JOURNEY 2 RAPTURE (usa) - As Fate Would Have It (2015)
Label : Auto-Production
Sortie du Scud : 26 septembre 2015
Pays : Etats-Unis
Genre : Progressive Post Hardcore
Type : Album
Playtime : 6 Titres - 39 Mins
Début d'après midi, temps gris, ambiance morne, il faut changer ça. Il y aurait des solutions, mais la musique reste la plus probante. Pour s'extirper d'un état léthargique, j'ai une recette imparable, et plutôt inhabituelle pour les oreilles.
Vous prenez une solide base progressive, vous y semez des graines de discorde Post Hardcore, un peu de Néo Metal par pincées parcimonieuses, et vous recouvrez le tout d'un chant envoûtant et légèrement décalé. Laissez fumer le temps qu'il faut, et servez le tout dans un genre de stop restau sur une route du Nevada, pas loin de Las Vegas.
Sur la carte, mentionnez sous un nom assez abstrait, du style JOURNEY 2 RAPTURE. Et observez les réactions gustatives des clients. Notez leur air étonné, et amusez vous de les voir vous regarder d'un air hébété.
"Comment ça s'appelle votre truc déjà ? C'est pas mauvais, mais c'est un peu trop relevé !"
"As Fate Would Have It"
"D'accord. Je le recommanderai peut être à mes clients alors". Dit le VRP moyennement satisfait de son repas.
JOURNEY 2 RAPTURE s'est formé à l'orée de l'année 2012, à l'aube d'une nouvelle ère. Ils s'avouent fans des guitares de Travis et Claudio de COHEED AND CAMBRIA, de Jerry Cantrell d'ALICE IN CHAINS, et de Brent de MASTODON. Mais ils citent aussi pour justifier leur genèse et l'hybridation qui en découle RUSH, METALLICA, KILLSWITCH ENGAGE et DANCE GAVIN DANCE, ce qui explique fort bien leur approche très personnelle et... complexe.
Ils ont la puissance du Metal/Néo Metal, les structures alambiquées du Progressif, et la rugosité libre du Post Hardcore s'approchant plutôt du versant Metalcore.
En gros, il est possible d'y goûter en reconnaissant les saveurs d'INTO ANOTHER, CYNIC même parfois, ATHEIST même, mais aussi de la vague Néo Core US des années 2000. Le brouet peut paraître lourd et indigeste, et si les dédales de sa pensée sont parfois trop abscons, la formule est riche, tout en stimulant plus les neurones que les papilles.
Leur motivation ? "Changer votre conception du Metal comme nos modèles l'ont fait". Comprenez donc ALICE IN CHAINS, C&C et MASTODON. Il est possible que ces jeunes américains arrivent à vous persuader du côté novateur de leur musique, mais celle ci est encore relativement hermétique et difficile à assimiler. Les plans s'enchaînent sans pause, les riffs se contredisent ou se complètent, et la rythmique évolue en terrain mouvant, sans arriver à se fixer sur un plan de route. Un peu comme si le DREAM THEATER de "Metropolis" croisait les couverts avec KILLSWITCH ENGAGE, mélangeant de fait la complexité instrumentale avec la sauvagerie la plus primale, tout en espérant faire passer ça comme une simple purée au jambon.
On se lance dans de longues digressions cryptiques, on les agrémente d'une violence vocale nuancée de quelques volutes à la DEFTONES, et finalement, on se retrouve à synthétiser la rage du Néo Metal avec l'équilibre instable du Progressif, à l'image d'un groupe de Néo Death qui découvrirait ses capacités techniques et se complairait à les étaler en public.
Loin d'être inintéressant, ce premier EP/LP propose de très bonnes idées, mais la complexité excessive des titres finit par abrutir un peu. On aurait aimé plus de sobriété parfois, et je ne trouve pas meilleur argument en ma faveur que ce labyrinthe qu'est "Hydroglycerine", qui ressemble à un puzzle thématique en mouvance perpétuelle, se plaisant à cacher des pièces en les remplaçant par d'autres, qui ne rentrent pas dans le tableau. C'est techniquement impressionnant, mais finalement à force de trop vouloir en faire, on s'y perd... et c'est dommage.
Le lyrisme du chant n'est d'ailleurs pas toujours à la hauteur de ses ambitions, et semble parfois un peu fragile. Mais c'est surtout le batteur qui provoque des céphalées à tricoter sur son kit des plans toujours plus acrobatiques qui nous noient dans un déluge de frappes parfois un peu gratuites.
Je n'ai rien contre la démonstration, pourvu qu'elle soit effective, et avec un but plus ou moins clair. Mais là, l'accumulations de performances individuelles nuisent à l'ensemble, et on décroche, tant on ne parvient pas à discerner le fil conducteur.
Et finalement, c'est l'entrée qui offre le goût le plus subtil. "As Fate Would Have It" coule le long d'une basse douce et jazzy, et si son final laisse présager d'une suite beaucoup moins stable, elle reste quand même dans un cadre Techno Death Progressif très digeste, et représente en fait le meilleur d'un repas beaucoup trop copieux aux saveurs trop difficiles à discerner.
Dommage que le trio/quatuor n'ait pas recentré son discours sur des thématiques plus concises, car on sent très bien qu'ils sont capables de livrer un album unique en son genre, pourvu qu'ils se débarrassent de certains passages tout à fait dispensables, et qu'ils se concentrent un peu plus sur l'efficacité.
Mais c'est un premier effort, alors ne leur coupons pas l'élan trop brutalement. Mais pour l'instant messieurs, si vous souhaitez servir de référence comme vos illustres modèles, il faudra beaucoup travailler votre compo, et rendre une copie moins raturée et moins chargée.
D'ailleurs, le temps est toujours aussi gris, et ça, c'est mauvais signe. Et nous n'avons pas encore vu dans l'établissement les clients du fameux VRP, qui a du oublier de leur souffler mot de sa découverte...
Ajouté : Dimanche 12 Juin 2016 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Journey 2 Rapture Website Hits: 5718
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