« Quatorze Billiards Huit Cents Dix Billions Deux Cents Cinquante-deux Milliards Cent Douze Million Cent Dix-neuf Mille Cent Vingt-neuf » ou, plus simplement, 14810252112119129. Il s’agit du nom gargantuesque de la première réalisation professionnelle de MEHTNAKRISS. Et on peut dire que ce groupe revient de loin. En effet, depuis sa création, en 2005, jusqu’au cours des enregistrements de cet EP, mi-2009, les départs de membres anciens et nouveaux se sont succédés, entraînant même le split des Bisontins qui se sont reformés peu de temps après. Finalement, MEHTNAKRISS prend la forme d’un quintette et semble avoir stabilisé son line-up, au moment où j’écris ces quelques lignes.
Alors, que cache vraiment ce groupe ; les raisons de ces nombreux départs sont-elles celles que l’on veut bien nous faire croire ? Et que représente ce titre monstrueux qui éprouverait n’importe quel mathématicien ? Le numéro de compte sur lequel leur verser une contribution, le nom d’une photo compromettante, un code secret qui mériterait de figurer aux côtés des plus grandes énigmes terrestres, un délire personnel entre les membres, ou simplement la formule cryptée du talent ? Car MEHTNAKRISS semble avoir une longueur d’avance sur pas mal de jeunes formations en parvenant ainsi à donner une signification nouvelle au mystère, celle de l’efficacité et la qualité.
Et c’est sur une intro au clavier que débute cet EP. Un premier titre, également numérique, qui révèlera un aspect symphonique, apporté par les samples et la batterie emballée, avant de prendre une tournure à la DARK TRANQUILLITY, en mêlant guitares électriques et mélodie pianotée. Cependant, qu’on ne s’y méprenne pas, le groupe ne se contente pas de resservir le jeu des Suédois puisque les claviers ne sont, finalement, pas tellement présents sur les titres suivants. Les morceaux lorgnent davantage sur les débuts de la scène Death Mélodique suédoise, où la distillation de mélodies aux seins des compositions agressives relevait d’un agencement réussi.
Ainsi, MEHTNAKRISS parvient à redonner naissance à cette ère en usant une pléthore de riffs infaillibles et accrocheurs, où l’on ressent parfois l’influence d’IN FLAMES (« Good Plans Society Offers For You » et son mid-tempo) et d’autres fois une approche plus moderne (« Lament »), dont l’efficacité est renforcée par le tempo rapide et une section rythmique massive. Des compositions qui sont sublimées par différents breaks (« My End Is Black » et ses superbes claviers atmosphériques) et solos d’une grande dextérité, à l’exemple de la démonstration dantesque réalisée sur « Mechanical On The Surface ». La basse consolide confortablement les riffs très énergiques et la batterie impose sa lourde présence tout du long pour, finalement, se perdre dans des blast beats rageurs sur le dernier titre. Il est bon de souligner que, pour une première production, la qualité sonore est vraiment bonne et, dans l’ensemble, correctement balancée.
Pour ce qui est du chant, que les puristes soient rassurées, aucune voix claire ne fait d’apparition dénaturant la brutalité instaurée. Au contraire, Alix nous sert des vocaux growlés gutturaux d’une grande puissance qui jouent une part indéniable dans la sauvagerie des compositions, à l’instar de « Lament » et son chant bestial ou « Walking In The Dark », où les blast beats accroissent la férocité de sa voix. D’ailleurs, à part ces deux derniers titres, les refrains ne se démarquent pas tellement des autres lignes de chant, ce qui accentue à nouveau la violence des compositions et est, sans doute, la volonté du groupe à ne pas miser sur un seul passage pour rendre un morceau mémorable, mais peut également déranger.
En tous les cas, grâce à cette première réalisation, METHNAKRISS dévoile au grand jour son énorme potentiel. Les Bisontins parviennent à réaliser des compositions puissantes et mémorables qui accrochent dès la première écoute, et s’accaparent, par la même occasion, toute l’attention des amateurs de Death Metal Mélodique. Evidemment, les influences se font encore ressentir, mais le groupe montre clairement qu’il a la possibilité de proposer un son plus abouti qui risque bien d’en faire un des groupes phares du genre, en France.