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FUCK THE FACTS (ca) - Desire Will Rot (2015)






Label : Noise Salvation
Sortie du Scud : 25 août 2015
Pays : Canada
Genre : Grind Mathcore
Type : Album
Playtime : 11 Titres - 47 Mins





Encore une fois, la discographie de cette assemblée d'iconoclastes à des allures de listes de commissions à faire au supermarché du coin... Les Canadiens de FUCK THE FACTS sont prolifiques, pour le moins, comme toute formation Grind de ce nom. Jugez du peu, depuis 1999, pas moins de neuf albums, un nombre incalculable de splits avec FEEBLE MINDED, IRON BITCHFACE, P.O.T., SYLVESTER STALINE, des EP's à ne plus savoir qu'en faire... Il est vrai que le style est propice à la propagation bruitiste, mais là quand même... Mais comme si ça ne suffisait pas, le quintette revient en août 2015, sur leur propre label Noise Salvation, au nom bien choisi, avec leur dernier effort longue durée, histoire de compléter un puzzle déjà bien chargé en pièces...
Mais comme dirait ma tante Yvette, "Quand on aime, on ne compte pas"... Et ça vaut mieux.
Mais dans leur cas, les sorties multiples ne sont pas sans pertinence. Connaissant le sens de l'expérimentation de ces hurluberlus, j'attendais de pied ferme ce nouveau travail en studio, et une fois de plus, je n'ai pas été déçu...

FUCK THE FACTS, en plus d'emmerder les statistiques, se permet des libertés incroyables avec leur style de prédilection. Ils font partie de cette génération bruitiste qui vénère le chaos et l'extrême, mais qui les accommodent à leur sauce. Ne comptez pas sur eux pour aborder le Grind à l'ancienne, ils ont leur propre approche, et ne se sentent pas légataire d'une tradition inamovible.
Certes, leur musique est emprunte des bourrasques découlant du Grind boom anglais des années 80, mais leur attitude est fondamentalement US, et l'ouverture est leur credo. Ils pourraient se contenter d'accumuler les calottes ultra soniques, mais leur nature est différente, et un simple coup d'oeil aux morceaux de ce nouveau disque suffira à vous en convaincre.
Desire Will Rot est surprenant, ce qui est une constante. Le seul élément de base fiable et constant, reste la créativité dans la sauvagerie, et ça n'est pas un hasard si le groupe accumule les interventions brèves sur la première partie de ce LP, avant de laisser se développer des ambiances plus travaillées sur sa fin. Sans bien sur, nous laisser sur notre faim...

Sous sa pochette superbe et macabrement naïve, Desire Will Rot est un album intelligent, qui expérimente, tente des choses inhabituelles, tout en gardant une puissance d'impact optimale. Tout est en place, et bouffe un peu à tous les râteliers, mais chacun des musiciens sait ce qu'il a à faire. La voix de Topon est toujours aussi hystérique, et les cris gutturaux de Mel arrivent parfaitement à tenir le contrepoint. ce qui est sidérant, c'est que le quintette parvient toujours à surprendre malgré plus de quinze ans de carrière. Certes, les corrosions Grind sont toujours omniprésentes, tout comme les passages rouleau compresseur à la double grosse caisse, mais il serait inconscient de négliger toutes ces sonorités hors contexte, qui rapproche parfois le groupe du Mathcore, du Heavy classique, de l'Expérimental, de l'Indus, en gros... d'eux mêmes.
Car soyez en conscient, FUCK THE FACTS est radical, mais unique. Les cinq musiciens pourraient tout aussi bien jouer dans un combo Heavy classique, ou dans une assemblée Mathcore expérimentale, car ils en ont largement le niveau. Leur créativité est telle - et soutenue justement par ce bagage technique - qu'ils parviennent à créer une osmose entre plusieurs courants asymétriques.
Ecoutez par exemple les deux volets du diptyque "La Mort", avec ses percussions tribales en intro, avant que le riff central ne nous entraîne dans une sorte de Heavy Core. Climat délétère, interventions mélodiques, avant que la machine ne s'emballe dans sa seconde partie, et vogue au gré d'harmonies typiquement Heavy Metal, déconstruite par une volonté Grind/Indus symptomatique de BRUTAL TRUTH et autre FULL OF HELL.

Si les deux premiers tiers du disque se concentrent sur des formats courts, les quatre dernières pièces laissent volontairement traîner les débats, et s'étendent parfois sur des durées étonnantes.
Le final, composé de "Circle" et "Nothing Changes" change complètement la tonalité générale de l'album, et le placent sous des auspices sombres, oppressants, et à la limite du Doom Indus le plus poisseux. "Circle" reste dans le créneau de l'Ambient grondant et bruitiste, un peu à la LUSTMORD, et étire sur sept minutes des grondements sourds, des cris lointains, tandis que "Nothing Changes" assure la transition vers un Heavy Core épais et faussement mélodique, tiré vers le bas par des riffs lents et souffreteux...Quel sens de l'imprévisible !

Mais l'amorce de ce final atypique était entamée par "False Hope", et une fois les trois morceaux mis bout à bout, le concept global de l'album prend tout son sens. La résistance de l'espère humaine face à la fatalité d'une destruction imminente est illustrée par ces interventions lapidaires et brèves ("The Path Of Most Resistance"), ses derniers instants suggèrent une rédemption douloureuse ("Prey", qui déjà suscite la mélodie et un tournant inéluctable, avec des riffs énormes et une rythmique plombée), "La Mort" intervient, quoi qu'il arrive, et soudain, le silence s'ouvre sur un autre monde ("Storm Of Silence" furieux et incontrôlable avec son solo en toute liberté harmonique), empli de solitude ("Solitude", déjà étouffant et glauque), avant la découverte d'un au delà, qui semble être la seule possibilité d'apaisement pour l'humanité...

Comme d'habitude, pour développer son message, FUCK THE FACTS emprunte des éléments disparates, qu'ils intègrent à un ensemble cohérent. Digressions et enchaînements Jazz, background Crust, déliés de guitare Heavy, imbrications en gigogne Mathcore, le tout saupoudré d'une énergie et d'une folie typiquement Grind, Ca peut se résumer par une équation mathématique, mais la liberté de ton du quintette empêche toute rationalisation.
C'est une sorte de schéma très structuré, mais qui garde une grosse part de spontanéité. C'est bruyant, parfois assourdissant, mais toujours curieux et intelligent.
Mais c'est surtout... unique. Le groupe lui même trouve une cohérence évidente à son travail, et aime à comparer Desire Will Rot au EP Amer, ou même au longue durée paru en 2005, Disgorge Mexico.
Je dirai simplement qu'ils ont quelque part raison, et que ce neuvième LP se place dans la continuité d'un boulot entamé en 1999, et apporte sa pierre à un édifice qui ressemble de plus à une tour de Babel de la violence décalée.

Mais tout ceci est décidemment passionnant. Alors peu importe le nombre, peu importe le reste. FUCK THE FACTS est une entité à part, et Desire Will Rot un triste constat porté par une musique riche et prometteuse. Lucide, mais optimiste d'une certaine façon.

Quelle ironie...



Ajouté :  Lundi 07 Décembre 2015
Chroniqueur :  Mortne2001
Score :
Lien en relation:  Fuck The Facts Website
Hits: 5200
  
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