JENNIFER BATTEN (usa) - Jennifer Batten (Oct-2017)
Jennifer Batten fait partie de ces artistes touchés par la grâce. Un vrai conte de fée pour la guitariste qui se verra propulsée en un rien de temps en icône mondiale grâce à Michael Jackson. C'est en 1987, après une audition seule face à une caméra, que la belle deviendra la guitariste du roi de la Pop. Un véritable miracle pour une artiste alors totalement inconnue et qui enseignait la guitare dans la prestigieuse école Musician Institute. S'en est suivi trois gigantesques tournées mondiale aux côtés de Mr Jackson afin de promouvoir les albums de légende que sont Bad, Dangerous et HIStory ! Des moments intenses et magiques comme ce concert au SuperBowl en 1992 vu par plus d'un milliard de téléspectateurs ! Par la suite, elle accompagnera le maître Jeff Beck en tournée pendant trois ans et enregistrera deux opus studio à ses côtés (Who Else! En 1999 et You Had It Coming en 2001 qui se verront agrémentés quelques années plus tard de Japan Live 1999). La belle n'en n'oubliera pas pour autant sa carrière solo et gravera quatre galettes en quinze ans auxquelles s'ajoutent de très nombreuses participations en tant qu'invitée. Une vraie stakhanoviste du Rock qui multiplie les projets tout en y prenant un réel plaisir. C'est donc avec un plaisir non dissimulé que votre serviteur a pu s'entretenir avec Jennifer Batten à l'occasion de sa tournée européenne aux côtés de Navi et de la sortie de Scherer/Batten "BattleZone" une pépite AOR presque entièrement composé par Jim Peterik l'ancien leader de SURVIVOR ou la belle est une fois encore plus flamboyante que jamais. Un régal de virtuosité qui est sans aucun doute une des forces de cet opus. Un entretien sympathique avec une musicienne très réaliste, consciente de sa situation et de l'état de la scène musicale actuelle ! Une véritable artiste bien loin de l'image lié à son statut de guitar hero, simple et détendue malgré un planning ultra chargé. Magnéto Jennifer, c'est à toi !
Line-up : Marc Scherer (chant), Jennifer Batten (guitare), Jim Peterik (guitare et claviers), Barb Unger (claviers), Bill Champlin (guitare et claviers), Bill Syniar (basse), Chris Neville (claviers), Christian Cullen (claviers), Dave Carl (guitare), Klem Hayes (basse), Mike Aquino (guitare), Mindi Abair (saxophone)
Discographie : Above Below and Beyond (1992), The Immigrants - One Planet Under One Groove (1995), Jennifer Batten's Tribal Rage: Momentum (1997), Whatever (2007), Battlezone (2017)
Traduction / Retranscription : Laurent Machabanski
Metal-Impact. Tu es en pleine tournée européenne avec Navi en hommage à Michael Jackson. Quel est ton sentiment sur ces concerts ?
Jennifer Batten. Explosif. C'est la première tournée que je fais avec eux et j'ai adoré. Le groupe est vraiment très funky. Chacun à sa propre personnalité. C'est un véritable bonheur. Nous avons donné dix sept concerts avec Navi qui joue aussi le rôle de Michael Jackson dans un film. Celui-ci retrace les deux dernières années de la vie de Michael Jackson et s'intitule Searching For Neverland. Une des dates de la tournée correspondait à l'anniversaire d'une chaîne de TV anglaise : Channel 4. Nous avons fait quelques boogie woogie dans un concert spécial pour Channel 4. J'ai apprécié. Il y aura aussi une tournée cet été. C'est dans deux mois et j'ai encore plein de projets à venir. Plein de travail et une tournée européenne qui s'annonce prochainement.
MI. Tu vas aussi jouer le 30 octobre 2017 à Paris pour une Materclass à la Petite Halle !
Jennifer. Oui, je fais trois ateliers différents de démonstration de guitares. Les nouvelles guitares pour les paralysés. Ces guitares comportent vingt-quatre cases et de nombreuses fonctionnalités. Je serai très bientôt à Paris pour jouer et j'en suis très heureuse.
MI. Quel souvenir gardes-tu de ton dernier concert à Paris en hommage à Michael Jackson ?
Jennifer. En fait je ne m'en souviens plus très bien. J'ai fait tellement de shows. En fait, c'est toujours du divertissement et plein de solos en pagailles. Toute l'instrumentalité de ma musique.
MI. Comment est né ce nouveau projet avec Marc Scherer et Jim Peterik ?
Jennifer. C'est plutôt inhabituel. Ils m'ont contacté il y a plusieurs années de cela. Je les ai rencontrés à Chicago et j'ai commencé a collaboré avec eux. Nous avons beaucoup travaillés en deux jours. C'était complètement fou : nous avons enregistré trois chansons dont le titre "BattleZone". Six mois plus tard, ils m'ont contacté pour faire plus de séances de travail et travailler sur un album. Marc m'a téléphoné par la suite en m'indiquant que l'on pouvait ajouter plus de chants dans les chansons. Ils voulaient être encore plus impliqués dans le projet. C'est un peu ce que j'aime dans ma carrière : l'implication des gens. Ils m'ont proposé de m'associer avec eux comme une collaboration. Le projet a donc été rebaptisé Scherer/Batten. Tu ne peux jamais prédire dans quelle direction ta carrière va te mener. Et on s'en fou !
MI. Pour Battlezone, as-tu enregistré seule dans ton propre studio ou avec l'ensemble de la formation ?
Jennifer. La plupart des titres ont été enregistrés en studio sans le groupe. Le projet était déjà terminé. Il y avait quelques trucs que je souhaitai améliorer et je l'ai fait directement chez moi.
MI. Est-ce que tu penses qu'il y aura un deuxième opus avec Marc et Jim ?
Jennifer. Pour le moment, je suis concentrée sur ce projet et j'attends de voir la réaction du public pour savoir s'ils apprécient.
MI. Comment t'es tu retrouvée à jouer aux côtés de Jeff Beck sur scène ?
Jennifer. J'étais une grande fan, adolescente. Quand j'ai commencé sur la tournée de Michael Jackson en Angleterre, je lui tournais autour et je voulais l'inviter pour un show. C'est tout ce que je voulais obtenir. Et il est finalement venu à un concert et j'ai obtenu l'autographe que j'attendais depuis si longtemps. A cette période, il y avait la sortie de mon premier album solo. Je lui ai donné le cd et la vidéo qui avait été enregistrée en Angleterre. Finalement après tout ce temps, il a écouté l'album, m'a contacté pour que nous travaillions ensemble sur un prochain opus. Ce fut un choc pour moi. Etre en tournée avec lui, enregistrer deux albums et faire le tour du monde. C'était un pas de géant dans ma carrière ! [Rires]
MI. Tu as enregistré avec lui Who Else! (1999) et You Had It Coming (2001). Qu'as-tu appris à ses cotés ?
Jennifer. Tout d'abord j'ai appris la créativité. Toujours écouter de la musique et tout ce qui est nouveau. N'importe quoi ! Plein de trucs différents comme par exemple les SPICE GIRLS. Tu prends le meilleur de ce qui se fait ou de ce que tu écoutes. Il faut une largesse d'esprit et s'intéresser à toute la musique en générale. A l'époque, avec tous ces guitaristes, c'est lui qui a eu le plus de créativité et de génie. Il a su passer des années 70s, 80s, 90s, jusqu'à maintenant et a toujours su se renouveler et a eu de nombreuses propositions. Il est toujours en train de perfectionner son talent. Il se concentre sur scène pour improviser : c'était la même chose pour Michael Jackson sur la concentration, tout le monde connaît les chansons. Par exemple, pour les shows de Jeff Beck, il y avait deux synthés, et il voulait toujours un jeu de distorsion pour faire partie du jeu et jouer. Très inspirant.
MI. Tu veux dire qu'il improvisait de nombreuses fois sur scène ?
Jennifer. Il improvise toujours, la façon de jouer avec les mélodies, c'est toujours une autre façon de jouer. A chaque changement de partenaires, il veut toujours des gens qui apportent quelque chose de neuf.
MI. Qu'est-ce qui t'a le plus impressionnée dans le jeu de guitare de Jeff Beck ?
Jennifer. En fait, il a plusieurs cordes à son arc. Un sens de l'humour extraordinaire par exemple. Tous ses meilleurs amis sont des comédiens. Il fait toujours le show. C'est comme les soirées après un concert, il y a toujours une recherche de créativité. Il est brillant et développe une créativité exceptionnelle que l'on retrouve à tous les niveaux.
MI. Te souviens-tu de ton audition avec Mickael Jackson en 1987 ?
Jennifer. Oui, bien sûr. J'ai eu beaucoup de chance qu'il choisisse d'auditionner des musiciens. Il y avait quelqu'un qui faisait partie de son business à la Musicians Institute, école à Hollywood où je travaillais. Il recherchait un guitariste et on fait passer une annonce dans notre école. Nous avons été deux personnes à venir à cette audition car nous avions été choisis dans cette école. Je fus l'heureuse élue. Quand j'ai auditionné, il n'y avait aucun groupe. Il n'y avait que moi et une caméra vidéo. J'ai été très étonnée qu'il souhaite me voir jouer des rythmes funky. Alors j'ai joué des solos et des tapping que j'ai enregistrés sur mon premier album. J'ai terminé par le solo de "Beat It", une reprise que je faisais avec d'autres groupes auparavant. Lorsqu'il a vu l'enregistrement de la vidéo, il a été intéressé. Quelques jours plus tard, on m'a demandé de venir en répétitions avec le groupe ; ce que j'ai fait ! Tout de suite après, je prenais un vol pour Tokyo.
MI. En t'écoutant, on a l'impression que la tâche a été "facile" !
Jennifer. Facile, que veux-tu dire par là ? [Rires] En fait, il s'est passé plusieurs semaines pour la préparation des morceaux, les répétitions qui ont durées plus de deux mois. Le premier mois concernaient les chanteurs et le deuxième mois c'est là que nous avons rencontré Michael Jackson sur scène. Il y a eu beaucoup de répétitions avant que nous décollions pour le Japon.
MI. Qu'est-ce qui t'a le plus surpris en travaillant avec Michael Jackson ?
Jennifer. Je pense que c'est sa manière d'être, le fait qu'il soit toujours calme. Sa quiétude. Il a commencé dès l'âge de cinq ans ; même si les choses tournent mal. La seule fois où je l'ai trouvé nerveux c'était au Super Bowl face au public. On ne pouvait qu'être dans cet état devant 1,5 milliards de téléspectateurs. A ce stade, c'est compréhensible d'être un peu nerveux.
MI. As-tu ressenti beaucoup de pression lors de ton premier show au Japon ?
Jennifer. J'étais très nerveuse durant la journée car je n'avais jamais joué dans un concert pareil. Lorsque nous sommes montés sur scène, c'est comme si nous étions en répétitions. C'est devenu passionnant car nous avions tellement répété que pour moi et le groupe ça nous a boosté notre énergie.
MI. Pourquoi ne pas avoir enregistré de nouvel album solo depuis 2007, tu es trop occupée ?
Jennifer. Oui c'est vrai, je suis quelqu'un de très occupée. Tu commences un projet puis tu dois t'arrêter pour passer à autre chose. C'est aussi à cause de l'argent car c'est très cher de produire des albums. Mon dernier album, même si j'ai enregistré la batterie à la maison, a coûté mille dollars par jour avec le mixage et la rémunération de la personne qui s'est chargé de la réalisation. Et bien plus... Je ne veux pas donner mon compte bancaire à tout le monde ! [Rires]
MI. Tu veux dire que c'est difficile pour les artistes même de ton envergure d'enregistrer un album ?
Jennifer. Oui, c'est très cher et les gens peuvent voler ta musique tellement facilement maintenant. Tu ne récupéras jamais ton investissement que tu as mis dans l'enregistrement ou c'est très rare que tu puisses le faire. Avec tous les services en ligne de streaming, les artistes ne récupèrent rien de tout ce business.
MI. Quel souvenir gardes-tu de ta tournée aux côtés de Stu Hamm (SATRIANI, STEVE VAI) and Chad Wackerman (Frank Zappa and Allan Holdsworth ) ?
Jennifer. Plutôt amusant, je crois que l'on a fini avec deux ou trois shows sans Chad car sa femme était malade. Il a du rentrer à la maison et il a été remplacé par celui qui fait les tournées avec Steve Wilson. On a fait des reprises de morceaux de Chad et Stuart, un mélange. C'était amusant.
MI. Lorsque Michael Jackson a cessé de tourner, as-tu eu beaucoup de propositions en tant que guitariste ?
Jennifer. Pas des tonnes. Ils se sont sans doute imaginé que j'étais très cher ! [Rires] Je crois que les gens étaient intimidés car j'ai fait les plus grosses tournées au monde que l'on puisse réaliser. Alors ils ont estimé que je serais inabordable. J'ai du me concentrer sur ma propre musique et partir en tournée.
MI. Est-ce qu'il y a des artistes avec qui tu aimerais travailler ou tourner ?
Jennifer. Je n'y pense pas vraiment. Des gens m'envoient des tonnes de sessions et des démos du monde entier. Quand je suis à la maison, il y a des sessions de travail que j'ai faite l'année dernière avec des gens dont personne n'a entendu parler; cela n'a aucun sens de te dire le nom de ces personnes. Mais faites-moi signe les gars si vous faites une tournée, j'aimerais vraiment travailler avec vous.
MI. Tu as pris des cours de guitare et enseignés au GIT (Guitar Institute of Technology), quel regard portes-tu sur cette expérience ?
Jennifer. L'école est incroyable, ce fut un tournant dans ma vie. Je prends des cours de guitare depuis l'âge de huit ans. Les choses que j'ai faites tout au long de ma carrière, je les dois à ce que ces profs m'ont appris. Avec le GIT, il y a eu un écart de niveau avec ce que je jouais auparavant, c'était grandiose et bien meilleur. J'ai été diplômée en 79 et j'ai commencé à enseigner en 1984/85. De plus, je continuais à enseigner alors que j'étais en tournée avec Michael Jackson. Ensuite, j'ai déménagée d'Hollywood il y a quinze ans.
MI. Lorsque tu as débutée, il y avait très peu de femme qui jouait de la guitare. Penses-tu que cela a permis aux femmes d'être mieux acceptées dans le milieu du Rock ?
Jennifer. Ca fait plus de trente ans que j'ai débuté aux cotés de Michael Jackson. A cette époque, je pensai que ce serait une révolution de jouer de la guitare électrique avec lui et que cela changerait quelque chose. Mais en fait cela fait seulement cinq ans que le changement est réel notamment grâce à internet. Tout le monde voit tout le monde, si tu vois ce que je veux dire [Rires] Toutes les semaines on voit des guitaristes filles complètement déchirées venant d'Ukraine, de Russie, d'Indonésie et qui donne le frisson. Michael Jackson a changé la perception des gens en ayant des femmes à ses cotés. Cela lui a fait une énorme publicité à travers le monde. Avec Jeff Beck, il s'agit d'un tout autre niveau de jeu de guitare, l'impact est différent. Maintenant c'est devenu populaire d'avoir une fille dans un groupe comme Alice Cooper avec Nita Strauss. Physiquement ca accroche mais il a fallu du temps pour que les gens acceptent l'idée.
MI. Est-ce que c'était facile de travailler avec Michael Jackson et ses musiciens ?
Jennifer. C'était facile mais il a fallu répéter des heures et des heures. Répéter encore et encore. Ce n'était pas difficile musicalement comparé au Jazz par exemple. Il fallait une grosse concentration au niveau du son et du groove. C'était le contrat. Je connaissais seulement le solo de "Beat It" qui était attendu tous les soirs. C'était amusant dix heures de répétition par jour pendant deux mois.
MI. Est-ce que VAN HALEN est un combo que tu apprécie ?
Jennifer. Oh oui, je me rappelle les solos de Van Halen. C'est frais, entraînant, innovant. De grands héros ! [Rires] qui ont changé le statut de la musique. Il y a très peu de groupes qui ont fait de telles innovations et qui ont changé au niveau des solos de guitares l'industrie de la musique à travers le monde.
MI. Est-ce que tu as trouvé que les gens autour de toi ont changé après avoir tourné avec Michael Jackson ?
Jennifer. Les gens changent, tu veux parler de jalousie. Tout le monde voulait cette place auprès de Mickael Jackson. Il y avait de la jalousie autour des danseurs aussi. Je me souviens avoir eu une conversation à ce propos. Tout le monde essaie de prendre la place de quelqu'un, il y a beaucoup de jalousie.
MI. Quelle forme de relation as-tu avec les fans de Michael Jackson ?
Jennifer. C'est intéressant de faire des tournées car il ne s'agit pas que de moi. Il faut aussi rencontrer les gens qui t'accostent, leur parler, leur signer des autographes, faire des photos avec eux. J'ai pu prendre le temps de partager avec les fans. Il y a telle une symbiose avec Mickael Jackson qu'ils sont heureux de te voir et de pouvoir échanger avec toi.
MI. Quelle a été ta réaction lorsque tu as appris la disparition de Michael Jackson ?
Jennifer. Ce fut le pire moment de ma vie. Quant aux enfants, ils étaient si tourmentés par les médias que je me suis sentie personnellement soulagé pour lui.
MI. Qu'as tu envie de dire aux fans français sur ce nouvel album qui te semble important ?
Jennifer. C'est totalement différent de ce que j'ai fait par le passé. C'est très "radio friendly" avec une force intérieure. Jim Peterik qui a écrit la plupart des chansons à une longue histoire avec ce type de morceau formaté pour les radios. Il a écrit les titres de SURVIVOR. C'est lui qui a écrit "Eye of the Tiger". C'est du gros son et c'est le titre phare du film Rocky et son plus gros hit. C'est vraiment un producteur avec qui on prend plaisir à travailler. Il a un immense sens de la production. C'est une approche très différente de ce que j'ai pu connaître auparavant. Je crois que les gens vont adorer cet opus.
Ajouté : Lundi 18 Février 2019 Intervieweur : The Veteran Outlaw Lien en relation: Jennifer Batten Website Hits: 4971
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