« Le Lac des gros culs de blacks qui se trémoussent devant votre queue », (en anglais : EBONYLAKE) est une formation qui attirera probablement les honnêtes gens ayant pour principales passions :
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Groupe carnavalesque issu de l’Angleterre profonde (le West-Yorkshire, un no man’s land équivalent à notre bonne vieille Creuse), ce duo anglais a pour principal fait d’arme d’en être à son deuxième album après 15 années d’existence et une pause longue de 10 ans (entre 1999, date de sortie d’On The Eve Of The Grimly Inventive et 2009). Après sa séparation puis sa reformation, la logique a naturellement poussé Ophelius et Mass à procréer un nouveau bébé, né durant l’automne 2011 sous le nom d’In Swathes Of Brooding Light. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’après avoir signé PENSEES NOCTURNES, le label des Acteurs de l’Ombre s’est spécialisé dans le Black Metal avant-gardiste.

Parce qu’ils sont comme ça, chez EBONYLAKE. Ils n’aiment pas le conformisme, et ça s’entend. « And From The Seas The Sickening Things » démarre tambour battant, sur des orchestrations incohérentes, des choeurs horrifiques, des riffs écrasants, des arrangements lugubres en cordes pincées. Il y a une dimension clairement surprenante, surnaturelle dans cette musique. Ces Anglais s’éloignent rapidement de toute forme de stabilité avec leurs structures libertines et leur appréciation très personnelle et décalée du Black Metal. D’ailleurs, de ce courant musical très réglementé, on ne reconnaît que les riffs saturés et les ambiances décadentes. Pour le reste, EBONYLAKE ne suit aucune loi et la très haute intellectualité de leur disque rendra personnel tout jugement, un peu comme le test de Rorschach. Libre à vous d’y voir un anarchisme puéril ou au contraire, une douce et géniale folie. Pour ma part, cet opus m’a mis terriblement mal à l’aise et c’est, je pense, le but recherché. La sombre poésie gothique nuancée d’un violent cynisme narrée par nos rosbifs est d’une terrible mélancolie. Mais on se prend au jeu. Comment pourrait-il en être autrement de toute façon ? EBONYLAKE est tellement loin de tout repère, tellement coupé de toute réalité… La boite à rythmes (qui joue très bien son rôle de déshumanisation musicale) est constamment tartinée d’orchestrations néo-classiques horrifiantes, entre l’approche visionnaire d’un Bernard Hermann et l’angoisse décousue d’un John Carpenter. Un romantisme bucolique très anglais envahit également certaines compositions, comme sur l’ouverture de « Within Deepest Red (The Opening Of…) » qui fait d’ailleurs partie des quatre derniers morceaux, tirés d’As Ghosts We Dance In Thrashing Seas, une démo enregistrée en 1997 par le duo mais jamais publiée. Et les voix, quelles voix ! Une farandole de timbres divers et variées. Du chuchotement sournois à la petite voix dans votre tête qui vous dit « tue-les » (Ronald-DeFeo-Junior-style), des plaintes fantomatiques féminines aux hurlements très Black Metal, de la narration sépulcrale aux murmures sorciers, on nage en plein délire. Ophelius et Mass ont clairement pété une durite, mais quel bonheur de se laisser imbiber de la tête aux pieds par un Black Metal aussi grotesque.

J’ai souvent affirmé, parfois à tort, que tel ou tel artiste méritait sa chance, parce que sa musique ne ressemble à aucune autre. Pour le coup, je peux le dire avec une certitude absolue, In Swathes Of Brooding Light est une expérience qu’on ne fait généralement qu’une seule fois dans sa vie. Et il faut la faire. Je ne me sens pas particulièrement fier d’avoir été leur marionnette pendant plus d’une heure. Mais le sensationnel que dégage un tel disque, à l’instar d’un Death – Pierce Me, a besoin de votre entière coopération pour ne pas vous vider trop vite de toute forme de lucidité mentale.