STEVEN WILSON (uk) - The Raven That Refused To Sing (And Other Stories) (2013)
Label : Kscope Music
Sortie du Scud : 25 février 2013
Pays : Angleterre
Genre : Rock progressif expérimental
Type : Album
Playtime : 6 Titres - 54 Mins
Je ne souhaitais pas évoquer ce disque si peu de temps après sa sortie. Mais Steven Wilson est cette lame dangereuse qui menace constamment la carotide. Il m’aura fallu une année complète pour digérer Drowning For Grace et seulement une semaine pour savoir quoi dire de ce nouvel effort, poétiquement intitulé The Raven That Refused To Sing (And Other Stories). A croire que l’Anglais a perdu toute crédibilité. Lui, généralement si talentueux et mystérieux quand il s’agit de rendre sa musique plus illisible qu’un speck-film un premier samedi du mois pour un non-abonné à Canal, s’est fait débusquer en une poignée de levers de soleil. Et pour cause, ce troisième effort est de loin le plus surprenant d’un point de vue musical. Imprévisible car… prévisible. C’est une donnée nouvelle dans l’univers de ce robot multitâches, programmé pour créer et défaire. Il va sans dire que le choc est rude. Peut-être que pour la première fois, Steven Wilson s’est dévoilé en tant qu’humain, laissant le divin prendre un repos mérité dans le placard d’un grenier poussiéreux. Cet humain là n’en demeure pas moins poète et raffiné, une caractéristique tatouée sur son front depuis son éclosion au sein d’un certain PORCUPINE TREE, dont on attend toujours la fin du hiatus.
The Raven That Refused To Sing (And Other Stories) entame sa progression dans des nuances bleutées, celles d’un « Luminol » fluo-flashy. On ne le sait pas encore, mais cette longue ouverture de douze minutes représente déjà le point d’orgue de cet album, à l’instar des précédents « Postcard » et « Harmony Korine », cette dernière n’ayant pas encore été égalée en termes d’intensité et de noirceur. Relativement jazzy et nerveux, ce premier titre est d’une explosivité remarquable avant de s’orienter vers des contrées plus spacieuses, plus atmosphériques où les pianos brumeux d’Adam Holzman (qui a collaboré notamment avec Miles Davis ou le Français Michel Petrucciani) remplacent les vents hystériques de Theo Travis, descendant direct du joueur de flûte de Hamelin. « Drive Home » est d’un calibre nettement plus pacificateur, plus éthéré. Ce morceau a la faiblesse de sa qualité principale : un final somptueux agrémenté d’un solo de guitare un brin nostalgique mais le tout est définitivement téléphoné et attendu. Un peu à l’image des neuf premières minutes de « The Holy Driver » qui tournent en rond avant de laisser place à une conclusion très métallique, considérablement gainée et plutôt judicieuse au moment où le disque semblait s’enfoncer dans son propre ventre mou. Il fallait bien l’intervention musclée d’Alan Parsons (le même qui s’est occupé en 1973 du Dark Side Of The Moon) pour réveiller tout ça. C’est d’ailleurs lui qui est en charge de l’enregistrement de cet opus et je crois que Steven Wilson peut lui en témoigner une grande gratitude, tant The Raven That Refused To Sing (And Other Stories) sonne comme quelque chose d’intimiste et de personnel. Hélas, ces qualificatifs n’en font pas une œuvre majeure. Je suis même plutôt déçu par ce troisième bébé, de loin le moins excentrique. Les placements vocaux de Steven sont très aléatoires, parfois bâclés, à l’image des « toudoudou tadada » de « The Watchmaker ». Ben Folds est coutumier du fait, mais pas toi Steven. Et que dire de cette conclusion éponyme, vaporeuse, nébuleuse, mais tellement accessible qu’on pourrait l’imaginer en tant qu’illustration musicale d’une comédie sentimentale un peu fleur-bleue ? C’est certes le deuxième grand moment de cet album de par sa beauté et sa pureté, mais c’est aussi extrêmement frustrant car d’une simplicité inhabituelle, en témoigne cette reprise guimauve à 5’00.
Cet homme est donc faillible et aujourd’hui, il a failli. Pas à sa réputation, pas à son talent qui reste immense et inégalé, mais à son devoir d’illusionniste. The Raven That Refused To Sing (And Other Stories) est un troisième volet épuré, débarrassé d’un jusqu’au-boutisme qui devenait peut-être trop lourd à assumer sur le long terme. Sa durée est également significative. 54 minutes contre 83 pour Drowning For Grace. Et l’absence d’une composition suprême, aux qualités incontestables, à la perfection assumée, est l’aveu même de ce qui ressemble fort à une panne technique. Une simple carte postale aurait déjà été une délivrance.
Ajouté : Mercredi 06 Mars 2013 Chroniqueur : Stef. Score : Lien en relation: Steven Wilson Website Hits: 9312
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