Tiens, je parlais l’autre jour de THE GHOST INSIDE en tant que groupe influent pour le Metalcore américain. En voilà un autre ! NORMA JEAN ! Eux qui ont emprunté leur blaze au vrai nom de Marilyn Monroe ne s’imaginaient surement pas en arriver à ce stade après des débuts mitigés marqués par un O God, The Aftermath (2005) et un Redeemer (2006) plus que laborieux. Comme quoi, peut-être que de les avoir enterré aussi vite leur a donné cette motivation pour tout péter. Alors que The Anti Mother (2008) marquait un début d’amélioration, c’est bel et bien Meridional qui est venu sacrer en 2010 les Géorgiens (oui, la Géorgie est aussi un Etat d’Amérique) au rang des formations les plus prolifiques et rentables de sa catégorie. Et pour ce cinquième full-lenght, aussi ont-ils eu la bonne idée de faire figurer un éléphant sur cette pochette d’un rare mauvais goût. Car oui, leur Metalcore est bel et bien pachydermique, n’en déplaise !

Souvent considéré comme une musique facile d’exécution et facile d’accès, le Metalcore a trouvé avec NORMA JEAN son antihéros. Les américains ne changent pas les codes, mais bouleversent les structures. D’ailleurs de structures, il n’y en a plus beaucoup. Elles se perdent très vite et ne reviennent qu’à de rares occasions (« A Media Friendly Turn For The Worse »). Tout ça est enroulé dans une crêpe qui dégouline de matières grasses et qui vous cale dès la première bouchée. Mastoc, carré et gonflé à la créatine, ce Metalcore gros-bras vous colle au mur sans réfléchir. Mais surtout, il n’oublie jamais de faire passer ces mecs pour de fins compositeurs. Quoiqu’on puisse en penser, ce disque est avant tout une composition, plus ou moins régulière et qui possède ses creux, ses coups d’éclat. Le riffing typique de Scottie et Chris touche beaucoup au Mathcore pour les polyrythmies arithmétiques ou au Post-Harcore quand il s’agit de lâcher la bride (« Blood Burner »). On peut légitimement se poser la question de l’intérêt d’un troisième guitariste en la personne de Cory qui gère suffisamment bien le chant pour ne pas avoir à en rajouter une couche sur les grattes. Quelques guitares sèches viennent parfois pointer et annoncent en général de bons titres, à l’image de la rafraichissante « High Noise Low Output ». On aurait aimé atteindre parfois la transcendance mais NORMA JEAN semble s’extasier à ne jamais achever sa branlette musicale. Probablement que les ricains n’osent pas franchir le pas qui pourrait les faire basculer dans l’indécence, alors ils se contentent de bien faire les choses, sans en rajouter. Pas (ou peu) de chant clair, pas de breakdowns foireux mais une utilisation juste de la batterie qui se surprend à faire dans le tribal à certains moments. Meridional est un opus sacrément bien construit, qui fourmille d’idées et impose malgré tout son charisme. Voilà des garçons qui vivent dans le milieu depuis toujours et qui n’ont besoin de personne pour pondre une piste comme « Falling From The Sky : Day Seven », toute en subtilité dans l’approche de la guitare mélodique et en sensualité dans les vocaux. Parmi les inévitables invités, seul Shelby Cinca, l’homme à tout faire de FRODUS viendra pousser la chansonnette sur « Everlasting Tapeworm ». Je crois que c’est plus pour le côté marketing que pour l’intérêt artistique en fait…

Plein de symboles et de surprises, comme ce final de 25 minutes qui cache un sacré beau bonus, Meridional met en scène NORMA JEAN comme une formation travailleuse, appliquée mais qui n’hésite pas à laisser grandir ce grain de folie qui enrayera la belle mécanique. On a beau dire ce qu’on veut, il faut avoir l’esprit sacrément obtus pour ne pas trouver son bonheur dans un tel disque, qui brasse avec talent différents courants et pas forcément les plus inhérents au Metalcore.