Le monde n'est pas forcément joli, beau, juste et agréable à vivre par moments. Alors certains essaient d'enjoliver un peu le tableau, en y injectant un peu de joie, de grâce, de délicatesse, pour que les choses soient plus supportables. Et avec leur aide, nous pouvons voir la vie sous un angle plus lumineux, coloré et disons le, optimiste.

D'autres à l'opposé enfoncent le clou. Se concentrent sur la merde, l'injustice, la laideur, la puanteur, pour que personne ne se fasse d'illusion et accepte le sort qui leur est réservé.
Alors ils n'hésitent pas et en rajoutent dans la cruauté verbale, le grotesque et la violence. Merci à eux pour nous apporter cette lucidité putride à laquelle nous aurions de toute façon du mal à échapper.
De Bay City, Oregon, est né il y a quelques années (sept précisément), un duo qui ne rechigne pas à enfoncer le clou et appuyer là où ça fait mal.
Pour le fun, ils s'auto proclament Tall Can Disgustor666 & Evil Pus Blood (Batterie, chant), et Crystal Seth (Chant, Guitare et Basse), et à eux deux, font un maximum de boucan sale sous le nom de baptême NEKRO DRUNKZ. Les nécrophiles bourrés sont déjà responsables d'un certain nombre d'exactions, et de trois longue durée, dont ce petit dernier, et le premier pour Moribund Records, Absolute Filth.

Dire qu'ils ont bien choisi leur titre est un euphémisme. Et dire qu'ils ont été adoptés par la bonne maison de disques aussi, d'ailleurs, ils le reconnaissent eux mêmes.
"Les NEKRO DRUNKZ, pourvoyeurs de Toilet Metal, sont extrêmement fiers de signer avec Moribund Records, un label sur lequel beaucoup de nos influences se trouvent, comme les MEATSHITS, WHORE, FORNICATOR, ou INFESTER. C'est un label qui n'en a rien à carrer des modes de merde et qui avance comme un bulldozer, comme nous le ferons d'ailleurs jusqu'à ce que notre foie lâche".

Si avec ça, les choses ne sont pas claires... D'ailleurs, au cas où un détail vous aurait échappé, ils blindent leur dernier LP de références samplées qui ne laissent aucune place au doute. "I'm all about pussy" déclare un quidam, qui sans aucun doute doit les épier dans les toilettes pub(l)iques...
Mais prenons les choses comme elles sont, et envisageons les NEKRO DRUNKZ pour ce qu'ils sont. Des racleurs de bidet Grind, des torcheurs de cul Death/Crust, et rien d'autre. Ces mecs doivent respirer les effluves de vieux gogues infects avant de composer, tant leur musique pue du cul et écrase tout sur son passage, comme des chiottes lavés à grande pression... Une fois par an.

Absolute Filth est donc l'image sonore de son titre. C'est un gros tas de pourriture qui pue la mort, et de fait, qui ne diffère pas trop de Tyrants Of Toilet Music, leur précédent full lenght. La recette est toujours la même, un son énorme, qui vous déglingue les oreilles, une guitare grave et grasse comme une diarrhée incontrôlable, une basse ultra distordue comme un colombin qui a du mal à s'extirper, et une batterie qui déroule comme du papier cul en roue libre autour de l'axe.
L'inspiration est axée autour de la scatophilie, de l'urologie, des périodes menstruelles (l'hilarant "Menstrual Monsoon", on imagine bien le tableau rouge vif teinté de plaques blanches), et de tout ce qui tourne autour des déjections, pets foireux, chiasses dégoulinantes et effluves putrides de toilettes dont la porte est restée ouverte. Néanmoins, le groupe reste éloigné des exactions Goregrind, et c'est tant mieux. Leur Grind à forts relents de Death est puissant, efficace, et surtout, aéré par de nombreuses interventions samplées assez drôles et bien "senties".

Bon, j'admets, parfois, c'est carrément n'importe quoi (les vingt trois secondes de "Tampon Torturers", les quinze de "The Shagbag"), c'est souvent bordélique et pétaradant au possible ("Pornado", "Menstrual Mince" qui part en vrille et pousse des cris de soulagement anal, "Fukking Kuntz" tellement assourdissant qu'il tire sur le Noise Indus Grind), mais c'est aussi très souvent drôle comme le prouvent des morceaux comme "Mummufied In Pubic Hair" et son intro scientifico-insultante, tout en restant en balises Death/Crust hyper efficaces, ou "Sandwich Of Love" qui rappelle même parfois certains instrumentaux Thrash des années 80 avant de tout balancer sur la cuvette.

Ok, le duo est là pour amuser la galerie à grands coups de blagues potaches et de caca jeté sur les murs, mais ça ne les empêche pas pour autant de décocher quelques riffs bien sentis, et de nous contaminer avec leur bonne humeur scato sans limites. Le son gras apporte un surplus de puissance à leur sphincter musical, et le tout prend de joyeuses allures d'ode ininterrompue à la gloire des excréments, des pertes blanches et de tout ce qui peut graviter dans la sphère de la porcelaine.
Mais c'est efficace, bien joué, et dans le petit monde du Grind qui déborde de plus en plus sur le Gore et le Porn, c'est analogique autant que ça le peut, et ça s'écoute franchement avec plaisir. Pas toujours de bon goût je l'admets, mais c'est sans doute ça qui rend leur délire paillard si attachant.

Et puis merde, une perle Crust/Death/Grind comme "Flatulent Angel", ça se prend direct dans la gueule, comme les pets que reniflait le Marquis de Sade après avoir donné des dragées à l'anis à ses courtisanes.
C'est ça, voyez le comme ça, vous êtes au taf avec une énorme envie de chier, et les toilettes sont libres et propres. Et là, vous venez les ruiner à grandes giclées et vous repartez avec le sourire, sans les avoir nettoyées.

Oui, NEKRO DRUNKZ c'est ça. Parce que le balai à chiottes, c'est pour les fiottes.