DEVIN TOWNSEND (ca) - Terria (2001)
Label : HevyDevy Records
Sortie du Scud : 6 novembre 2001
Pays : Canada
Genre : Metal
Type : Album
Playtime : 11 Titres - 72 Mins
Le qualificatif de génie revient régulièrement lorsque l’on aborde le cas d’une poignée de musiciens. Paul McCartney bien sur, Miles Davis, Brian Wilson, Prince, pour le versant Pop, mais le cas est plus rare dans notre petit monde très fermé du Metal. On pourrait citer Trent REZNOR, mais il divise trop l’opinion pour devenir consensuel. Steve Vaï pourrait aussi appartenir à cette catégorie, mais ses errances parfois un peu trop personnelles et l’aspect purement instrumental de sa démarche le cloisonnent dans une catégorie trop restrictive. De plus, son manque d’objectivité le pousse parfois à commettre des erreurs qui le ramènent bien vite sur les rives des créatifs hautement inspirés, mais trop condescendants envers leur propre travail.
Alors bien sur, pour certains, le nom de Devin TOWNSEND semble une évidence. Et il l’est bien sur, mais son aversion envers une reconnaissance aveugle le pousse à se retrancher derrière un anonymat de fortune, qui le protège d’une déification qu’il réfute depuis ses débuts.
Il n’empêche. Aussi hermétique et hétéroclite que soit sa discographie, une constante demeure. L’originalité. La recherche constante de sonorités aussi introspectives que magiques.
Il n’est pas aisé pour un fan lambda de s’identifier au travail de notre canadien favori. Les portes sont souvent grandes ouvertes, mais l’excursion dans des mondes parallèles exige une immersion totale, au risque de ne pas comprendre l’essentiel.
Que l’expression musicale est pour notre homme un exutoire, et non une quête.
Et au moment même ou notre troll de l’espace s’apprête à compléter une tétralogie aussi indispensable que cathartique, il est amusant de se replonger dans son passé et d’y voir des signes annonciateurs.
Lorsque Terria est sorti, mon enthousiasme immédiat fut tempéré par le coté terriblement homogène de l’entreprise. Des titres très longs, développant des ambiances multiples, terriblement organiques, un peu dans la même veine que Biomech, son précédent effort, influencé par l’océan, matrice originelle de l’humanité.
Terria est son pendant terrestre, célébrant la terre, autant comme concept, planète, que comme matière nourricière. Le manque de titres vraiment forts, l’aspect quasi onirique de la démarche était non pas rédhibitoire, mais inhabituelle chez Devin. Et ceci, jusqu’à la découverte de Ki et Addicted, ses deux dernières perles. Car il faut voir en Terria les prémices d’une entreprise beaucoup plus vaste, presque cosmique, et sa réévaluation d’impose alors d’elle-même.
Dès « Mountain », et c’est une constante chez Devin, le son est massif, les arrangements soignés, la voix éthérée, et l’atmosphère primordiale. Ce qui est fascinant, et au-delà de toute considération de style, c’est la dualité permanente qui existe entre la douceur et la fureur dans la musique du sieur TOWNSEND. Comme si son inspiration était directement branchée sur la vie en elle-même, retranscrivant toute la palette d’émotions qu’un être humain peut ressentir durant son existence. Un don, certes. Mais parfois aussi un horrible fardeau à porter. Mais qui lui permet parfois de s’emplir les poumons et le cerveau d’un oxygène pur qui nous manque cruellement dans les bas fonds de nos cités de béton et de verre. « Nobody’s Here » en est le parfait exemple, avec sa mélodie d’une grâce et d’une évidence telle, qu’on se demande parfois ce que l’on peut éprouver lorsque l’on compose de tels morceaux de musique.
Et pourtant Terria, pas plus que tous ses albums jusqu’à Ki ne sont des thérapies. Juste des instantanés de sa propre vie, qu’il à la décence de nous offrir régulièrement depuis bientôt 15 ans.
On peut être envoûté par sa voix, une des plus belles que le Metal nous ait offerte. Par son jeu de guitare, non démonstratif au possible, mais incroyablement volubile, inédit, et personnel. Par sa science des arrangements, quasi mystique, et qui prouve au passage qu’un homme seul avec ses propres moyens est capable de ciseler des structures au-delà de toute approximation.
Mais on peut aussi juste être fasciné par sa musique. Car c’est de cela dont il s’agit. Juste de musique.
Car il ne faut pas toujours chercher de sens caché. La vie est déjà trop compliquée pour se rajouter des épreuves.
Alors non, Terria n’est pas le meilleur album de Devin TOWNSEND. Non qu’il soit plus faible qu’un autre, mais il fait tout simplement partie d’un tout. C’est un autre épisode, une étape de plus. Comme une discussion simple avec un ami, comme un frère qu’on regarde grandir, les yeux émerveillés de le retrouver toujours là, présent et volontaire.
Comme les quatre éléments, tous les albums de Devin sont indispensables.
Comment se passer de la terre ?
Ajouté : Mercredi 16 Février 2011 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Devin Townsend Website Hits: 10954
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