How much fuzz can you take in your rock ? Avec son nom de franchise NFL, SPACE PROBE TAURUS pourrait presque prétendre à participer au Super Bowl l'an prochain. Ou pourquoi pas performer son Rock acide et hystérique à la mi-temps de cette finale mondialement regardée ? Ce serait finalement une promotion particulièrement avantageuse pour ce groupe suédois ô combien capable de remuer les foules. Formé en 1992 sous le nom de SNAKE MACHINE, les SPACE PROBE TAURUS de Karlstad (ça fait tout de suite moins rêver) commencent par l'EP Insect City avant d'embrayer diverses apparitions sur quelques bandes-originales obscures, comme celle du nanar "Actress Apocalyspe" ou celle du non moins ridicule "I Am Vengeance", deux films d'horreur de série B. Décidément très influencé par le cinéma, SNAKE MACHINE change alors de blaze et adopte celui de SPACE PROBE TAURUS, du nom d'un vieux film de science-fiction datant de 1965. Tout un programme pour ce quatuor qui se décide enfin, en 2008, à faire paraître un concentré de son univers via ce premier full-lenght éponyme (enregistré entre septembre et novembre 2004).

Dire qu'on a connu pire pour un seizième anniversaire est un formidable lieu commun. Très vite, cet album va faire étalage de son inspiration délicieusement rétrograde et de ses influences plus-old-school-que-ça-tu-meurs ! A la croisée d'un Rock de biker couillu, d'un Rock psyché sous LSD (d'où le terme "Acid Rock") et d'un Rock bourré de distorsions (d'où le terme "Fuzz Rock"), Space Probe Taurus crashe sa soucoupe dans un champ peuplé de junkies qui passent leur journée à se tartiner les oreilles de MUDHONEY, de MELVINS, de STOOGES et de BLUE CHEER. Une bénédiction ! Pourtant, la musique des suédois est beaucoup plus rugueuse et explosive que celle qui jalonnait la révolution des seventies, grâce notamment à une production propre, digne des évolutions techniques qui ont vu le jour au cours de ces quarante dernières années. Leur mentalité, quant à elle, est restée scotchée au siècle passé, que ce soit dans l'écriture de morceaux abrasifs, de solos endiablés, de rythmes catchys ou dans le port de vestes en laine de cul de mouton. Entre authenticité et innovation, SPACE PROBE TAURUS cavale avec justesse, les épaules droites, le menton levé. Et comment leur en tenir rigueur, puisqu'avec cet album, c'est toute une génération de fringues et de tempos qui est susceptible de ressusciter ? Parmi les meilleurs titres de l'opus, évidement, "Dig The Lizard" mettra tout le monde d'accord, talonné par la tumultueuse "Molten Lava", l'hypnotique "Psi-Burn" et la terrible "She-Wolf, Baby" (composée pour le film "Hollywood She-Wolf"). On a tendance à trouver que chaque compo se ressemble un peu, sauf que sous cette couche épaisse de Rock gras et illicite branché sur courant continu, il y a un éventail de rythmes, de refrains mémorables, de tubes au groove inébranlable. Les SPACE PROBE TAURUS ont une griffe bien à eux, coupante comme la voix "bourbonnée" de Sjöberg ou percutante comme le jeu de batterie de Sundler, dont l'explosivité et les frappes sourdes sur les toms sont en partie responsables de la singularité de cette galette. Evoluant en tant que groupe soudé et complice sur 45 minutes, SPT était bien parti pour rappeler qu'entre buzz et fuzz, il n'y a qu'une lettre qui change.

Que du fuzz, pas de buzz, et c'est tant mieux ! Loin des projecteurs, les suédois se sont éclatés. Nous avec. Space Probe Taurus est un opus unique, magnétique, bourré d'optimisme et de Rock au sens le plus anticonformiste du terme. Celui qui remue, qui assume son côté libertin, has-been et provoc, sans se départir d'un académisme de rigueur. De bonnes vibes en rafale, mais surtout, que ça reste entre nous.