Faire du Rock ou du Metal entre frères, est-ce bon pour la cohésion familiale ? Une fois que Jean-Luc Delarue aura vaincu son cancer (ou pas), voilà une idée de talk-show un peu plus originale que les réconciliations larmoyantes récemment proposée. Nul doute que les frères Gallagher (ex-OASIS) déclineront l’invitation. Ce ne sera peut-être pas le cas de la fratrie Camargo / Kolesne ! 21 années de présence, 21 années d’un Brutal Death à la logique implacable, les frères Alex, Max et Moyses sont bien partis pour mourir sur scène d’un infarctus collectif. Rien ne semble pouvoir freiner l’incroyable progression de KRISIUN, figure de proue du Brutal Death brésilien et qui à intervalles réguliers, lâche une petite flatulence d’une grande finesse et d’une grande qualité. The Great Execution est le huitième album d’un groupe qui ne sera jamais entré en studio autrement qu’entre frangins, et ce depuis un certain Black Force Domain en 1995. Et même si ce Death n’est pas le plus excitant qui soit, une pareille particularité ne peut qu’imposer le respect à l’heure où les line-up essayent de ressembler de plus en plus à du caviar.

Revenons-en à nos moutons. Quoiqu’avec KRISIUN, un mouton ça ne vit en général pas très longtemps. Les lames sont aiguisées, les poignets sont échauffés et les têtes se croisent dans une valse macabre savamment orchestrée. Evidement, on sent les musiciens qui ont du métier. Ce Death a été composé avec une facilité déconcertante, ça crève les tympans ! C’est d’autant plus admirable quand on regarde certaines jeunes formations se triturer les neurones pour un résultat bien plus moyen. En tout cas, c’est très agréable de tomber sur des albums qui manœuvrent aussi bien la simplicité, sans pour autant oublier d’envoyer un son de derrière les fagots. Alors quels sont les temps forts de cette grande exécution ? Sans vous mentir, c’est un tout. A chaque seconde, KRISIUN torpille son Death magnétique dont le groove très sud-américain est un incroyable pôle d’attraction. Max étale encore une fois encore sa palette technique derrière sa batterie, même s’il n’avait plus besoin de prouver à quiconque qu’il est un frappeur vraiment hors-pair. Ses blasts mouchetés par les giclures sur les cymbales et la grosse caisse donnent du volume à l’ouvrage et lacèrent les pensées les plus pures. Des compositions clefs se détachent au fil du temps parmi lesquelles « The Sword Of Orion » dans un style plus aérien avec intro mystique à la guitare lead et un final remarquable qui effectue un improbable mariage entre guitare électrique et guitare sèche dans la plus pure tradition « muy caliente » du folklore brésilien. On se marre bien également en écoutant « Extincao Em Massa », ses rythmiques Thrash et son chant décalé en lusitanien. Puis nous avons ces solos, saupoudrés avec parcimonie mais jamais malhabiles ou ces cordes empêtrées entre la dureté d’un Death classique et la désinvolture de tempos swingués. Entre tradition et modernité, The Great Execution est un plaidoyer renversant. Les morceaux à rallonge de plus de huit minutes qui s’empilent pour aboutir à un opus qui dépasse l’heure de jeu, sans jamais faire poindre à un seul moment l’ombre de l’ennui, je trouve ça beau. Une fois encore, KRISIUN a pondu un disque qui vous envoie par le fond, pieds et poings liés. Jamais se noyer n’aura été une mort aussi douce.

Verdict : se relever après cette baffe tient de l’instinct de survie plus qu’autre chose. The Great Execution est vraiment un très bon album de Death Metal à la dure, peut-être le meilleur travail jamais réalisé par les brésiliens. Mais après 21 années d’une carrière si propre, qui aurait pu douter de l’issue de cette sortie ? KRISIUN reste KRISIUN, retourne un peu au Thrash, s’amuse et distribue un plaisir brutal. En fait, c’était la moindre des choses…