Everything Remains (As It Never Was) ; et aucun départ à constater dans le line-up qui s’annonce plutôt stable. Le petit dernier a été écrit en tant qu’album concept relatant la Guerre des Gaules, et ses conséquences, du point de vue des Helvètes, qui tend à diverger des récits généraux établis par l’Empire romain.
Cette histoire est construite grâce à l’acteur écossais Alexander Morton, déjà conteur de l’excellent Valhalla Rising, qui narre ici les évènements d’entrée de jeu (« Prologue »), et récite également les dernières phrases de l’album sur « Epilogue », piste très typée musiques de film, dont les couches de synthés et cordes frottées ne sont pas sans rappeler le travail du compositeur Zack Hemsey (« Mind Heist » et « End Of An Era » en tête). L’acteur offre un ton de sage qui rend l’histoire plus consistante et manquait à ses prédécesseurs. En parlant de récit intégré à la musique, l’emploi de la gwerz sur « Scorched Earth » s’inscrit parfaitement dans l’idée. Spécial de prime abord, ce chant masculin grave presque a capella finit par instaurer une ambiance celte sérieuse qui sied à l’album, et de laquelle plus de morceaux auraient dû tirer parti.
Effectivement, les compositions de ce nouvel opus sont agressives, et tentent de trouver une balance sur les passages celtiques. La production permet d’ailleurs de faire la part belle entre instruments modernes et traditionnels, laissant ressortir des mélodies vivantes et enjouées. Le son est naturel, plus brut qu’auparavant, tout en gardant une distinction claire des différents éléments, à l’exemple du disque de 2010. Malheureusement, les cordes électriques se font bien trop dominantes, et orienter le ratio Folk/Metal dans l’autre sens aurait été plus judicieux. Ce choix, par conséquent, contribue à rendre l’album homogène, et met en avant la redondance des structures. De plus, l’on a bien du mal à aller jusqu’au bout sans se lasser, car le problème principal de cette œuvre réside dans ses plages beaucoup trop nombreuses. Et comme elles n’ont pas des durées excessives, le groupe a alors vite fait de s’épancher en titres plus dispensables, tels que « Home » (paradoxalement la plus longue), au détriment de ceux qui auraient pu gagner en développement, comme « Hope ». Sympathique de par sa mélodie à la flûte classique, le manque d’approfondissement de cet interlude lui donne tout l’air d’une chute d’Evocation I: The Arcane Dominion. Ce qui ne peut être pire que l’inutile « Tullianum » : vingt secondes de deux pauvres accords de mandole.
En parlant de moments d’accalmie, la moitié d’album accueille « A Rose For Epona », traditionnelle ballade très Pop, dû au chant majoritaire d’Anna Murphy qui tend à rapprocher la piste des productions de groupes de Metal Gothique féminin, voire même d’artistes Pop (Rock) plus mainstream. Elle possède, néanmoins, une très jolie voix, fort appréciable dans son apport supplémentaire de mélodies vocales. Sur « Alesia », malgré son aspect, là encore, très NIGHTWISH/EVANESCENCE, l’on sent qu’elle se donne à fond, y laissant des paroles à fleur de peau. Le renfort guttural de Chrigel est généralement bienvenu dans ces conditions, offrant de nouvelles harmoniques de ces doublages qui finissent en vocaux presque scandés (« Neverland »). Toujours incisif, le frontman éructe un chant écorché, semi-hurlé sur les couplets, s’imprégnant relativement bien des mélodies, pour servir des vocaux growlés lors des refrains, qui ne sont pas sans rappeler ceux de Mikael Stanne dans le phrasé (sur « The Uprising » par exemple, ou encore le "This is the final resistance" gueulé de « Uxellodunon »). Parfois, des chœurs de tous genres viennent soutenir les propos et conférer un caractère plus épique (« Helvetios », « Santonian Shores »), quelques fois cinématiques, dans la veine d’ERA.
Si les instruments Folk ressortent convenablement, ils se montrent rarement indispensables et plus présents comme faire-valoir puisque les compositions, dans la continuité des albums précédents, semblent d’abord bâties sur des schémas Death Mélo explosifs (« Meet The Enemy »). Malgré l’emploi d’instruments atypiques peu mis en avant (un accordéon helvète, un hammered dulcimer), les passages Folk mélodiques sont souvent utilisés de la même façon, lors d’agitations rythmiques, ou sur les ponts, breaks, intros, outros, sans réellement intervenir dans les structures des pistes. Ces sections, garnies de cornemuse et flûtes et violons irlandais, parviennent généralement à dépayser et à apporter l’image celtique recherchée (« The Siege »), mais se montrent sensiblement similaires. En contrepartie, les riffs d’Ivo et Simeon sont gras, ronflants, et demeurent bien en avant pour asseoir la véhémence des pistes. Merlin se contente de frapper puissamment ses caisses toujours de la même façon. Peu de relief du côté de la batterie donc, et ses jeux se révèlent assez monotones, en dépit de quelques blasts. Basse et guitares sont sur la même longueur d’onde, hormis une légère mise en avant de Kay Brem sur « Havoc ». Le titre présente également une bonne participation de la vielle à roue, et couple joliment les sonorités celtiques aux percussions. Sûrement pas la meilleure piste du disque, « Luxtos » ne peut s’empêcher de marquer aussi les esprits puisqu’elle n’est autre qu’une reprise de la chanson traditionnelle « La Jument De Michao », tout comme celle de « Tri Martolod » sur Slania. La formation suisse est certainement la mieux placée pour prétendre à ce type de réinterprétation version Metal, et conserve une optique entraînante sur les flûtes, avec les instruments celtiques gardant la mélodie au premier plan.
De ce nouvel album d’ELUVEITIE, peu de morceaux se démarquent en bien du lot, à défaut de se faire remarquer par des caractéristiques plutôt négatives. Pourtant, le combo suisse n’a pas lésiné sur les moyens et propose assurément un de ses albums les plus complets et aboutis. Néanmoins, à trop vouloir en faire, cela a nui à la qualité globale de l’opus qui accuse de nombreuses longueurs et un emploi décevant de ses instruments Folk. L’album n’en reste pas moins agréable à l’écoute, offrant un propos musical divertissant dans sa forme, mais peu intéressant lorsque l’on creuse un tantinet, car même son concept ne réside que dans les paroles, sans réellement se ressentir en audio. Helvetios est juste un disque de plus qui fait stagner la discographie du groupe.
Ajouté : Mardi 05 Juin 2012 Chroniqueur : CyberIF. Score : Lien en relation: Eluveitie Website Hits: 8220
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