WOODS OF DESOLATION (au) - Torn Beyond Reason (2011)
Label : Eisenwald Tonschmiede
Sortie du Scud : 25 février 2011
Pays : Australie
Genre : Black Metal
Type : Album
Playtime : 6 Titres - 38 Mins
C’est avec une certaine appréhension que l’on attend ce second opus des excellents WOODS OF DESOLATION. En effet, suite à l’EP Sorh, qui ne brillait pas par sa production, le groupe était parti en stand-by. Heureusement, D. s’est remis à l’écriture de morceaux ; cette fois-ci avec la participation de Tim, son binôme de GREY WATERS (formation plus Rock), au chant et à la batterie. Entre-temps, AUSTERE s’est séparé et notre frontman australien, qui devait les rejoindre, a finalement réutilisé les compositions qu’il avait commencé à écrire pour ses collègues, sur Torn Beyond Reason, nouvel album de son propre projet. Sur ce disque, tout de même un peu court, il n’est donc pas étonnant d’y retrouver des sonorités dans la veine de To Lay Like Old Ashes, dû, outre certaines pistes, au recours du même studio de production. D. voulait, effectivement, un enregistrement professionnel, qui corresponde en tout point avec ce qu’il souhaitait dès le départ pour sa musique - dont il se sert pour capturer des instants (émotions, expériences,…) de sa vie. Autant dire que la différence est flagrante, à tel point qu’on croirait écouter un nouveau groupe tant le côté brut est complètement effacé. Le son est plus mature et affiné et offre un parfait rendu de chacune des lignes instrumentales.
Première à s’en réjouir, la section rythmique. Si elle était oubliée sur l’EP, il va sans dire qu’elle se rattrape à l’excès sur cet album. Sous l’hégémonie de Tim, les peaux des fûts subissent un affront démesuré. Bombardant d’office la piste d’ouverture, le batteur va profiter de cette recrudescence d’un rendu explosif pour déchaîner des blast beats à la pelle, bloquant, par la même occasion, la double pédale en mode automatique. Toutefois, il ne se contente pas d’exécuter une cadence rébarbative en continu, et s’alimente plutôt des puissants riffs pour insuffler davantage de hargne dans les morceaux. Son rendu carrément surboosté permet, sans conteste, de se rendre compte de l’importance de la batterie dans le mixage, et des différentes perceptions qu’elle octroie aux pistes, par rapport aux disques passés. Ainsi, l’ensemble des composants s’affichant sans problème, Tim peut administrer un dynamisme ardu et gagner en maîtrise sur les compositions, de par l’évolution des tournures rythmiques ; comme le démontre « The Inevitable End », au travers de sa longueur fleuve parfaitement structurée. Nuançant les tempos pour faire vivre le titre selon son gré, il débute sur un rythme modéré pour, au détour d’un roulement de toms, mettre en branle le morceau en destination de territoires insensés. La revitalisation de la batterie au sein de cette œuvre est un pur plaisir, dévoilant ainsi des titres effrénés emplis de hargne, à défaut des diatribes sans fin des guitares sur les premiers albums ; ce qui établissait un aspect dépressif alors que la musique de WOODS OF DESOLATION n’a jamais été pensée comme telle. Malgré tout, bien qu’on ne puisse pas le rechigner au vu de sa teneur passée, l’instrument semble un peu trop proéminent dans le mix ; être un peu plus étouffé aurait profité entièrement aux atmosphères. Cela ne gêne, toutefois, pas la basse replète qui se présente comme un support infaillible des percussions et des guitares, qu’elle renforce d’accords massifs et vibrants. Et on ne lui en demande guère plus.
En revanche, les guitares se doivent d’être décisives. Et elles le sont assurément. En dépit d’une production exquise clairsement l’ensemble, les cordes n’ont rien perdu de leur signature saturée impressionnante à travers laquelle D. crée son catharsis. Les riffs disposent toujours de cet aspect brumeux mais profitent, désormais, de leur mise en exergue pour exposer une mélodie savoureuse et évolutive. Les lignes atmosphériques profondément mélancoliques développent d’immenses scènes d’une poésie ésotérique dont l’émotion suinte de chaque accord. Quelques exécutions véloces se révèlent avec un mordant plus prononcé, qui se forge en réponse des blast beats impétueux. A vrai dire, à l’exemple de « Darker Days » et sa courte intro en guitare sèche vite rattrapée par la déferlante instrumentale, les morceaux font étalage d’un travail d’orfèvre quant à la combinaison des riffs poignants et d’une batterie s’acharnant avec passion, résultant en des pistes magistrales. Néanmoins, même en restant sur une allure placide, le duo réussi à faire évoluer sa mélodie sur les tonalités des guitares, et proposer de nouveau des tableaux sensationnels.
Une subjugation qui doit également son succès aux cordes vocales de Tim. Le nouveau porte-parole de WOODS OF DESOLATION enfante d’une voix déchirée inhumaine, à la fois très atmosphérique pour se confondre aux guitares saturées, mais aussi empruntant quelque peu au shriek. Absolument dévastatrices, ses paroles emplissent l’ambiance des compositions d’un tourment insondable. Cependant, bien qu’empreint de son timbre démoniaque, il arrive à nuancer ses tonalités, conservant une pointe d’affliction, pour impacter sur les sentiments. Ainsi, Tim exprime ses lignes avec une intensité hors normes, arrachant les émotions sans que l’on puisse opposer de résistance. Dès « Torn Beyond Reason » d’ailleurs, les vocaux effroyables ouvrent les portes d’une souffrance oubliée, s’immisçant dans chaque particules de notre corps, et liant les sensations aux leads plaintifs. Par contre, tout comme chez AUSTERE, et sur l’album précédent, quelques compositions se parent d’un chant clair spectral, s’incrustant dans les riffs, s’harmonisant à merveille avec les dissonances alentour dont il renforce le caractère vindicatif en apportant une lueur éthérée. « Somehow… » en contient, ainsi qu’une voix davantage Rock, s’accordant avec l’instrumentation plutôt retenue, avant que les vocaux extrêmes ne dévastent le peu de légèreté qu’il restait. L’on note, enfin, des chœurs majestueux subtilement disséminés pour sublimer les compositions.
En tant qu’auditeur, l’on est propulsé dans ce maelstrom gargantuesque, plaqué par la batterie virulente et fasciné par les schémas désolés des leads, tandis que la prestation ubiquiste de Tim nous transcende. Les titres font preuve d’un savoir-faire colossal, à l’image de « An Unbroken Moment », et son break d’une beauté déstabilisante, laissant d’abord filtrer une nappe opaque et quelques bruitages angéliques, puis se laissant guider par une contrebasse étalant avec classe un riff solennel ensuite repris par les autres instruments. Un morceau qui évolue aussi sans fioriture, et sans lasser, grâce à des mélodies toujours aussi captivantes et irrésistibles. Les morceaux deviennent rapidement épiques, dévoilant une pleine cohésion entre la beauté et la douleur, exprimée par l’ardeur de certaines partitions. Et grâce aux légères nappes orchestrales que les claviers apposent, les plages se trouvent magnifiées. Finalement, l’instrumentale « November » apporte une bise fraîche parmi les sonorités fourmillant de toutes parts ; d’un côté de par son acoustique et son air de flûte dépaysant, mais aussi car l’aspect Metal qui leur succède se démarque des autres pistes. L’harmonie musicale y est brillante, et les saturations ne sont pas aussi en avant, laissant les cymbales et leads envoûtants s’imposer.
Au travers de Torn Beyond Reason, l’Australien derrière WOODS OF DESOLATION livre une œuvre grandiose, d’une qualité exceptionnelle. Solutionnant tous ses défauts des trois dernières années, il parvient à dépasser les limites de ses horizons musicaux, écrivant une suite de compositions extrêmement honnêtes et touchantes. Défini comme l’album qu’il avait toujours voulu réaliser, ce second effort s’est sans conteste emparé de son âme, ouvrant à l’auditeur des fresques grandioses, unissant à merveille une mélancolie épique retracée par de fabuleux leads, et une désolation inégalée, que la rythmique impitoyable abat sans remords. Finalement, le ton eschatologique qui déchire l’atmosphère achève l’auditeur qui n’a d’autres choix que d’abdiquer face à cet univers dantesque.
Ajouté : Mercredi 14 Septembre 2011 Chroniqueur : CyberIF. Score : Lien en relation: Woods Of Desolation Website Hits: 9620
|