GODFLESH (uk) - Decline and Fall (2014)
Label : Avalanche Recordings
Sortie du Scud : 2 juin 2014
Pays : Angleterre
Genre : Industriel
Type : Album
Playtime : 4 Titres - 21 Mins
Ma dernière rencontre avec GODFLESH datait de juin 2010, au Hellfest de Clisson. Et ce jour là fut une des plus grandes déceptions musicales de ma vie. J'avais assisté à une prestation pathétique, qui faisait suite à une mise en place interminable, et j'étais parti au bout de quelques morceaux, complètement dépité par le non spectacle offert. Même Burton C Bell, présent dans le public avait la mine basse, en bon fan qui se respecte. Ca ressemblait à un enterrement de seconde classe, la mise en bière d'un groupe majeur qui avait révolutionné la scène Indus des années auparavant, après avoir donné naissance à un style musical extrême, le Grind dans une Angleterre moribonde en matière de musique extrême.
En effet, le respect du à un musicien comme Justin Broadrick est incommensurable. Sans lui, sans son côté visionnaire, nous n'aurions jamais eu droit à NAPALM DEATH, à la scène Grind UK. Il aurait pu s'arrêter là, mais à peine son groupe quitté, il forma HEAD OF DAVID, puis l'essentiel GODFLESH, qui livra en 1989 une des pierres angulaires de l'indus moderne, l'éternel Streetcleaner que je découvris hébété à l'époque, pas vraiment sur d'avoir entendu ce que j'avais entendu. Telle déflagration ne m'était pas parvenue aux oreilles depuis le monolithe "Stay Here", du Filth Lp #1 des SWANS. Une explosion de haine, de misanthropie, reléguant la concurrence à des kilomètres d'inspiration stérile. "Like Rats", "Christbait Rising"... Mais vous les connaissez aussi, et vous les vénérez, j'en suis sur.
Alors, je ne pouvais pas rester sur cette impression, c'était impossible. Ma catharsis vint sous la forme d'un entrefilet sur un blog anglais, annonçant la sortie imminente d'un nouvel EP du FLESH, la première saillie depuis l'album Hymns en 2001, il y a treize ans. Mais je croisais les doigts... Certes, Justin nous avait envoyé en éclaireur l'excellent "Ringer", et ses six minutes de terreur oppressante qui rappelait les meilleures heures de son projet. Tempo martelé, basse énorme en avant, dont le son évoque des cordes épaisses et pendantes, guitare huit cordes pour plomber un peu plus le tout, chant en retrait, tout était là pour nous rassurer.
Mais même si cet EP ne devait s'appréhender que comme une mise en jambes avant l'album à venir, A World Lit Only by Fire, le maître n'avait pas le droit à l'erreur.
Et il n'en a pas commise. Decline and Fall est un monstre.
Tout est là.
Cette rythmique écrasante martelée comme un leitmotiv désespéré. Ce chant plaintif, qui a gagné en profondeur au fur et à mesure que la voix de Justin prenait du grain. Cette guitare lourde, oppressante. Ce son synthétique pourtant si organique. Ces dissonances dérangeantes. Cette répétitivité qui le confine à l'isolement de l'esprit. Et pourtant, derrière toute cette misère harmonique se cachent des trésors. Le groove infernal de "Dogbite", pourtant construit sur une ligne acide comme le coeur d'un homme fini, et dont les basses pataudes restent pourtant presque dansantes.
Le motif hypnotique et redondant de "Playing With Fire", dont la linéarité incendiaire évoque tout autant la pochette de Streetcleaner que les sonorités maladives de Selfless. Etiré sur plus de six minutes, c'est un mantra qui vous enserre l'esprit et ne le relâche pas. Comme l'émission toxique d'une cheminée d'usine tournant à plein régime, embrasant le ciel d'une fumée aussi dangereuse que fascinante.
"Decline & Fall" au contraire, joue l'agression totale. Boite à rythme en embuscade, contretemps, cassures, chant vindicatif, c'est un point final en forme de poing dressé et de regard vers l'avenir. Mais c'est aussi - et surtout - une façon pour Justin de montrer à quel point son influence à été énorme durant toutes ces années, notamment sur un groupe comme FEAR FACTORY, qui aurait pu interpréter ce titre au lieu de sombrer corps et âme dans la redite faiblarde.
Decline and Fall. Si ce titre illustre à merveille la démarche de Braodrick et Green, témoins volontaires de la chute d'une société en décadence depuis trop longtemps, il est à l'opposé de la créativité du groupe qui n'a que très rarement été prise en défaut. Si ce foutu concert de 2010 m'avait laissé triste, cet EP m'a redonné foi en un duo qui m'a procuré tant de sensations que je ne pouvais rester sur une impression de perte.
Tremblez faux bruitistes et autres ersatz de terroristes musicaux dérisoires. GODFLESH est de retour. Et les esclaves de l'usine font peur. Très peur.
Ajouté : Dimanche 27 Juillet 2014 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Godflesh Website Hits: 10416
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