GORDON'S TSUNAMI WEEK (de) - The Farewell Paradox (2015)
Label : Through Love Records
Sortie du Scud : 1er mai 2015
Pays : Allemagne
Genre : Post Metal Atmosphérique
Type : Album
Playtime : 5 Titres - 33 Mins
Laissez moi deviner... Ce temps gris, cette pluie, ça vous mine non ? Vous ne voyez aucune raison d'être heureux, perdu sous ce ciel chargé qui laisse tomber les gouttes comme les heures d'ennui ?
Je vous comprends, j'éprouve un peu la même chose. Que faire dans ce cas précis ? Faire semblant et sourire en regardant par la fenêtre, espérant une accalmie, un rayon de soleil, une possibilité d'évasion ? Ou bien se replier sur soi même et maugréer sur un peu tout ce qui vous entoure ?
Si cette dernière option vous semble la bonne, bravo, vous avez le même instinct que moi. Lundi matin, fatigue, nuages sombres, autant pousser la tristesse à son paroxysme, et se laisser aller à écouter quelques pistes aussi peu enclines au positivisme que la nature environnante.
Et pour ce faire, direction l'Allemagne. Autant éviter le sud, nous risquerions une déconvenue joyeuse à base de politesse et d'hospitalité déplacées.
De Munich nous viennent les GORDON'S TSUNAMI WEEK, quintette formé en 2001. A leur actif, deux EP's et un longue durée au titre énigmatique, We See The Reflection Of Ourselves In The Frames We Look At. En mai de cette année, leurs vues sur la musique instrumentale Post Rock s'est vu enrichie d'un nouveau LP, The Farewell Paradox, qui continue d'explorer les voies absconses de l'émotion musicale à fleur de peau. Leur but avoué ? Prendre une émotion, quelle qu'elle soit, et expérimenter sur les divers degrés de concrétisation sonore qu'elle offre. Une démarche somme toute assez classique, qui donne un résultat hautement hermétique et progressif, sans toutefois se vouloir trop complexe.
Concrètement, le traitement musical offert par GORDON'S TSUNAMI WEEK est effectivement en phase avec leur credo. La plupart des pistes proposent un thème générique, qui est ensuite longuement développé, avec un minimum de variations et digressions, à la manière d'un NEUROSIS option TRIBES OF NEUROT, en version toutefois clairement moins abrasive et chaotique.
Grosses guitares qui plaquent des riffs compacts et volumineux, rythmique lancinante et régulière, basse qui s'accorde du mariage entre les deux, le tout souvent nappé d'arpèges jaunis qui donnent à l'ensemble une jolie couleur passée. Le groupe se revendique d'influences allant de EXPLOSIONS IN THE SKY aux DEFTONES en passant par SIGUR ROS, et cet éventail est en effet assez représentatif de leur démarche. En certaines occasion, comme sur "No", on s'attend presque à entendre surgir des tréfonds d'une forêt la voix de Chino Moreno, tant la tonalité globale évoque à merveille les instants les plus lourds et oniriques de son groupe. Onirique ? Le terme n'est pas choisi au hasard, tant The Farewell Paradox peut passer pour un songe étrange, comme a demi éveillé dans une nuit fantasmée qui pourrait ne pas vraiment exister. Après tout, le sommeil n'est il pas un paradoxe en lui même, incarnant une sorte d'existence éteinte d'où surgissent pourtant des images que la réalité n'est pas en mesure d'offrir ?
Et loin de se contenter de laisser traîner le désespoir le long du chemin d'une journée maussade, GORDON'S TSUNAMI WEEK sait aussi se montrer sous un jour délicieusement harmonique et doux, lors d'un intermède qu'on se plaît à imaginer apaisé et volontairement caressant, "Particular". Quelques notes éparses et veloutées, écho sobre mais profond, batterie qui sait provoquer le silence pour mieux mettre en relief la mélodie... C'est touchant, délicat, fragile, comme une perle de rosée sur les paupières un matin d'hiver.
"Reason" tisse la trame de fin en une ultime progression envoûtante, à la puissance assumée dont le discours sous jacent laisse transparaître une ambiguïté harmonique amère, et qui reprend d'une certaine manière les directions précédentes, tout en leur offrant un virage inattendu, que l'on peut emprunter ou non.
The Farewell Paradox, en fin de compte, pourrait symboliser un esprit qui se laisse vagabonder dans les méandres musicaux de son intimité, sans chercher à se raccrocher à une quelconque rationalité, et acceptant la dérive comme seule alternative à une réalité trop concrète.
Trivialement, et puisqu'il faut bien raccrocher malheureusement les wagons à une locomotive précise, il n'est pas déplacé d'affirmer que ce nouvel album se fait joie d'un Post Rock alternant les bourrasques persistantes basées sur des guitares lourdes aux accords répétés à l'envi, collées sur une rythmique appuyée et lente, et les envolées plus lyriques et légères, sculptant des harmonies splendides qui tranchent avec la noirceur résignée des premières pistes.
Mais pourquoi chercher à tout prix une explication, lorsque la musique se suffit à elle même ? Le groupe en donne une réponse partielle, en forme de rébus que les titres des morceaux forment une fois assemblés.
"There", "Is", "No", "Particular", "Reason".
Vous voyez, il n'y a pas de raison particulière à un état d'esprit. Juste une inflexion. Une stimulation. Un hasard presque.
Ajouté : Jeudi 24 Septembre 2015 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Gordon's Tsunami Week Website Hits: 5814
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