HOLY MOSES (de) - Redefined Mayhem (2014)
Label : Steamhammer / SPV
Sortie du Scud : 28 avril 2014
Pays : Allemagne
Genre : Thrash Metal
Type : Album
Playtime : 13 Titres - 46 Mins
Si aujourd'hui les femmes ont réussi à se faire une bonne place dans le landerneau du Metal extrême, c'est certainement grâce à leurs aînées, qui, à une époque ou la parité homme/femme était le cadet des soucis des musiciens, n'ont pas lâché le bout de gras et ont occupé le devant de la scène avec aplomb. Ainsi, Angela, Candace, Tairrie, Maria, vous pouvez certainement remercier chaudement celles qui dans les années 80 ont pris tous les risques pour vous permettre de vous exprimer aujourd'hui, et d'être acceptées telles que vous êtes, avec tout votre talent, et non plus sur seule validation de votre apparence physique.
Et si l'une d'entre elles mérite plus particulièrement votre gratitude mesdames, c'est bien Sabina Classen. Depuis l980, elle agite de ses soubresauts vocaux frénétiques la scène Thrash allemande. Elle a certes posé le genou à terre durant un court instant, mais elle est toujours là, en 2014, le gosier plus abrasif que jamais. Plus de trente ans de carrière, toujours la foi, l'énergie, et l'amour du Thrash en guise d'étendard perpétuel, ça se souligne, et suscite l'admiration. Evoluer dans un milieu si viril, en se faisant respecter en tant qu'interprète, ça force l'admiration.
Mais qu'en est il de son bébé ? Celui qu'elle a élevé avec toute sa force il y a plusieurs décennies, et qui aujourd'hui, continue de rugir et de croquer la mélodie et la vitesse à pleines dents ? HOLY MOSES, vous connaissez, c'est un fait. Vous aussi avez en quelque sorte hébergé l'hybride sur vos platines, vous avez eu vous aussi droit à ce baby-sitting de l'extrême à plusieurs reprises, sinon, vous ne seriez pas là à me lire. Oui, moi aussi je l'ai écouté, surveillé, accompagné dans ses jeux brutaux et vindicatifs. Je l'ai vu grandir, et je l'ai particulièrement couvé lors de sa transition entre l'enfance et l'âge adulte. Durant cette période charnière, il a poussé des hurlements, s'est calmé, a évolué, et en guise de témoignage de cette époque, à laissé traîner derrière lui ses jouets, des vinyles tels que Finished With The Dogs, et surtout, The New Machine Of Lichtenstein.
Il est grand aujourd'hui. Mais il est toujours en colère. Car il se souvient de cette époque lui aussi, et elle semble lui manquer. Et comme le précise Sabina elle même, Redefined Mayhem aurait pu être une de ses dérives comportementales à la suite de celles précitées. Et elle a bougrement raison!
Redefined Mayhem, c'est en quelque sorte une digression de plus sur le thème si cher à Sabina, à savoir ce mélange unique de sauvagerie débridée et de technique subtile. L'école Allemande admettant les influences d'outre Atlantique, sans pour autant renier ses origines. Et par extension, l'amalgame enfin réussi de ces deux albums majeurs de la discographie de Madame Classen. Si l'un semblait encore trop emprunt de la naïveté d'un jeune groupe qui se cherchait, tandis que le second tombait dans le piège de la sophistication à outrance, Mayhem parvient enfin à trouver l'équilibre d'une musique aussi agressive que réfléchie. On se posait la question de savoir ce que HOLY MOSES était devenu depuis Agony of Death en 2008, la réponse est là, sous nos oreilles. Et elle est convaincante et rassurante. MOSES va bien, très bien même. Son état de santé est aussi impressionnant que le son que cet album dégage.
Sabina et les siens n'ont pas renoncé à la recette qui fait leur charme depuis si longtemps. Des morceaux concis, courts, percutants, qui sont tous autant d'hymnes au Heavy pesant et au Thrash virulent. Et si "Hellhound" le morceau d'ouverture fait penser à une version modernisée de "Near Dark" qu'on trouvait en amorce de Lichtenstein, l'allusion n'est pas anodine.
Sabina a en effet recherché dans son illustre passé de quoi aller de l'avant. Elle le déclare d'ailleurs sans complexe, et comment pourrait on lui en vouloir ? Elle qui est à l'origine de bon nombre d'hymnes, pourquoi devrait elle les renier ?
Et les hymnes justement, ne font pas défaut sur ce nouvel effort. Les arrangements sont luxuriants, la rythmique volubile, les guitares incisives, et la voix de Sabina plus rauque et écorchée que jamais. Deux morceaux seulement passent la barre des quatre minutes, et ça n'est pas un hasard si ce sont tous les deux des mid tempo mordants aux atmosphères complexes.
Le reste ? Un savant patchwork de tempi extrêmement variables ("Sacred Sorrows", "Fading Realities"), de fonderies Heavy en fusion ("DELusion"), de trompent l'oeil en forme d'attrape nigaud ("Liars"), mais surtout de fronderies sans limites aucune, durant lesquelles le rythme s'affole et les guitares décollent ("Triggered", "Whet The Knife" et surtout le final suintant le speedcore "This Dirt" qui explose tous les compteurs).
Si l'on parle encore de HOLY MOSES en 2014, ça ne doit pas seulement être à cause de Sabina, leader décomplexée qui n'a plus rien à prouver. Réduire ce groupe à sa front woman serait bien sur justice, puisqu'elle est seule maîtresse à bord depuis longtemps, mais c'est surtout la qualité de sa musique qui rend son actualité si pertinente. Elle n'a rien à envier aux formations modernes, et elle réussit à rester sur le devant de la scène sans rien renier de son passé, mais sans non plus capitaliser dessus en refusant d'évoluer.
Redefined Mayhem s'adresse de fait autant aux fans du groupe qu'à ceux qui cherchent des variations intéressantes sur un Thrash de tradition, solidement ancré dans le passé, mais les yeux tournés vers l'avenir.
Et avouons le. Tourner notre regard vers Sabina, et par extension nos oreilles vers sa musique, est une option plutôt agréable.
Ajouté : Vendredi 09 Mai 2014 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Holy Moses Website Hits: 10668
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