Si l’Allemagne et la Bay Area de San Francisco revendiquent à intervalles réguliers la paternité des meilleurs groupes de Thrash Metal au monde, certains invités-surprise viennent parfois geler ces relations tumultueuses et mettent tout le monde d’accord. SODOM vs. DEATH ANGEL, KREATOR vs. SADUS, DESTRUCTION vs. TESTAMENT, les combats de coqs sont tellement nombreux que chaque nouvel album pourrait suffire à faire le bonheur des bookmakers les plus véreux. Heureusement, HARM est au-dessus de tout ça. HARM joue fort. Si fort que quand nos Norvégiens chantonnent à qui veut bien les écouter leur amour démesuré pour le style, on se demande s’ils ne cachent pas un secret de famille. Oh, je ne sais pas. Des ébats confidentiels enflammés mais immoraux avec le Death Metal, voire le Brutal Death Metal, ne seraient pas vraiment surprenants, à l’écoute de ce second album aussi secret que pernicieux. Demonic Alliance. Alliance ? Dommage de se trahir dès le titre de son opus…

Et les Norvégiens poussent le bouchon vraiment très loin. La pochette de leur album, digne d’une créature de la gamme de cartes Magic l’Assemblée, ainsi que de nombreux samples pseudo-horrifiques qui feraient s’étouffer Romero dans ses poils de barbe, sont une pire parjure au Grand Thrash qu’un vulgaire baiser pour trente deniers. HARM est une félonie qui copule sans protection avec le Death Metal. Mycoses, gonorrhées ou chancre mou, ce Thrash Metal est infecté par une putain qui s’est mal nettoyée. Le résultat n’en est pas moins débordant d’amour et de sentiments. Ces messieurs jouent très vite, avec beaucoup de robustesse dans leurs compositions. Ils dynamitent totalement l’enrobage Thrash traditionnel qui recouvre cet album, ils le brutalisent à grands renforts de riffs coupants mais surtout, de patterns de batterie supersoniques, croisements difformes de Death et de Punk. Au niveau de ses influences, HARM est plutôt porté sur le Thrash européen, allemand très certainement avec du SODOM et du TANKARD dans l’air, mais également anglais avec quelques émanations de VENOM pour le côté souillé de l’affaire. On aurait pu se laisser avoir, mais la musique d’HARM est loin de souffrir de son relatif manque de popularité dans le milieu. On est même plutôt impressionné par la rigueur et l’implication que mettent les Scandinaves dans leur disque, le deuxième de leur discographie. Les guitares sont appliquées mais pas trop techniques pour éviter une accumulation d’influences. Tout le contraire de la basse qui pétarade et évoque l’utilisation explosive qu’en fait Tom « Angelripper » sur ses propres productions. Tout ça est très décontenançant pour ceux qui s’attendaient à une sortie de pur Thrash. Il leur faudra attendre les dernières minutes et « Fuck The Fame » pour s’y retrouver un peu. Le reste du temps, le trio reste bien bloqué dans son délire Brutal Thrash, dont la rigidité et la vitesse démesurée évoque quand même sacrément les VADER et autres LEGION OF THE DAMNED. A noter que cette sortie est accompagnée d’un DVD sur lequel figurent les deux versions du clip de « Demon » ainsi qu’un super making-of et plein de chouettes photos ! Il manque juste un sticker, et leurs nombreux fans peuvent mourir en paix.

Ce Demonic Alliance pâtit probablement du manque de visibilité de ses géniteurs, mais il est ce qu’il est. C’est une sortie hargneuse, réfléchie, combattive. Peut-être trop violente pour combler les amateurs de Thrash old-school, qui pourront toujours se délecter d’une relecture moderne et visionnaire de leur style de prédilection. On n’y trouvera pas de vilains défauts, pas plus que d’énormes qualités. Il se fondra désespérément dans la masse en attendant qu’HARM sorte enfin de l’anonymat. Après 15 années de carrière, ça commence à devenir urgent !