ENCOFFINATION (usa) - III - Hear Me, O' Death (Sing Thou Wretched Choirs) (2014)
Label : Selfmadegod Records
Sortie du Scud : 21 octobre 2014
Pays : Etats-Unis
Genre : Extreme Death Doom Metal
Type : Album
Playtime : 8 Titres - 58 Mins
"La douleur est aussi nécessaire que la mort." [Voltaire]
En partant de cette citation que l'on peut ériger en postulat subjectif (qui n'engage que son auteur), traitons alors ENCOFFINATION en tant que tel. Un groupe essentiel, majeur, qui a su ériger la souffrance et le trépas en dogmes de vie, qu'il est nécessaire de suivre à la lettre.
Car en effet, quel groupe pourrait mieux symboliser la douleur et la mort ? INCANTATION aurait pu, mais ils se sont arrêtés avant la limite, frontière que le duo américain n'a pas eue peur de franchir. Et c'est une fois de plus en direct de l'au delà que nous les retrouvons, avec leur troisième longue durée (et une flopée d'EPs), qui ne déroge en aucun cas à la règle de conduite qu'ils se sont arrogée. La chronique rédigée lors de la sortie d’ Elegant Funerals for the Unknown Dead est toujours valable aujourd'hui, deux ans après, tant les tendances macabres d’Elektrokutioner et Ghoat n'ont pas changé d'un iota.
Lourdeur, lancinance, tempo martelé comme un crédo morbide, monotonie d'ensemble, incantations vocales aussi froides et dures qu'une vieille pierre tombale, le voyage proposé par ENCOFFINATION n'a ajouté aucune étape à son parcours, et prend toujours un plaisir certain à déambuler parmi les stèles, les enterrements, et les pleurs.
Si le Death/Doom devait trouver son essence la plus absolue dans une concrétisation musicale, il est pratiquement certain que III - Hear Me, O' Death (Sing Thou Wretched Choirs) en serait le parangon. Le seul but du duo US est en effet de mettre en illustration sonore la mort, mais sous une approche résolument triste, et progressive. Cet album, comme toutes les réalisations du groupe, se prend comme un tout, comme un dernier voyage sans heurts, comme une âme qui se résout à accepter l'inéluctable : la fin de l'existence. On ne peut pas vraiment parler de violence lorsqu’on aborde le cas des chansons présentes sur cet album. L'agression est certes palpable, mais elle est différente, et se concentre sur la durée. Car l'heure qu'ENCOFFINATION nous consacre est d'une linéarité parfaite. A l'image du mouvement perpétuel, chaque "chanson" suit une logique initiée par la précédente, et qui sera encore appliquée sur la suivante. Aucune variation, aucune digression, aucun détail qui ne dépasse, juste des invocations, énoncées sur le même ton.
Malgré tout, une fois de plus, III - Hear Me, O' Death (Sing Thou Wretched Choirs) bénéficie d'une production très crue, mais très ample. L'image va vous paraître étrange, mais c'est comme si l'album avait été enregistré avec une très bonne console, placée à l'intérieur d'une vieille crypte. Nous sommes à cent lieues ici des barbarismes sonores du Raw Black, la mort méritant un traitement digne à la hauteur de sa finalité. Les guitares sont graves, les riffs traînent leur souffrance sur des secondes entières, la basse est écrasée, chaque note semblant tomber à terre dans un lourd fracas, tandis que la batterie sèche et minimaliste rythme l'ensemble avec parcimonie, laissant la part belle aux silences entre chaque percussion.
Le seul parallèle valable pour tenter d'illustrer la musique développée ici reste encore une fois celui de la procession funèbre. Un vieux corbillard roulant sur de vieux chemins de terre, suivi par quelques endeuillés la mine basse et le visage sombre, puis l'arrivée dans le cimetière, la mise en terre, sans prière, sans un mot prononcé, et puis...plus rien.
Certes, j'en conviens, il est difficile de différencier cet album de tout ce qu'ENCOFFINATION a pu faire jusqu'à présent. Même longues interprétations (rien sous la barre des six minutes), même sensation d'écouter du MORTICIAN passé en cinq tours minutes, mais cette stabilité que la plupart jugeront futile et redondante à quelque chose de beau et d'hypnotique. Cette obstination à ne pas sortir d'un cadre que l'on a jugé pertinent est sans doute dérisoire, ridicule, et témoignera pour vous d'une absence totale de créativité, mais chacun formule comme bon lui semble ses vues musicales, sans se soucier de l'opinion des autres.
Et je dois reconnaître que de ce côté là, Elektrokutioner et Ghoat ont trouvé la formule parfaite, tant il est facile de s'imaginer la mort qui nous attend en écoutant leurs albums. Car après tout, chaque personne affronte sa mort seul. Point.
Je pourrais encore gloser des heures sur ce concept, tant il est sujet à débat. Mais à quoi bon ? Les réfractaires à la musique d'ENCOFFINATION le resteront (le principe est le même que pour un groupe comme REVENGE, qui lui aussi reste campé sur ses positions depuis des années), les fans approuveront, et le monde continuera de tourner. Si vous avez la flemme d'écouter le LP dans son intégralité, mais que vous avez quand même envie de savoir de quoi il en retourne, contentez-vous de son dernier morceau, "Mould of Abandonment". Il synthétise en dix minutes toute l'entreprise. Mais si vous êtes d'humeur noire, tentez l'ensemble.
Avec le risque d'en sortir un brin déprimé mais lucide.
Ajouté : Samedi 14 Février 2015 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Encoffination Website Hits: 5796
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