Ce n’est guère une surprise, l’Allemagne a toujours été un bastion, un repère pour les amateurs de Black Metal bien ficelé. Pas étonnant qu’aujourd’hui, on continue à recevoir la promo de certains de ces groupes, toujours en activité malgré l’amoncellement de combos que génère le style. Parmi ceux-là, DER WEG EINER FREIHEIT et son premier album éponyme. Alors, qu’est ce qui différencie foncièrement ce petit trio bavarois de toute la tripotée de blackeux qui sévissent encore ? Rien. Rien de suffisamment choquant pour mériter toute considération. Ils ne se maquillent pas ? Rien d’inédit. Ils rechignent à porter des cuissardes à pointes ? Rien d’étonnant. Ils proposent un Black Metal flirtant avec le romantisme et les thématiques de Sade ? Pas de quoi sauter au plafond. DER WEG EINER FREIHEIT sur le papier, c’est juste chiant à mourir. Oui mais voilà, l’écoute de l’album va me donner tord.

En quelques 300 papiers que j’ai eu à rédiger pour ce webzine, rares ont été ceux dédiés à des groupes de Black Metal et rarissimes sont ceux à avoir récolté de bons suffrages. Mais dans le plus pur esprit d’un groupe comme AUSTERE, les allemands méritent ce qui va leur arriver. Loin d’être extrêmement brutale, leur musique est construite, structurée. Les pistes sont plutôt longues… et si je fais généralement l’amalgame « long égal lassant », ce n’est pas le cas ici. Le trio, qui compte dans ses rangs le batteur live d’HEAVEN SHALL BURN (s’il vous plaît !) offre beaucoup de diversité. Les lignes mélodiques, omniprésentes, sont épurées, pour procurer un maximum de sensations. On retrouvera parfois des cavalcades plus épiques, à la NARGAROTH (« Aurora ») ou des mid-tempos bien sentis (« Zum Abschied »). Sorti de nulle part, ce groupe semble avoir mûri son projet depuis un bout de temps. Il n’apparaît pas concevable que l’osmose et la fluidité qui découle de ces compositions soient la conséquence d’un coup de tête. D’un point de vue strictement individuel, on ne peut guère en vouloir à Tobias de posséder une ligne de chant définitivement quelconque, car on connaît la difficulté d’innover en matière de chant BM. L’essentiel est que finalement, il ne gâche en rien le plaisir d’écouter Nikita prendre son pied à la guitare lead et nous proposer ses propres réflexions musicales sur un sujet qu’il maitrise bien. Les deux se complètent même plutôt bien. L’ensemble de cet album, qui est le premier, faut-il le rappeler, en ressort comme considérablement harmonieux et par conséquent, très plaisant. Avec cette pointe de romantisme, noire comme le plumage d’un corbeau, parfois caractéristique des combos teutons, DER WEG EINER FREIHEIT réalise un joli tour de passe-passe et nous invite ouvertement à un moment de méditation autour de sujets comme la liberté, l’amour ou la solitude, qui tranchent avec les habituelles notions de guerre, haine et destruction.

En résumé, une excellente surprise, qui me conforte dans mon idée de donner parfois un peu plus de crédit au Black Metal. Certains des groupes qui le représentent aujourd’hui font preuve d’une sensibilité à fleur de peau, ça en deviendrait presque touchant. Pour un premier album, DER WEG EINER FREIHEIT frappe un grand coup. Dommage que comme d’habitude, cette sortie passera totalement inaperçue.