WANING (se) - The Human Condition (2012)
Label : Antonym Records
Sortie du Scud : 26 avril 2012
Pays : Suède
Genre : Black Metal Progressif
Type : Album
Playtime : 8 Titres - 43 Mins
La philosophie de WANING, c’est de créer une œuvre cohésive sur tous les plans. Que soit vis-à-vis de la musique, des paroles, ou bien du visuel ; tous ces éléments doivent s’accorder plutôt qu’être superposés dans des alliances parfois douteuses. Population Control avait parfaitement initié leur vision artistique, il y a quatre ans. Martial, dense, et industriel, c’était un réel voyage tourmenté, et sans recours, qu’il faisait subir, sobre et minutieux comme sa pochette, cru et cynique comme sa réflexion sur l’humanité. Lâché par Eerie Art Records, le quintet a trouvé le respect de son idéologie sous la houlette d’Antonym Records, à travers lesquels ils sortent The Human Condition, œuvre qui promet d’être toute autant travaillée que son prédécesseur.
Le dédain de la mentalité humaine actuelle, trop conformiste, demeure le propos phare de ce disque. Toutefois, l’on remarque vite une évolution sonore par rapport à l’ambiance froide du premier disque. Ici, les tremolo pickings sont davantage en avant dans le mix, et s’avèrent plus chaleureux, délaissant l’optique mécanique qui ne faisait guère de concessions. Le côté tranchant de la production s’est amenuisé, et les guitares apparaissent moins grouillantes. Néanmoins, les riffs de fond persistent, juste histoire de saturer et embrumer les compositions d’un mur morne, sans pour autant s’orner d’un rendu rêche. L’on sent que l’ambiance est différente, moins agressive. WANING propose un voyage différent cette fois-ci, où les breaks acoustique fourmillent sur plusieurs titres. Les compositions accueillent davantage de scissions pendant lesquelles le quintet en profite pour s’orienter vers une optique plus moderne, voire Post-Black, où les guitares dissonantes apparaissent lissées, les incitant à développer des mélodies prenantes, et atmosphériques. « Beneath The Septic Sun », par exemple, marie avec brio les différentes ambiances, conservant cette teinte entêtante due aux riffs lumineux. En dépit d’accords saturés, l’ambiance n’est pas pour autant noire, il y a même une dimension Rock qui se dégage de certains arrangements. Les riffs discordants, la formation suédoise parvient à les utiliser pour créer des mélodies plutôt que des ambiances sinistres et grinçantes. Ils composent alors des méandres nébuleux qui évoluent dans leur aspect à la fois bruitiste et introspectif (« Void »), laissant le soin aux instruments rythmiques et au chant de s’accumuler par-dessus pour définir vraiment l’entrain des pistes.
The Human Condition joue moins sur les atmosphères pesantes, bien que ses guitares soient impénétrables, mais privilégie le côté direct des morceaux. Le groupe cherche moins à hypnotiser son auditeur, si ce n’est sur « The Human Condition » où, à l’image du titre éponyme de Population Control, les samples vocaux féminins se posent sur une basse qui vibre comme jamais, et un ensemble de dissonances et percussions qui rappellent le caractère expérimental de SOMHALLA. Et « Continuum » retombe un peu dans le même piège que « The Swarm », en proposant une piste durable qui a du mal à marquer et fait retomber l’ambiance de mi-album. En dehors de cela, l’on est plus dans des cadences rapides, avec une façon de jouer semblable au Post-Rock, rythmiques brutes et voix gutturale en prime. En effet, les textures sont denses et parcourues de mélodies subtiles. Cette approche peut également s’apparenter au Shoegaze et s’affilier à des groupes comme ALCEST, WOODS OF DESOLATION, ou AUSTERE. Ce qui fait la différence, c’est cette dynamique dans les titres, avec des décharges extrêmement groovy grâce au travail de la cinq cordes qui tricote avec puissance (« End Assembly »). La basse déborde de génie et accompagne les sections plus aériennes avec un doigté musclé et créatif, à l’instar du riff principal de « To The Smouldering Next ». La batterie régit des tempos solides et soutenus, tout en se faisant moins impactante que sur l’œuvre précédente. Elle a été quelque peu diminuée dans le mix, pour garder cet aspect assez atmosphérique tissé par les riffs épais. Bien qu’elle soit plus effacée, elle demeure précise et cadence les compositions avec une minutie rare et vivace. Chaque percussion a sa place et profite à bâtir le flot d’émotions que le combo insuffle dans sa musique, à l’instar de la conclusion « Cynic Eye », qui n’est toutefois pas du niveau d’« Hollow ». Des instants de rage, il y en a indubitablement, mais la production plus organique met moins les chairs à vif, sans pour autant annihiler ces moments de bravoures intenses dans leurs développements.
L’autre force de WANING, elle se trouve en son frontman. On se le rappelle imperturbable et intransigeant. Sur cet album, il est plus présent et se laisse aller à davantage de nuances dans son timbre et son élocution, toujours justement placé sur les titres pour parfaire la cohésion de tous les éléments musicaux. Globalement moins discernables, mais extrêmes, ses vocaux sont en quelques sortes une version moderne du chant guttural du Black, avec une pointe Rock dans son phrasé, à l’image du premier morceau, qui donne réellement de l’entrain aux compositions. Variant, il peut aussi prendre des tournures plus inintelligibles, dans la veine du shriek, sans toutefois transpercer l’atmosphère opaque mise en place, mais plutôt en se fondant dans ces textures denses, éparses, comme sur le brouillard métallique de « Through Fields Of Mercury », ou bien il lance des hurlements et cris insanes. Le fait que la voix soit plus diversifiée, plus humaine, et moins catégorique, enlève cet aspect monolithique qu’avait le disque précédent. L’ambiance n’en demeure pas moins imposante, laissant poindre une certaine austérité au travers de l’agencement des structures.
WANING poursuit son évolution créative et sonore vers une identité musicale qui lui est déjà propre, et ne demande qu’à s’épanouir encore davantage, comme d’autres figures emblématiques du genre avant lui. Cet album oriente la formation vers des sphères plus mélodiques, moins crues, tout en conservant la personnalité du groupe intacte. Au lieu de stagner et se contenter de recopier la formule de leur premier album, les suédois ont su faire évoluer leur son de la meilleure des manières, en proposant une expérience musicale nouvelle, reflétant toujours une approche peaufinée et consciencieuse d’un Black Metal percutant.
Ajouté : Mercredi 10 Octobre 2012 Chroniqueur : CyberIF. Score : Lien en relation: Waning Website Hits: 7174
|