THUNDERING RECORDS (FRA) - Laurent Bocquet (Mars-2003)
Entretien avec Laurent Bocquet, le boss de Thundering Productions, pour qu'il nous parle de l'actualité du label mais aussi pour en savoir un peu plus sur l'Homme…
Metal-Impact. Comment et quand en es-tu arrivé à écouter du Metal ?
Laurent. Oh tout simplement. J'ai eu la chance d'être présent au début des années 80 où le Hard Rock explosait avec AC/DC, Maiden… et surtout Antisocial de Trust qui passait sur toutes les ondes. J'avais une dizaine d'années et ça marque beaucoup pour un jeune !
Ensuite, c'est l'apprentissage, avec la découverte de la NWOBHM et l'engrenage avec l'arrivée de la vague Exodus, Metallica Anthrax, puis la vague Death des 90's, sans oublier la vague française, très importante à mes yeux. Depuis, hormis la scène Gothic Metal, rien ne m'a vraiment emballé d'autres depuis.
MI. Quels sont tes albums de chevet et groupes favoris ?
Laurent. Je reste et resterai un grand fan de Maiden et Judas (avec Rob bien sur). Je ne me lasse pas d'albums comme Powerslave ou Sad wings of Destiny.
S'il y a bien deux albums que j'emporterai partout ce serait ces deux là ! Et je laisserai certainement une petite place pour Sortilège et ADX !
MI. Quel est ton style de prédilection ?
Laurent. Au départ, j'adore le Heavy Metal ; Pas trop la scène actuelle qui me semble bien molle. On parle de True Metal, je trouve cela plutôt mou du genou. Des riffs pas percutants (quand il y en a !), beaucoup de claviers, et trop de mélodies ! Maintenant, j'adore le Thrash, surtout quand il est joué par des groupes comme Annihilator, Kreator, Exodus ou Blackness.
A priori, j'aime bien à peu près tout dans le Metal avec quand même de très fortes restrictions sur le Black et le Grind, sauf quelques rares groupes dans ce domaine comme Inhumate par exemple.
J'écoute de tout et j'essaye d'apprécier à sa juste valeur ce que j'écoute. Avec l'âge et l'expérience, je deviens de plus en plus sélectif. Les compos priment sur les productions stéréotypées qu'on nous balance (et productions qui masquent de grosses carences en fait !).
MI. Tu as toi même joué dans des groupes, peux-tu nous en dire un peu plus ?
Laurent. Oh, c'est la préhistoire ! J'ai démarré vers la fin 80's en jouant dans un groupe Heavy : Gloomy Gherkin. A l'époque, j'étais chanteur. On chantait en français et c'était tout sauf à la mode ! Dans les 90's, le groupe s'est durci musicalement. On a changé de nom pour s'appeler Spasmophilius. On a alors joué du Thrash, forcément mélodique avec ma voix et on a sorti un album "The Maze", bien accueilli par la presse et qui s'est au final pas trop mal vendu. On nous qualifiait à l'époque de Thrash progressif ! Le groupe a splitté faute de motivation malgré les possibilités de distribution qui s'annonçaient.
En 1998, j'ai auditionné pour un groupe canadien, signé sur Metal Blade. Les premiers essais ont été concluants, mais le groupe a préféré au final prendre quelqu'un de leur pays (l'ex chanteur de Sword) et l'album n'est jamais sorti. J'ai continué à bosser un peu tout seul, en investissant dans du matos studio.
Finalement, les potes de GANG m'ont poussé à reprendre un peu de service en m'invitant sur leur dernier album "Piece of War". J'ai aussi poussé la chansonnette sur une compo du dernier Blackness. Depuis, je répète ici ou là et maquette chez moi des titres juste pour le plaisir.
MI. Pourquoi as-tu décidé de reprendre les rênes de Thunder Productions après son rachat par Musea ?
Laurent. Après l'aventure Spasmophilius, j'ai eu envie de continuer le travail promo que j'avais accompli pour l'album. Je me suis investi sur le net en créant un site internet (The French Connection) qui a connu son "heure de gloire" en 96/98, puis un zine du même nom. J'ai donc développé mes relations avec les labels français et étrangers.
Quand Musea a racheté Thunder productions, un label avec qui j'avais collaboré pour la promo notamment, Alain Ricard de Brennus (division de MUSEA) m'a proposé de finaliser enfin cette envie de créer mon propre label. Il m'a mis le pied à l'étrier. Et, je ne l'en remercierai jamais assez [Sourire].
D'ailleurs, ma relation avec Alain dépasse largement le simple cadre d'une relation de label à label. Alain est un peu mon mentor. Il m'a quasiment tout appris et surtout toujours bien conseillé. C'est pour moi une référence en la matière et un partenaire privilégié !
MI. Dans quelle optique diriges-tu Thundering ?
Laurent. Diriger est un grand mot ! L'objectif premier est à l'image de ce que fait Brennus pour le Metal mélodique en France. Essayer de montrer que nous aussi, avons les groupes capables de rivaliser avec les pointures d'ailleurs, voire avec ceux que l'on voudrait nous faire passer pour des pointures. J'essaye donc de donner l'opportunité à de jeunes groupes de progresser en mettant leur album dans les bacs et en assurant leur promotion. C'est l'objectif majeur. Il va de soi qu'ensuite, le label grossit et grossira avec ses groupes.
MI. Tu dis être un label de tremplin pour les groupes, comptes-tu développer d'autres façons d'aider les groupes ?
Laurent. C'est peut être prétentieux de dire un tremplin car tu suggères qu'après la sortie d'un album chez toi, la situation est meilleure. C'est plus une volonté d'apporter une aide aux groupes, de leur permettre d'avoir l'accès aux bacs, de les aider pour leur promotion.
Pour répondre à ta question, je souhaite effectivement développer d'autres formes d'aides. Je ne peux pas signer tous les groupes de France et tous ne connaissent pas non plus Thundering. Il m'arrive donc fréquemment de tomber sur d'excellents groupes qui ont déjà sorti leur album. J'ai donc décidé d'aider certains de ces groupes en leur permettant de bénéficier de notre support promo. On a commencé avec Dark Poetry, un très bon groupe bordelais qui j'espère signera pour son prochain album chez Thundering. C'est aussi en cela que je conçois cette aide.
De même, j'ai (re)lancé Manitou (avec qui nous avions sorti l'album de Spasmophilius), et signé Alpha-Project, un excellent groupe néo de la région messine. Ce groupe ne rentrait pas forcément dans la ligne musicale du label mais il a su au delà de sa musique me convaincre.
MI. Thundering se veut un label éclectique dans ses groupes, pourquoi cet éclectisme et pas se concentrer sur un style comme le Thrash/Death par exemple ?
Laurent. Au démarrage du label, j'ai pensé développer justement cette lignée Thrash Death mais, dans un premier temps, je ne voulais signer que des groupes français (ce que je continue de faire). Ca n'était donc pas forcément évident de ne trouver que des bons groupes Thrash/Death. Enfin, aimant aussi la diversité dans le Metal, j'ai trouvé qu'il était idiot de se cantonner à un seul style. Je pense qu'il serait dommage d'ignorer un groupe comme Dying Tears ou plus récemment Anthemon, Amartia, The Silent Agony ou Alpha-Project.
MI. Tu n'es plus seul à diriger le label, on peut en conclure que Thundering travaille bien et qu'il s'en sort pas mal ?
Laurent. Je "gère" toujours le label seul, mais, j'ai accueilli en fin d'année 2002 une stagiaire presse, Laurie-Anne. Celle-ci souhaitait s'investir dans ce créneau. Le courant est bien passé entre nous. Elle a décidé de continuer l'aventure avec moi, tant qu'elle le pourra.
Je bénéficie aussi des services de personnes proches. Ca permet d'aller plus vite désormais pour répondre aux sollicitations. Quand à dire si on s'en sort pas trop mal, là, je n'ai pas le recul nécessaire et je ne suis peut être pas bien placé pour en juger. Si s'en sortir pas trop mal c'est vivre du label, et bien, on est bien loin du compte…
MI. Peux-tu nous compter la relation particulière qu'unie Thundering et Kristendom ?
Laurent. Ah Kristendom ! Ils font partie avec Broken Edge des groupes les plus proches. Je les connais d'avant la signature. Je suis fan du groupe et quand ils m'ont annoncé qu'ils souhaitaient rejoindre Thundering, j'étais sur un nuage, d'autant plus quand ils m'ont annoncé qu'ils refusaient d'autres propositions !
Humainement, ce sont des gars en or. Je les suis depuis presque leur début. Je crois qu'on a une relation de confiance mutuelle. De ce fait, on s'investit chacun à fond.
MI. Quel est l'album sorti chez Thundering dont tu es le plus fier ?
Laurent. Là, c'est vache comme question ! Je dirais tous, car chaque album a compté pour le label qu'il ait marché ou non d'ailleurs car derrière chaque petit succès ou déception, on en a retiré quelque chose.
Il va de soi que l'album "Inferno" de Kristendom, ceux de Broken Edge et Blackness font partie des tout premiers. Maintenant, j'ai aussi tissé avec des groupes arrivés plus récemment des relations qui dépassent de loin le simple cadre "label/groupe". Je pense à Amartia ou Burgul Torkhaïn. Anthemon et The Silent Agony qui font aussi partie des grandes satisfactions de cette année. Non, c'est définitivement trop dur comme question !
MI. Quel album de chez Thundering a été le mieux reçu par le public ?
Laurent. Kristendom, assurément. Mais le groupe avait déjà un nom avant de me rejoindre. Cela a facilité certainement les choses. Maintenant, l'album d'Anthemon pourrait bien arriver juste derrière ou devant… Tu sais, c'est difficile de répondre à cette question, car on n'a pas le recul nécessaire, le premier disque étant sorti seulement en 2000 car le label grossit chaque année. Ce qui était un succès hier ne l'est peut être plus aujourd'hui. On essaye pour chaque album de monter d'un cran. Petit à petit l'oiseau fait son nid. C'est notre politique.
MI. Peux-tu nous donner ton avis sur la scène Underground et Commerciale française par rapport à celle internationale ?
Laurent. Il y a différentes questions là dedans. Je sépare a priori l'underground du commercial.
Je crois que l'underground français est d'un très bon niveau. Regarde la qualité des groupes, quelque soit le style. On n'a plus rien à envier de ce côté là. Il en est presque de même pour la scène commerciale, sauf que cette dernière, plus qu'une autre, souffre de l'effet mode. Et le principe d'une mode, c'est de ne pas durer ; Plus dure sera la chute donc. Néanmoins, je suis très content du succès d'un Pleymo, par exemple. Ca ne peut que renforcer notre scène.
MI. Comment expliques-tu l'état presque amorphe du marché français malgré la présence de groupes nationaux au fort potentiel ?
Laurent. Peut être la surabondance ! Avant, tu avais les ténors et quelques groupes qui essayaient de percer. Maintenant, les ténors sont toujours là, et derrière, il y a énormément de groupes qui attendent et montent au créneau. C'est beaucoup plus facile aujourd'hui de faire un album relativement bien produit et de le faire distribuer. Pour un Helloween, combien de clones ? Pour un Immortal, combien de copies carbones ? C'est peut être là le nœud du problème. Beaucoup de copies, parfois très bien faites, il faut le reconnaître.
MI. Croix-tu qu'un jour la scène française sera connue et reconnue à l'étranger ?
Laurent. Elle l'a été, notamment avec Trust. Elle pourrait le redevenir. Il manque toutefois cette locomotive capable de fédérer. Le problème, c'est que le Metal se sclérose à trop se spécialiser. Aujourd'hui, si tu écoutes du néo, tu craches sur le Heavy et vice versa. Ca n'aide pas forcément à faire un réel élan.
MI. L'actualité de Thundering Records pour 2003/2004 ?
Laurent. Beaucoup de choses ! On a démarré avec Alpha-Project (chez Manitou). Aujourd'hui sont sortis les albums d'Anthemon et The Silent Agony.
Vont suivre ceux de LUEN-TA, DYING TEARS, THE SPHERICAL MINDS. Pas mal de signatures sont à l'étude, en fait. Sinon, les objectifs de l'année se porteront pas mal sur l'export. Je vais essayer de développer ce secteur.
MI. Quels conseils pourrais-tu donner aux groupes qui souhaiteraient travailler avec Thundering ?
Laurent. Rester humble et surtout ne pas se bercer d'illusions. Seul le travail et la motivation permettent de progresser. Un autre conseil… Il faut que les groupes s'organisent et se répartissent les tâches.
MI. A ton avis, quelle utilité ou différence a un webzine par rapport à un zine ?
Laurent. Le webzine permet surtout de coller plus rapidement à l'actu ; C'est son point fort. Ensuite, le webzine permet de toucher a priori plus de monde. L'accessibilité est plus grande.
Je t'avoue que j'aime bien les deux. Car on lit ou parcourt toujours un zine dans son intégralité, ce qui n'est pas forcément vrai pour un webzine.
MI. Qu'attends-tu d'un webzine comme Metal Impact ?
Laurent. Qu'il continue sur sa lancée. L'interface est sympa. Le site est très informatif et réactif ; J'apprécie sa diversité et son enthousiasme.
MI. Je te laisse la bafouille de la fin...
Laurent. Et bien le mot de la fin ! Merci à toi pour cette tribune et surtout bonne continuation avec Metal Impact !
Ajouté : Dimanche 09 Mars 2003 Intervieweur : Blasphy De Blasphèmar Lien en relation: Thundering Records Website Hits: 23740
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